Naelly2023 Моя любовь, je me rappelle de toi Chapitre 2° Valentina

Chapitre 2° Valentina

Ivana ne vivait plus. S’accrochant au passé, elle essayait de se remettre de ce qui s’était passé. Chaque soir, elle essayait d’appliquer des méthodes trouvées sur Internet, en cherchant celle qui pourrait, quoi qu’il arrive, mettre fin à cette torture, empêcher son père de l’éloigner de sa famille. Pourtant, pendant trois ans, rien. Son espoir s’estompe, laissant place à un sentiment de culpabilité. Mais Ivana s’accroche au passé. Son cœur bat à la simple évocation du nom de son père, sa respiration s’accélère lorsqu’on parle de lui, sa peau tremble au souvenir de l’étreinte qu’elle a eue avec lui.²


Ce paragraphe résonne dans mon cœur. Ce paragraphe me rappelle des souvenirs. Ce paragraphe me rappelle ma vie, à ceci près que ce n’est pas mon père qui est parti… Ivana est tellement ressemblante avec moi, elle est de ce qui se rapproche le plus de ce que j’ai vécu, sans que je sois obligée de poser moi-même des mots dessus. On pourrait croire que l’auteur l’a vécu lui-même.


L’idée folle que ce soit l’homme qui est parti me traverse l’esprit. Mais c’est impossible, il n’aime pas écrire. Peut-être a-t-il changé depuis le temps. Je lis rapidement le manuscrit en entier, mon regard plongé sur chaque mot, chaque ligne. Tellement, que je ne vois pas l’heure défiler et que, lorsque je pose les yeux sur le dernier mot, je me rends compte que la nuit est déjà tombée depuis bien longtemps. Je me dépêche de ramasser mes affaires et emporte le manuscrit avec moi. Il faut absolument que je rédige mon avis dessus et que je le remette au directeur lundi matin. Je suis persuadé que celui-ci aura sa place parmi nos publications.


Je rentre rapidement chez moi et me dépêche de ranger mon sac. Je regarde le menu du soir. Volaille et pâtes.


Flemme de cuisiner.


Je reprends la voiture et sors en ville, au Restoran Oblomov. Un de mes préférés. D’habitude, je préfère cuisiner moi-même, apprécier ma cuisine et non celle des restaurants. Mais la journée a été longue et je suis épuisée. Ce roman m’a mis dans tous mes états et j’en ai même lâché une larme, au dernier chapitre. Je commande leur spécialité et, en attendant mon repas, j’observe la salle autour de moi.


Spacieuse, grande, sophistiquée. Tout ce qu’on attend d’une salle de restaurant. Des couples et des familles sont installés ensemble. Ils discutent. Ils rient. Ils s’amusent. Ils vivent. Et moi, je suis seule. Je boude. Je ne m’amuse pas. Je suis morte intérieurement. Je ne saurais trouver les mots pour décrire mon état émotionnel. C’est comme une tempête qui fait rage en moi. Un jour, tout va bien, il fait soleil. Et puis, un autre jour, le vent souffle, il pleut des cordes et la vie me paraît monotone. J’envie tous ces couples, assis à table, au lit, au travail. J’envie leur complicité, les petits gestes au quotidien qu’ils s’échangent. J’envie leur amour. Ça me rappelle ma jeunesse. Parlant comme ça, on penserait que je suis vieille, mais je n’ai que 23 ans. À cet âge, on devrait sortir en boîte, s’amuser, profiter, avoir un copain, peut-être même des enfants. Au lieu de ça, je n’ai rien. Rien qu’un passé traumatisant et un frère mort qui hantent mes nuits. Ça fait rêver, n’est-ce pas ? J’ai connu l’amour, autrefois. Avant qu’il ne s’en aille. J’ai connu le goût du baiser passionné. J’ai connu le goût du premier baiser. J’ai aussi goûté au dernier. J’ai aussi goûté au « au revoir ». C’était plus un « adieu » qu’un « au revoir ». Et puis, plus rien. L’amour s’est enfui. Et moi aussi. Et puis, plus rien. Je n’ai plus embrassé personne. Je ne suis plus sortie en boîte. Je n’ai plus vécu une seule relation. Je n’ai plus rien fait. Dès qu’il est parti, mon cœur s’est brisé et j’ai arrêté de vivre. Cumulé deux disparitions d’êtres chers, c’est essoufflant.


