Marie-Léa Artus Un renne pour Noël Chapitre 8 : POV Isabelle

Chapitre 8 : POV Isabelle

Adam se redresse, un peu contrarié, époussetant sa chemise d’un geste distrait.


— Je ne suis juste… Pas très à l’aise avec tout ça. Je pensais qu’il suffisait de donner un coup de fourche et que le travail était fait. Mais ça ne semble pas aussi simple, dit-il avec un soupir.


Je laisse échapper un petit rire, non moqueur mais plutôt amusé par sa tentative d'optimiser le travail. Il me regarde, se retenant visiblement de répliquer, son regard un peu plus agacé mais toujours curieux.


— Pire que sorcière, hein ? Vous croyez vraiment que je peux faire des miracles pour vous, Adam ? Je hausse un sourcil en le défiant.


Il lève les mains en signe de reddition. Il semble qu'il n'est plus très sûr de comment réagir à ma répartie. Mais au fond, je sais qu'il n'abandonnera pas aussi facilement.


— Bon, d’accord. Montrez-moi comment on fait, rétorque-t-il avec un sourire presque contrit.


Je secoue la tête et m'approche de lui, me débarrassant de la fourche qu’il tient maladroitement.


— C’est pas compliqué, juste un peu de pratique et de technique. Vous êtes prêt à souffrir un peu ?


Il fronce les sourcils, visiblement prêt à relever le défi.


— Prêt à tout, tant que je ne dois pas m’occuper de... ça toute la journée.


Je le regarde un instant, cet homme qui semble à la fois hors de sa zone de confort et déterminé. Peut-être qu'il a un peu plus de ressources que je ne pensais. Mais ça, je vais devoir le tester.


Adam lutte contre la neige qui s’intensifie à chaque minute. Sa veste de costume est trempée, ses cheveux sont plaqués contre son front par la pluie glacée qui se transforme peu à peu en neige. Il est visiblement agacé, et je le vois de plus en plus frustré, son masque de froideur fissuré par l’incapacité de maîtriser les tâches simples auxquelles il est confronté. Il est plus habitué à des réunions soignées, à des décisions stratégiques, qu'à des enclos de chevaux et des outils rouillés. Mais aujourd'hui, il est ici, trempé et complètement hors de son élément.


Je ne peux m'empêcher de l’observer discrètement, la neige tombant doucement autour de moi. Dans sa frustration, il semble presque… humain. Ses gestes se font plus brusques, son visage durci par la gêne et l’impatience. Et pourtant, il y a quelque chose d’étrangement vulnérable dans la façon dont il essaie de rester digne, de ne pas admettre qu’il a besoin d’aide.


Je m'approche silencieusement, les bottes enfoncées dans la neige qui s’amoncelle. Adam tente d’attacher un fil de fer autour d’une barrière, mais ses mains tremblent, visiblement agitées par l’énervement et le froid. Il échoue une fois, puis une deuxième. Il souffle de frustration, mais je perçois un léger soupir, une sorte de perte d’espoir dissimulée sous sa rigidité habituelle.


— Vous avez du mal avec ça ? je lance avec un sourire en coin, un peu plus douce cette fois, comme une invitation à déposer la façade.


Il relève les yeux, fixant mes bras croisés, l’expression glaciale toujours présente. Mais je perçois un éclat de... fatigue. Peut-être même un peu de honte.


— Je vous ai dit que je n’étais pas fait pour ça, Isabelle, dit-il, sa voix moins dure que d’habitude, plus sincère, presque désarmée.


Je reste un instant silencieuse, avant de soupirer à mon tour. La tempête s'intensifie, les rafales de neige se déchaînant autour de nous. Il faut finir ce travail avant que tout ne soit emporté par le vent glacial.


— Allez, je vais vous aider, mais vous allez devoir me suivre cette fois. On va sécuriser les enclos avant qu’on n’ait plus aucune visibilité.


Je prends les devants, ne lui laissant pas le temps de protester.


Adam semble hésiter un instant, mais sans un mot, il se relève et me suit alors que je m’élance dans la tempête. Les rafales fouettent nos visages, mais je ne ralentis pas. Je sais qu’il est derrière moi, toujours aussi indécis, mais j’entends le bruit de ses pas derrière moi, moins lourds qu’auparavant. Ce n’est pas de l’agacement cette fois. C’est presque... de la détermination.


Quand nous arrivons aux enclos, je me tourne vers lui, sans vraiment regarder son visage. Le vent souffle tellement fort que je dois élever la voix pour me faire entendre.


— Tenez ça comme ça, je lui tend un câble. Et tournez-le comme je vous ai montré, surtout ne lâchez pas tout en même temps.


Il obéit sans répondre, mais je vois qu’il est concentré, plus que tout à l’heure. Nous travaillons ensemble, en silence, chacun à sa place, se débattant contre la neige et le vent. J’observe ses gestes plus attentivement maintenant. Il ne fait pas tout à fait comme il faudrait, mais il n'abandonne pas, et c'est tout ce qui compte.


Après un moment, il me jette un regard furtif.


— Je ne pensais pas que... je m’en sortirais, admet-il, son ton plus léger. Mais je crois que je commence à comprendre.


Je souris intérieurement, une chaleur douce envahissant mes entrailles malgré le froid. Sans le vouloir, je me sens un peu fière de lui.


— C’est pas mal. Peut-être qu’il y a une lueur d’espoir pour vous après tout, Castle.


Il arque un sourcil, un demi-sourire se dessinant sur ses lèvres malgré la neige qui continue de s’abattre sur nous. Un silence s’installe, mais il est différent. Plus apaisé.


Le vent continue de hurler autour de nous, mais à cet instant précis, il semble que la tempête, tout comme l’atmosphère entre nous, ait pris un tournant. Nous avons réussi à nous comprendre sans mots. C’était tout ce dont nous avions besoin.

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