Fyctia
C4_Feux de camp
Un silence s’installa entre nous tandis que nous déambulions entre les différents feux de camp, qui me mit vite mal à l’aise.
Nous arrivâmes finalement à bon port - et sans se perdre ! - . Je fis mine de m’installer, de m’étirer, je déboutonnai lentement deux-trois boutons espérant qu’elle capte le message : j’ai besoin d’intimité. Je ne devais pas être assez clair, car elle resta là, songeant à je-ne-sais-quoi. Son attention dévia vers moi lorsque j’alignai mon épée le long de ma couverture.
— Alors c’est grâce à cette épée que tu as… fait ce que tu as fait ?
Elle connaissait pertinemment la réponse, mais je jouai le jeu, le cynisme me réussissant rarement.
— Et oui ! Aucun talent d’alterisation chez moi, dis-je en haussant les épaules.
— Ton épée, elle est altérisée ?
— Quoi ?
— Quoi, quoi ? Tu sais pas ce que ça veut dire ?
— Si, bien sûr que si… Non, le régent dit qu’il s’agit d’une lame incarnée.
— Une lame incarnée ? C’est très rare ! Je pensais qu’il n’en existait plus. Tu ne lui as pas posé la question ?
— À qui, à Dyf ?
— À qui ?
— Ah, Dyf, c’est, euh… le nom de cette épée. Parce qu’elle à un nom tu vois…
— Et alors, tu ne l’as pas interrogé ce Dyf ?
— C’est-à-dire… il boude en ce moment. Il ne veut plus me parler.
Je n’en revenais pas de dire ça. Kélis, elle, ne parut guère perturbé - à vrai dire, la majorité des choses semblait glisser sur elle avec la fluidité de la pluie sur une feuille de chêne -.
— Tu comptes dormir ici ? plaisantai-je à moitié.
Elle remua la tête, comme si je l’avais sortie de ses pensées. Elle bredouilla un « non, bien sûr », murmura un vague « au revoir » et se détourna de moi, ses longues tresses flottant derrière elle.
Une fois glissé sous ma couverture, j’observais la dentelle macabre formée par la silhouette des branches aux angles torturés, obstruant le ciel étoilé. Les volutes de fumée des feux de camp zigzaguaient entre les troncs pour rejoindre les frondaisons.
Submergé par la fatigue - sincèrement, j’avais plus marché que respirer aujourd’hui -, je pensais sombrer dans le sommeil aussi facilement qu'on glisse dans un bain chaud. La vérité fut tout autre. Je me tournai moult fois sur moi-même sans jamais trouver de position confortable, la faute à un sol irrégulier, dur comme la roche -et pour cause… -. J’étais trop tracassé pour me laisser aller, et notre bivouac avait beau être isolé, le calme y était une chose toute relative.
Autour de moi me provenaient des ronflements profonds - parfois impressionnants, toujours irritants -, des rires à gorges déployés suivis d’insultes, le bruissement du vent qui agitait les feuilles et des dizaines de sons, effrayants, car inconnus, de créatures tapies sous les racines, dans les broussailles ou dans les ramures.
Je tirai le bocal à lucioles offert par la Roussine de mon sac et le posai au niveau de ma tête. La lueur multicolore dégagée par leur danse aléatoire m’apaisa un instant puis finit par m’hypnotiser. Avant que je ne le réalise, mes paupières s’alourdirent, s’abattirent, et, enfin, je profitai d’un repos mérité. Qui se révéla bien bref.
2 commentaires
Gaëlle K. Kempeneers
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Il y a 7 mois
John Wait
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Il y a 7 mois