Fyctia
Chapitre 9 : POV Adam
Quand je me réveille le lendemain matin, mon dos me fait un mal de chien. Chaque muscle me rappelle cruellement la soirée d’hier, passée à batailler contre la neige et le vent pour réparer ces fichues clôtures. Je me lève, groggy, la tête en vrac. Sérieusement, rappelez-moi pourquoi j’ai accepté de faire ça ? Ce ranch n’a rien à voir avec moi. Ce n’est pas mon monde, et encore moins ma place.
Je me traîne jusqu’à la fenêtre. La neige a recouvert la cour, transformant le paysage en une étendue blanche immaculée. Les enclos que nous avons réparés tiennent encore debout, à ma grande surprise. J’ai du mal à croire que j’ai participé à ça. Moi, Adam Castle, engoncé dans une veste de designer, les mains couvertes de boue et de neige fondue. Ridicule. Et pourtant...
Je secoue la tête pour chasser cette idée. Ce n’est pas moi. Ça ne peut pas être moi.
En descendant les escaliers, l’odeur du café chaud me frappe. Je trouve Isabelle dans la cuisine, déjà en pleine forme, un bol de café fumant à la main. Ses cheveux sont attachés en une tresse négligée, et elle porte un vieux pull trop grand. Un tableau simple, mais... Je détourne le regard, agacé par mes propres pensées.
— Vous êtes toujours aussi matinale ? je grogne en m’asseyant lourdement sur une chaise, massant mon épaule douloureuse.
Elle me lance un regard en coin, amusée.
— Certains d’entre nous n’ont pas le luxe de dormir jusqu’à midi, Castle.
Je lève les yeux au ciel, mais une part de moi admire sa détermination. Elle a passé la même soirée que moi dehors, affrontant le froid glacial, et pourtant, elle est là, infatigable. Ça m’énerve presque.
— Vous devriez engager quelqu’un pour faire ce travail à votre place, je lâche en haussant les épaules. Ces enclos, ces rennes... tout ça, c’est...
Je m’arrête net. Elle me fixe, son regard devenant plus dur.
— C’est quoi ? dit-elle doucement, mais sa voix est chargée d’une tension que je ne comprends pas tout à fait. Inutile ?
Je soupire. Je n’ai pas envie de me lancer dans une dispute dès le matin, surtout pas avec elle. Mais avant que je puisse répondre, elle repose son bol et s’approche, plantant ses yeux dans les miens.
— Vous n’avez jamais rien construit de vos mains, n’est-ce pas ? murmure-t-elle, presque avec douceur. Tout vous a toujours été donné sur un plateau.
Je sens une pointe de colère monter en moi, mais je la ravale. Parce qu’elle a raison. Et ça me dérange plus que je ne veux l’admettre.
— Et vous, vous vous attachez à des clôtures et à des rennes comme si votre vie en dépendait, je rétorque, cherchant à reprendre le contrôle.
Elle sourit, mais il y a quelque chose de triste dans son regard.
— Peut-être parce que ça me rappelle que la vie a un sens, même dans les petites choses. Vous devriez essayer.
Un silence s’installe entre nous. Je détourne les yeux, mal à l’aise. Je n’aime pas la façon dont elle me perce à jour. Mais je ne peux m’empêcher d’être... impressionné. Cette fille est un mystère. Et pour la première fois depuis longtemps, je me surprends à vouloir le résoudre.
— Qu’est-ce que vous avez prévu de me faire faire aujourd’hui ? demandé-je, cherchant à rompre le silence qui commence à peser dans la pièce.
Isabelle boit la dernière gorgée de son café, un sourire énigmatique flottant sur ses lèvres. Elle me tourne le dos, posant la tasse dans l’évier.
— Rien d’important, répond-elle d’un ton léger. Je dois passer voir un ami ce matin. Profitez-en pour vous reposer.
Je serre les mâchoires, devinant facilement la moquerie dans sa voix. Elle me prend pour un incapable. Hier soir, c’était la première fois que je touchais une pelle et ça se voyait. Elle a dû bien rire en silence.
Quand elle quitte la pièce, je reste seul, l’égo froissé. Mon regard tombe sur une étagère contre le mur. Des cadres y sont alignés, certains recouverts d’une fine couche de poussière. Curieux, je me lève et m’approche.
La première photo attire immédiatement mon attention. Isabelle, beaucoup plus jeune, sourit aux côtés d’un homme et d’une femme. Ses parents, sans aucun doute. Leurs traits sont doux, leurs yeux brillent de cette lueur que seuls ceux qui aiment profondément la vie possèdent. Elle leur ressemble. Cette détermination farouche, ce feu intérieur… c’est d’eux qu’elle le tient.
Sur une autre photo, Isabelle est à cheval, les cheveux au vent, le visage illuminé d’un bonheur que je ne lui ai pas encore vu ici. Le ranch s’étend en arrière-plan, fier et imposant. C’est plus qu’une simple ferme pour elle. C’est une partie d’elle-même.
Je continue d’explorer du regard, jusqu’à ce que je tombe sur un journal ouvert sur une table basse. Quelques coupures de presse sont glissées entre les pages. J’en sors une, intrigué. Un titre me frappe en plein cœur : “Accident tragique : les propriétaires du ranch des Aurores emportés par une tempête.” Une date, il y a trois ans.
1 commentaire
Emma Hermosa
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Il y a 13 jours