Lorsque mon plat arrive, je déplace les aliments dans mon assiette. Ressasser le passé m’a coupé l’appétit. Voir ce couple, à l’autre bout de la pièce, se donner à manger, poser leur main l’une par-dessus l’autre, discuter. Ensemble. Je suis dégoûtée. Je suis triste. Je suis peinée. J’aurais dû attendre son retour sagement. Mais c’est trop tard pour revenir en arrière.


Je me force à manger et payer en vitesse pour rentrer chez moi. Dans mon lit, le sommeil ne vient pas. Je ressasse toute ma vie. Je me remets en question. Le sommeil ne vient pas. Je pense au passé. Je pense à ma vie d’avant. Elle me plaisait. Elle me plaisait, avant que je ne me renferme. Mais que puis-je y faire maintenant ? Le sommeil ne vient pas. Je repense à tout ce que j’ai vécu, avant la mort de mon frère. Je repense à son visage, à ses fous rires, à tout ce que j’aimais chez lui. Et je me dis qu’il n’aurait pas voulu que je sombre dans l’isolement. Le sommeil ne vient pas. Les larmes coulent le long de mes joues. Je m’en veux. Je m’en veux terriblement. Ma vie s’est effondrée. Et je ne peux rien faire pour rattraper toutes les erreurs commises. Le sommeil me rattrape. Il me rattrape et m’emmène dans les bras de Morphée. Je ne suis plus capable de lutter. Mais je ne veux pas me retrouver face aux cauchemars qui me hantent, me font du mal. Je ne suis plus capable de les voir, d’entendre le rire et la joie résonner. Je ne peux plus. Et pourtant, cette fois, je sombre dans un sommeil sans rêves. Pour une fois. Sûrement la seule.


Дорогая моя Ивана³,

Tu ne peux savoir à quel point j’attends ton appel, j’attends ton retour avec impatience. Tu ne peux savoir que, dans mes rêves, il n’y a que toi. Tu ne peux savoir tout ça, car tu t’es enfui. Tu t’es échappée de cette vie de famille. Tu t’es enfuie je ne sais où. Personne ne le sait. Mais dis-moi, моя дорогая, моя принцесса, мой ангел⁴, dis-moi que tu penses à moi parfois. Dis-moi qu’il t’arrive de repenser au bon vieux temps où nous riions, nous jouions ensemble, nous allions faire les magasins. Dis-moi que, в твоем сердце⁵, il reste une petite place, même infime, et que c’est moi qui l’occupe. Моя дорогая Ивана⁶, je te cherche inlassablement, toutes les nuits, tous les jours, tu hantes mes pensées, tu me tortures le cœur et l’esprit, je ne pense qu’à toi, tu m’obsèdes. Et pourtant, tu es inaccessible. Et pourtant, je ne sais plus qui tu es. Je t’ai perdu de vue, tu as disparu, et ton image gravée dans mon esprit s’estompe au fil des années. Au fur et à mesure, tu deviens flou, tu disparais de mes souvenirs. Je t’oublie peu à peu. La couleur de tes cheveux. La couleur de ta peau. Ton rire. Ton sourire. Tout. Tout ce qu’il me reste de toi est la couleur de tes yeux. Un bleu perçant. Un bleu comme je n’en avais jamais vu. Un bleu que je reconnaitrais parmi mille autres dans la rue. Ледяной синий. И эта ледяная синева позволит мне найти твой след, моя дорогая.⁷









² Ce passage est écrit en russe.


³Ma chère Ivana


⁴ma chérie, ma princesse, mon ange


⁵dans ton cœur


⁶Ma chère Ivana


⁷Un bleu glacé. Et ce bleu glacé me permettra de retrouver ta trace, ma chérie.


Tu as aimé ce chapitre ?

0

0 commentaire

Vous êtes hors connexion. Certaines actions sont désactivées.

Cookies

Nous utilisons des cookies d’origine et des cookies tiers. Ces cookies sont destinés à vous offrir une navigation optimisée sur ce site web et de nous donner un aperçu de son utilisation, en vue de l’amélioration des services que nous offrons. En poursuivant votre navigation, nous considérons que vous acceptez l’usage des cookies.