MAISIAM SEMES VILMA Chapitre 25 SUSPICION

Chapitre 25 SUSPICION

Quand j’ose me rapprocher d’elle, elle reprend en s’éloignant de moi.

 – J’admets que je vais un peu loin, fait-elle en se radoucissant. Mais tout ça est trop important pour que l’on se taise ! Crazypony, les flics viennent au manoir cet après-midi pour ton interrogatoire, non ? On va venir aussi et on montre tout ça à Montclart, qu'est– ce que vous en pensez ?

–Je ne suis pas d’accord ! Je ne vois pas trop ce qu’il pourrait faire de plus, lui ! Et puis, je n’aime pas les flics !

– À ton avis ? Intervint Maxine, dans un haussement d’épaules. Il fera son boulot, c’est tout. Et puis, on ne va pas garder ça pour nous, non ? C’est normal de mettre la police au courant, et je me sentirais plus rassurée… 

Personne ne s’était dénoncé. Pas de corbeau parmi nous…

– Vous savez quoi ? Si dans le groupe, on commence à devenir soupçonneux, ce « CQS » aura réussi à nous monter les uns contre les autres ! Et c’est peut-être son but ! Moi, je refuse de le laisser prendre le dessus sur nos vies : notre cohésion fait notre force. 

Quoiqu’un brin pompeuses, mes paroles laissent chacun songeur. Mais j’ai réussi, je ressens à nouveau cette amitié si parfaite qui nous liait auparavant.

Dans son coin, bizarrement muette depuis le début, Lara affiche de la perplexité. Qui est donc ce « CQS » qui gâche le bon tour qu’elle voulait jouer aux autres ? Les lettres anonymes, c’était SON idée à elle ! Il n’était pas du tout prévu qu’elle en reçoive une, elle ! Elle avait même passé toute la nuit précédente à les écrire, chacune étant personnalisée en italique.

Ça ne va pas les amuser, pense-t-elle enragée, maintenant que l’autre débile nous harcèle ! D’accord, Vilma est morte, mais il n’y a pas de quoi en faire toute une histoire !

