Fyctia
Chapitre 2 DU SECOURS ?
En temps normal, ce genre d’humour noir l’aurait fait se tordre de rire, mais ce soir, le petit jeu sanglant la fait plutôt se tordre de douleur. Comment tout cela avait-il débuté ? Elle farfouille dans les derniers retranchements de sa mémoire, et se rappelle…
Une invitation téléphonique anonyme... Une voix masculine aux intonations étrangement familières... Malgré un vague pressentiment qu’elle avait rapidement chassé de son esprit, sa curiosité démesurée avait eu raison de son choix final. Cette escapade nocturne revêtait des allures d’interdit : rencontrer un inconnu… D’ailleurs, était–ce vraiment un inconnu ? Marshall… ?
À la nuit tombante, toute échaudée et apprêtée pour l'occasion, elle était arrivée sur les lieux du rendez-vous après une marche d’un quart d’heure. Une voiture, tous phares allumés, l’attendait. Elle s’en était approchée d’un pas décidé. Le moteur tournait, mais personne au volant. Intriguée, elle avait jeté un rapide coup d’œil autour d’elle, avant de trouver la situation moins excitante et de vouloir rebrousser chemin…
Elle se souvient du choc reçu à la tête qui l’a plongée dans une demi inconscience, suivi des éraflures causées par le sol rocailleux et sec sur son corps traîné. Puis le trou noir… Elle ne s’est pas rendu compte du voyage en voiture après sa captivité, ni de la présence de l’autre personne...
Le retour à la réalité est brutal. Des coups pleuvent sur son visage et son corps. Elle perçoit des rires, mais dans sa tête résonne un tapage, mêlant batterie et sirènes de pompier. Le Bourreau, qui doit la trouver trop distante, lui assène un violent coup de poing sur le crâne. Ployant sous la douleur, elle se sent partir dans l’inconscience, mais de l’eau glacée lui est balancée en pleine face. C’est là que la lame effilée lui entaille la joue droite. Le Bourreau, galvanisé par l’expression stupéfaite de sa victime, murmure à son oreille quelque chose qu’elle ne comprend pas. Puis la lame taillade une partie de son cou et descend jusqu’à sa poitrine, dont un sein est visible. Très vite, son tee-shirt blanc déchiré est maculé de sang. Une tache rouge qui s’épaissit… Contre toute attente, elle parvient à cracher le tissu qui entravait sa bouche, et plutôt que de hurler, sa première inspiration est pour son Bourreau.
– Pitié ! implore-t-elle.
Une voix sort alors des buissons.
– Pitié ? Je ne connais pas ce mot ! Tu as déjà eu pitié, toi ?
Cette voix ! Ce ne peut être… En voyant la silhouette sortir de l’ombre et s’avancer vers elle, ses soupçons sont confirmés, et ce, malgré le camouflage noir que le complice a en commun avec le Bourreau. Ses yeux, qui ont plus tôt crié grâce, deviennent maintenant rageurs. Cela déplaît au Bourreau, qui l’assomme d’une grande baffe. Elle sent son nez pisser le sang que ses lèvres gouttent avec horreur. Elle reste la tête penchée en avant, sous le choc, et le Bourreau exaspéré lui saisit le visage.
– Tu vas montrer quelque chose que tu ne connais pas : le respect !
L’autre, qu’elle considère comme le Cerveau de ce dessein criminel, s’adresse au Bourreau d’un ton irrité, impatient d’en finir.
– Bon, alors tu te bouges ? On n’a pas que ça à faire !
– Minute, fait le Bourreau comme un soûlard, on est dans les temps ! Je veux juste m’amuser un peu. Si tu savais le pied que ça me procure !
– J’ai bien vu, ajoute le Cerveau en affichant un sourire. Je t’accorde un peu de plaisir, tu l’as bien mérité…
Soudain, un bruissement dans les fourrés, suivi d’un craquement de branches, interrompt le dialogue. Les deux monstres se taisent un instant, à l’affût du moindre son.
– Qui est là ?, gueule le Bourreau, dont la voix trahit une inquiétude.
À nouveau un bruit de branches cassées. Tandis que la victime, à demi abrutie, s’apprête à lancer un appel au secours, le Cerveau lui remet le bâillon tout ensanglanté sur la bouche.
– C’est peut-être un animal, suppose le Cerveau.
S’écartant de leur victime qui prie pour la venue d’un sauveur, le Bourreau s’empare d’une torche, dont il dirige le faisceau vers le coin suspect. À la vue de l’intrus, le Cerveau s’exclame moqueusement :
– C’est une vache, crétin !
– Et alors, s’énerve le Bourreau, malgré tout rassuré. Elle fait quoi là, cette vache ?
– C’est une débroussailleuse. Elle et ses copines sont là pour entretenir la forêt, explique le Cerveau. Tu n’y connais vraiment rien !
– Ouais, ben fais-la déguerpir, je n’aime pas ça ! C’est moche et ça pue ce truc !
Le Cerveau soupire et fait des gestes intempestifs afin d’éloigner l’animal, qui reste d’abord stoïque, mâchouillant des brindilles. La vache regarde droit dans les yeux ceux qui pour elle sont deux drôles d’énergumènes. En effet, ils sont tout de noir vêtus, chacun affublé d’une cagoule, d’un ciré de pêcheur et de sacs-poubelle enveloppant leurs chaussures. L’animal ne bouge pas d’un poil, tandis que la victime pleure intérieurement. Son rêve de secours vient de tourner en eau de boudin face à cette ridicule vache, dont la seule menace peut être de chier une bouse du diable.
Le Cerveau, agacé, se saisit d’une pierre et la balance à la tête de l’animal, qui s’enfuit dans des meuglements d’insultes. Après s’être épousseté les mains, le Cerveau jette un regard désobligeant au Bourreau.
– Peur d’une vache, quel homme !
– Ça va, ne me cherche pas.
6 commentaires
Vanessa BOUGRER-CINQVAL
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Il y a 2 ans
MAISIAM SEMES
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Il y a 2 ans
Merixel
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Il y a 2 ans
MAISIAM SEMES
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Il y a 2 ans
RIPOST
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Il y a 2 ans
MAISIAM SEMES
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Il y a 2 ans