Fyctia
Greyson
Ma colocataire se retourna d'un bon face à moi. Comme je m'étais légèrement penché en avant, son visage se retrouva à seulement quelques centimètres du mien. J'avoue que je ne m'attendais pas à ce que nous nous retrouvions aussi proches, à tel point que je ne sus comment réagir. Je restai figé, tout comme elle. Ses joues prirent une légère teinte rosée alors que ses yeux émeraudes étaient plongés dans les miens.
Je finis par me redressé en sentant mon propre visage s’empourprer. Heureusement que je ne m'étais pas rasé ce matin, ça cachait un peu mes émotions soudaines. C'était d'ailleurs, je crois, la première fois qu'une telle chose m'arrivait.
Je me raclai la gorge.
-Pardonnez-moi, je ne voulais pas vous effrayer, lui dis-je.
-Oh, non, répondit-elle. Vous...vous m'avez surprise, c'est tout. Je ne vous avais pas vu arriver.
-Oui. Il faut croire que je passe plus inaperçu quand je ne porte pas de costume.
Elle me détailla de la tête aux pieds. Son regard s'arrêta sur mes chaussures et un petit sourire se dessina sur ses lèvres.
-Vous les avez achetées aussi, finalement ? me demanda-t-elle en désignant les Timberland beiges que j'avais aux pieds.
-Je me suis dis qu'une paire de rechange pourrait m'être utile. Au cas où.
Au début, je voulais seulement prendre les noires, mais j'avais changé d'avis une fois arrivé à la caisse. Il m'avait semblé pendant mes essayages que c'était celles que ma voisine préférait. Elle avait paru un peu déçu que je choisisse les plus basiques. Je ne sais pas pourquoi j'avais décidé de prendre les beiges aussi.
-Eh bien cette tenue vous va très bien, me dit-elle. Et c'est vrai que vous vous fondez un peu plus dans le décor. On pourrait même croire que vous êtes vraiment en vacances.
-Ce soir, je le suis. Qui ne rêve pas de laisser son boulot derrière soi pour passer une heure à décorer un arbre ?
-Attention, vous recommencez à être aigris.
-Ah ? Navré.
Au lieu de lever les yeux au ciel comme je m'y attendais, elle se mit à sourire de plus belle. Pour un peu, je l'aurais presque imité, si je ne m'étais pas forcé à garder mon sérieux.
-Alors ? demandai-je. Vous voulez qu'on fasse équipe ?
Elle regarda autour d'elle.
-Eh bien, je crois que tout le monde a déjà choisi son groupe alors, comme vous l'avez fait remarquer tout à l'heure, il ne reste plus que nous deux.
Elle se tourna à nouveau vers moi.
-Mais je vous préviens, je prends la décoration du sapin très au sérieux.
Pourquoi ça ne m'étonne pas ?
-Vous savez que ce n'est pas un concours, au moins ?
-Je le sais bien, mais c'est quelque-chose que j'aime faire. C'est quand on installe le sapin et les décorations que la magie de Noël commence à opérer.
Décidément, elle était bien plus fane de cette fête que je ne le pensais. La magie de Noël. Je pensais que seuls les enfants croyaient encore à ce genre de chose. Je ne me rappelais plus de la dernière fois que j'avais été aussi enthousiaste à l'idée de décorer le sapin.
Dans ma famille, c'était aussi une tradition quand j'étais plus jeune. Même lorsque j'avais quitté le nid, mes parents attendaient toujours qu'on se réunissent pour le décorer avec ma sœur. Puis j'avais eu de moins en moins de temps pour venir les retrouver à cause de mon travail. Et j'avoue que j'avais fait de moins en moins d'effort pour trouver le temps aussi.
Eva me l'avait souvent reproché. Elle disait que je n'étais qu'un égoïste et que mon comportement faisait beaucoup souffrir nos parents. Mais ces derniers ne l'auraient jamais admis. Ils préféraient faire comme si ça ne les atteignait pas et dire qu'ils comprenaient.
Parfois, il m'arrivait de vouloir retourner en arrière et changer tout ça. Malheureusement, on ne pouvait pas changer le passé.
-Monsieur Wells ?
Je revins à la réalité. Ma colocataire me regardait d'un air interrogateur.
-Est-ce que tout va bien ? me demanda-t-elle. Vous aviez l'air ailleurs.
-Veuillez m'excuser. J'étais perdu dans mes pensées.
-Elles ne semblaient pas très joyeuses.
Pas vraiment, eue-je envie de lui répondre. Mais je me contentai de lui offrir un sourire forcé pour qu'elle ne cherche pas à poser plus de questions. Si elle garda le silence, son regard disait clairement qu'elle n'était pas dupe.
-Ok, tout le monde ! s'éleva la voix de Marshall. Si tous les groupes sont formés, on va pouvoir passer au tirage au sort. Je demanderai à l'un des membres de chaque équipe de venir piocher un bout de papier et d'annoncer son thème au reste de l'assemblée.
Les gens se succédèrent auprès de lui et d'Eva pour tirer leur thème de décoration au sort. Visiblement, ma sœur et mon beau-frère avaient eu de la suite dans les idées : Noël traditionnel, Noël blanc, Noël gourmand, Noël tout en couleur...
Ce fut bientôt à notre tour. Je laissai ma voisine aller piocher un papier. Elle mélangea un peu ceux qui restaient dans la coupelle avant d'en attraper un.
-Noël nature, annonça-t-elle fièrement.
Puis elle revint vers moi, l'air tout excité.
-On dirait que vous appréciez le thème, lui dis-je.
-Oh que oui. J'ai déjà plein d'idées pour décorer notre sapin.
-Vous n'avez même pas vu les décorations qu'il y avait.
-Et alors ? Je peux toujours laisser libre-court à mon imagination. Ne vous en faites pas, je suis sûr qu'on aura tout ce dont on a besoin.
-Je vous crois sur parole. Et puisque vous semblez si enthousiaste, pourquoi ne prendriez-vous pas la tête des opérations ?
-Parce que vous avez vraiment cru qu'il en serait autrement ?
Ce fut plus fort que moi, je me mis à rire.
Certes, je trouvais un peu ridicule qu'elle mette autant de passion dans la décoration d'un pauvre sapin, mais je devais bien admettre que son excitation avait quelque-chose d'amusant. Je dirais même qu'elle était presque contagieuse. Peut-être que je ne subirai pas cette soirée comme je le pensais et que je prendrais du plaisir à être là.
3 commentaires
Andrée Martin
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Il y a 3 ans
Erine Kova
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Il y a 3 ans
Gottesmann Pascal
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Il y a 4 ans