MAISIAM SEMES VILMA Chapitre 24 LES LETTRES

Chapitre 24 LES LETTRES

Une fois dehors, il va ramasser le journal, livré en trois exemplaires chaque matin et se dirige vers la boite aux lettres. Le temps s’annonce beau aujourd'hui, encore une journée parfaite en Caroline du Nord. Un paquet de lettres l'attend, il s'en empare et d'un geste machinal en fait le tri, factures, pubs débiles, demande d'adhésion ou de renseignement, et pour la première fois depuis plusieurs mois, une lettre bizarre lui est personnellement adressée, il dépose le courrier du club sur le bureau de Marsh et remonte au studio ouvrir son courrier. Sigourney est debout, enveloppée de sa chemise. Comme bon nombre de filles, elle fait toujours ça, juste pour sentir encore l’odeur de l’amour. Quand elle se tourne vers lui, il est prostré comme si le temps l'avait figé, il n'a aucune réaction. Elle se saisit de la lettre et ce qu'elle lit la glace d'effroi. Ils pensaient avoir bien gardé le secret, pourtant quelqu’un sait.

C’est écrit rouge sur blanc, comme avec des lettres de sang.


   Cher Nick,


Je t’écris pour te dire que je te surveille et que je sais. Tout ce que tu as fait. J’espère que tu as mauvaise conscience. Tu as fait du mal, et tu seras puni. La mort, un jour aussi, te frappera et je serai là pour le savourer. Je te hais.

CQS (Celui Qui Sait)


Est-ce le choix des mots, ou bien l’écriture baveuse, rouge sang qui affole davantage ? Sigourney ne veut pas sombrer dans le piège. Elle regarde fixement Nick, cherchant la plaisanterie, mais elle doit se rendre à l’évidence : Nick ne dégage plus que de la peur. Elle reste un moment comme ça, complètement interdite, puis s’approche de son amant pour le prendre dans ses bras.

– Qu’allons-nous faire ? Répète–t–il sans cesse, paniqué.

– Ne pas entrer dans la paranoïa, finit par répondre Sigourney, en s’écartant de lui. Ce n’est peut-être qu’un mauvais blagueur.

– Tu crois que ça me rassure ça ? Non, on nous a obligatoirement vus ensemble !

– Impossible ! Lâche–t–elle, passablement irritée. Ce « CQS » de merde, il sait que dalle ! Et quand bien même, il saurait que nous sortons ensemble, où est le hic ?

– Le hic ?! S’indigne Nick. Mais, c’est qu’il nous mate sûrement ! Où qu’on soit et tout le temps !

– Très bien, je vois que rien ne peut te calmer ! Moi, je préfère ne pas me sentir épiée ou menacée. Sinon, je ne vis plus. Et puis réfléchis, pourquoi ce « CQS » écrit seulement maintenant, s’il sait depuis le début ? Ce n’est que du bluff… Écoute, mon trésor, quelqu’un sait pour nous ? Très bien, nous verrons ça plus tard, fais-moi confiance. 

  Nick peut lui faire confiance, elle n'est pas du genre à se laisser marcher sur les pieds, et si Sigourney, met la main sur ce connard de corbeau, il va passer un sale quart d'heure.

Nous sommes tous réunis au club, l'ambiance est tendue, nous avons la sensation d'être en danger.

– Et elle dit quoi, la tienne ? 

Tous se posent la question, dans un brouhaha trahissant une anxiété grandissante. Je vois dans la main de chacun de mes amis, une lettre paraphée du même nom. « CQS – Celui Qui Sait ». Mais qui sait quoi, bordel de merde ? Ce foutu corbeau s'est fendu d'un message personnel à chacun de nous !

Dans la mienne, il me menace carrément de mort ! En la relisant (pour la cent douzième fois au moins), je n’arrive pas à croire que ces mots m’attaquent, moi ! Je les parcours comme s’ils s’adressaient à quelqu’un d’étranger, à un autre corps, à un autre Marshall… En tout cas je suis celui qu'il déteste le plus, “me foutre une décharge de chevrotine en pleine poitrine”, car il me reproche carrément d'être, si ce n'est le bras armé, au minimum le cerveau de ma bande, j'irais selon lui “tout droit en enfer !”

Tout le monde (mon pauvre cousin inclus) a reçu une lettre de ce corbeau, une lettre énigmatique et menaçante !

– C’est totalement dingue !

Mon ton fait sursauter plusieurs de mes amis.

– Qui peut bien s’amuser à nous envoyer ce genre de conneries ? 

Je me sens sur le point de perdre le contrôle de la situation, et de moi-même… Autre ironie du sort, ma haine pour Vilma m’avait conduit à être à mon tour la victime d’une haine féroce !

– Je ne vois personne parmi notre entourage qui en veuille à nos vies, poursuis-je.

– À part Vilma dans le temps… Mais bon, c’est quand même pas son fantôme qui nous écrit ! 

H a la réponse la plus évidente, il suspecte Renatee, c'est vrai que c'est tout à fait plausible, elle nous déteste et nous le lui rendons bien, mais toi H, pourquoi ?

   – Il me croit responsable d'un truc, c'est sûr !

– Mais responsable de quoi ? S’agace Nick, t'es le seul à qui elle n'a rien fait l'autre pute, et en plus, elle était déjà cannée quand tu t'es pointé. T'es le seul ici dont on est sûr et certain de l'innocence, enfin du point de vue de Montclart !

L’air devient irrespirable et, à cet instant, il n’y a plus aucune cohésion entre nous. Je vois mes amis avec un œil différent, suspicieux… Quelque chose me fait douter, et ce n’est plus de MOI dont j'ai peur... Quelqu’un de la bande a–t–il envoyé ces lettres, et cherche-t-il à prêcher le faux pour savoir le vrai ? J’avoue, c'est dégueulasse, mais je suspecte Lara. C'est la seule qui ait l'esprit assez tordu pour faire ça. Et en deuxième suspect, je m'en veux de penser à Marlon ! Bon calmons-nous ! Mon esprit est toujours confus, et je préfère écarter l’hypothèse de la culpabilité de l’un de mes amis sur toute cette affaire. Devant leurs mines déconfites, je me sens honteux d’y avoir pensé, et je suis pris d’un violent instinct paternaliste. Et je sors une phrase aussi bateau qu'une péniche.

– De toute façon, Rien ne peut vraiment nous arriver, tant qu’on reste uni…

– Mais rien ne nous dit que « CQS » fait référence à Vilma ! M’interrompt Maxine, plus énervée qu’anxieuse.

– Max, rien en effet ne nous le dit en clair ! Et d’ailleurs au début, j’étais d’accord avec toi, moi, je ne la connaissais pas, l’autre garce, mais que je le veuille ou non, je suis impliqué par mon lien familial avec Marsh et que de plus, je suis son alibi ! Le corbeau m’accuse d’avoir menti et me demande de foutre le camp d’ici, alors je viens à penser comme Marsh que tout ça, c’est lié. » Ma petite Sissi passe encore ses doigts sur la balafre et se racle la gorge. Elle se lève de son siège et lance subitement :

– J’espère que ce « CQS » ce n’est pas l’un de vous ! 

Ses propos me foudroient. Apparemment, cette possibilité lui a aussi effleuré l’esprit, mais tout en elle me choque. Sa voix, son attitude, ses traits déformés par une sorte de rage… Tout le monde en demeure coi. Je jette mes yeux dans ceux de Sissi et crois un instant faire face à une autre personne. Je n’ose pas intervenir, sa réaction me parait exagérée, et je mets cela sur le compte d’une extrême tension due aux derniers événements.

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