Comme prévu, nous rejoignions Lara, lettres en mains, au manoir. Lord Fandells nous remercie pour notre soutien, mais nous demande de ne pas intervenir tout de suite. Il n'a pas l'air bien choqué par les missives que nous avons reçues, il reste impassible à nos objections. Néanmoins, Lara lui suggère d'autoriser un seul d'entre nous à ses côtés et il y consent ! Je n'ai même pas le temps de me proposer, je vois Lara saisir H par le bras et se diriger vers la bibliothèque. Hank toujours affable nous conseille d'aller au poste de police de Pinestop pour porter plainte contre le corbeau. Et c'est ce qu'évidemment nous nous empressons de faire. Le poste de police de Pinestop est un tout petit bureau juste en face d'un vendeur d'antiquités, c'est un joli bâtiment vu de l'extérieur, à l'intérieur les choses se corsent un peu. On ne peut pas dire que l'accueil est un modèle de propreté et de rangement ! Poussiéreux par endroits et puant le café froid. Même affamé depuis trois semaines, je n’aurais pas osé mettre la langue sur cette espèce de truc poilu au dégradé de verts, qui connaissait une fin douloureuse, écrasé sous une masse de dossiers, sur un bord du bureau et qui avait dû s’appeler dans le temps « pizza ». Le préposé aux plaintes nous fait entrer dans son cagibi, il se frotte les mains, visiblement heureux d'un peu d'action. Je ne connais pas ce type, je n'ai jamais mis les pieds dans ce poste de police, j'ai toujours traité avec Thomas, mais là franchement, je me sens plutôt mal... Debout, nous sommes serrés comme des sardines. Je remarque un magnifique aquarium rempli de broutilles végétales et de décors classiques, calé dans un angle sur un tabouret à l’apparence trop frêle pour le soutenir. À la surface flotte un ridicule canard jaune en plastique, et le bac n’est habité que par un minuscule poisson rouge qui semble réfléchir à son sort de misère. Sur l’un des murs, parmi divers articles de journaux, un poster de KOJAK dédicacé (comme je l’envie), et au pied du portemanteau, une guitare sèche… Je ne peux m’empêcher d'imaginer ce grand type à l'aspect souffreteux, durant ses moments de tranquillités – qui devaient être nombreux même depuis le drame – grattant les cordes en poussant du « AC/DC ». Le coup de coude, que me donne Marlon dans les côtes, me sort brusquement de mes pensées. Il me désigne de la tête le flicaillon, qui est concentré sur la lecture de nos courriers. Ignorant presque notre présence, il fronce les sourcils et mime avec les lèvres les mots qu’il est en train de lire. Je m'attends à ce qu'il ne nous prenne pas au sérieux et qu'il nous fiche dehors. Pourtant, c'est avec une certaine force qu'il nous balance que l'absence de timbre, prouve que ce « CQS » sait où nous vivons. Je pense qu’il a lui-même glissé les lettres dans vos boites, à moins qu’il n’ait un complice, bien sûr, mais bon... Il y a matière à s’inquiéter, c’est sûr, même si ce ne sont peut-être que des mots. De toute façon, comme il a écrit à la main, on a son écriture, il ne doit pas être aussi malin que ça. Si vous êtes d’accord, je vais confier vos lettres au laboratoire de Rocket Mount, j’espère qu’ils en tireront quelque chose. En tout cas, restez sur vos gardes les enfants et au moindre truc suspect, vous revenez illico-presto ici, on est d'accord ? Oui, bien sûr, on avait pensé créer une milice et organiser des battues, mais votre proposition est plus séduisante. Après le départ de la bande de potes, le sergent Dougall s'empare d'une petite boite d’aliments pour poissons et commence à en distribuer dans l’eau.  

– Tu sais, Moby Dick, (il s’adresse au poisson rouge) je n’aurais jamais imaginé l’ampleur qu’a prise cette affaire. Je ne pouvais pas me l'encadrer la Vilma, mais c'était un joli petit lot, qui aurait pu servir à plein d'autres choses. En tout cas, si j'arrive à démasquer ce foutu corbeau qui emmerde les jeunes, ça fera du bien à ma carrière, Peut-être même que je serais promu dans une grande ville ! On verra bien ! À la tienne Moby ! Assise dans la salle d’interrogatoire qu'est devenue sa bibliothèque, Lara fait face à l'agent du FBI, à la journaliste, et à la psy de Marsh qu'elle connaît de vue, à côté d'elle, l'avocat désigné par lord Fandells pour l'assister et dans le fond H, qui ne sait pas très bien pourquoi il est là. Lara pense qu'elle n'a pas besoin d'avocat, elle choisit de prendre une attitude revêche, Oui, son alibi est vérifiable, elle n'a pas quitté le manoir, les gardiens de nuit l'auraient vue. Ils restent à proximité de la bâtisse, et de toute façon, il y a des détecteurs de présence sur tout le domaine. Elle assure qu'elle aurait aimé réduire en bouillie ce sale petit cafard de Vilma, mais, elle ne lui a rien fait, elle n'aurait pas tenu le choc, Vilma était bien plus sauvage qu'elle. Elle est tout à fait disposée à montrer ses récentes dépenses, pour prouver à ce petit agent qu'elle n'a pas pu embaucher quelqu'un pour faire le sale boulot. Albert, lui apporte le café qu'elle a demandé un peu plus tôt !  Pas de sucre, beurk ! L'avocat ne tarde pas à faire état des lettres de menaces dont sa cliente ainsi que ses amis sont victimes.

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1 commentaire

Warren J.

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Il y a 2 ans

Peut-être aérer le texte pour faciliter la lecture ? J'ai bien failli manquer Moby Dick dans le flot textuel !
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