Fyctia
Chapitre 7 - Alma
Michael Bublé - It's Beginning To Look A Lot Like Christmas
Nous déambulons dans les rues de Londres, comme c'est le week-end, il y a beaucoup de monde. Oxford Street scintille d’illuminations féériques, et les immenses vitrines des magasins débordent de sapins enneigés, de guirlandes éclatantes et de décors miniatures où de parfaites familles en laine s’agitent dans des scènes de Noël figées. L’air est vif, chargé d’humidité, et chaque respiration laisse derrière elle un nuage de buée.
Je resserre les pans de mon manteau en croisant les bras, mais le froid s’infiltre quand même, mordant la peau exposée de mes mains. Jun marche à côté de moi, son pas décontracté contrastant avec l’agitation autour. On est presque collés l’un à l’autre, et pourtant, je garde cette infime distance, comme une barrière invisible que je m’efforce de ne pas briser.
Une bourrasque glaciale soulève mon écharpe, et je frissonne malgré moi. Jun lève un sourcil, amusé.
— Tu veux entrer quelque part ? demande-t-il d’un ton nonchalant, mais je capte cette pointe d’attention dans sa voix.
À quelques mètres de nous, un petit stand diffuse une odeur réconfortante de marrons grillés. Le marchand, emmitouflé dans une grosse doudoune, tend des cornets de papier fumants à des passants ravis.
Un bus rouge à impériale passe lentement devant nous, bondé de silhouettes emmitouflées derrière les vitres embuées.
— Cette bijouterie a l'air pas mal, non ? dit Jun en désignant une boutique aux vitrines éclairées d'un halo doré.
Je lève les yeux vers la devanture. L'intérieur, tout de marbre et de dorures, me donne l'impression qu'on devrait être millionnaires pour y entrer.
— Jun, on devrait peut-être choisir une bijouterie un peu moins chère ? Tu sais, si c'est pour un mensonge, enfin, on va pas garder les bagues, alors...
Il s'arrête et me lance un regard exaspéré.
— Alma, justement, un mensonge se doit d'être crédible. Donc non, je ne vais pas t'acheter une bague bon marché. Fais-moi confiance. Pour le prix, je gère.
— Oui mais par gérer, tu gères avec ta carte ou avec un prêt bancaire ?
Il rigole doucement, secoue la tête, et pousse la porte de la bijouterie.
Je n'ai pas le temps de protester qu'on est déjà à l'intérieur. Une dame élégante, avec un rouge à lèvres rouge vif parfaitement appliqué, nous accueille avec un sourire chaleureux.
— Bonjour, messieurs-dames ! Comment puis-je vous aider ?
Jun répond avant que j'aie le temps de dire quoi que ce soit.
— Bonjour. Nous cherchons deux bagues. Une pour elle et une pour moi.
Je le fixe, bouche bée. Sa confiance est presque déconcertante.
— Très bien. Nous allons commencer avec madame. Quel est votre préférence ? Rond ? Carré ? Ovale ?
Je cligne des yeux, prise au dépourvu.
— Euh... je sais pas trop, dis-je en riant nerveusement.
— Montrez-moi votre main, dit-elle avec douceur.
Je tends ma main hésitante, qu'elle attrape pour l'examiner.
— Le rond pourrait bien vous aller. Essayons quelques modèles, et vous me direz ce que vous préférez.
Elle ouvre une vitrine et sort trois bagues, chacune délicatement posée sur un petit coussin de velours. Je commence à les essayer une par une, et Jun, silencieux, m'observe du coin de l'œil, les bras croisés.
Quand je mets la dernière bague, je ressens un petit quelque chose, comme un coup de cœur. Elle est simple, en or blanc, avec une pierre ronde légèrement décalée et un sertissage fin qui brille délicatement sous la lumière.
— Celle-là, je la trouve très belle, dis-je doucement, presque à moi-même.
Jun s'approche, son regard fixé sur ma main.
— Elle te va vraiment bien, Alma.
Sa voix est calme, presque tendre, il lève les yeux vers moi, et son regard a une intensité qui me désarme complètement. Mon cœur s'emballe pas parce que c'est romantique ou quoi, mais parce que c'est étrange. Alors, instinctivement, je détourne la tête, comme si son regard pouvait m'atteindre physiquement.
— Merci, murmuré-je en me raclant la gorge.
Quand je jette un coup d'œil à la vendeuse, elle nous observe avec un sourire aux lèvres, l'air attendri, ses yeux pétillants. Elle doit nous prendre pour un vrai couple. Si elle savait.
Jun, lui, reste stoïque, mais un sourire en coin trahit qu'il a remarqué la même chose.
— Et pour vous, monsieur ? demande la vendeuse, un peu trop enthousiaste.
— Quelque chose qui ira bien avec la sienne, répond-il sans hésiter.
Je croise les bras et lève les yeux au ciel.
— Eh bien, tant qu'à faire, on devrait peut-être assortir nos chaussettes aussi, non ?
Il éclate de rire.
— Bonne idée, on ira faire ça juste après.
Je secoue la tête, amusée.
La vendeuse, toujours rayonnante, se tourne vers lui.
— Vous avez dit vouloir quelque chose qui s'accorde avec la bague de madame je peux vous trouver ça, propose-t-elle avec un sourire malicieux.
La vendeuse sort plusieurs bagues pour hommes, les disposant sur un coussin de velours noir. Une en particulier retient son attention : large, en argent brossé, avec une finition sobre qui complète parfaitement la délicatesse de ma bague.
— Je pense que celle-ci irait très bien avec celle que vous avez choisie, dit-elle en me montrant les deux ensemble.
Jun la passe à son doigt, et je ne peux m'empêcher de le fixer. Ça lui va incroyablement bien, comme si elle avait été faite pour lui.
— Pas mal, dis-je, essayant de paraître détachée.
Il lève la main, la tourne sous la lumière, et me regarde.
— Tu penses que ça fait assez, tu sais, masculin ?
Je hoche la tête, une lueur de malice dans les yeux.
— Oh oui, parfaitement. Très viril. Tu pourrais presque couper des arbres avec, si tu veux.
Il éclate de rire, un vrai rire.
— Toujours un plaisir de savoir que tu me prends au sérieux, Alma.
La vendeuse, amusée par nos échanges, emballe les bagues. C'est à ce moment que je décide de détourner le regard. Parce que, franchement, si je vois le prix s'afficher sur le terminal, il y a de fortes chances que je m'évanouisse sur place.
— Vous êtes un très beau couple, dit la vendeuse en tendant le sac à Jun.
Je me fige, un sourire crispé aux lèvres.
— Oh, on n'est pas...
— Merci ! répond Jun, coupant ma phrase avec un sourire éclatant.
Il prend le sac, et avant que je puisse protester, il me pousse gentiment vers la sortie.
— T'étais obligé de dire merci ? dis-je une fois dehors.
— Qu'est-ce que tu voulais que je dise ? "Non, non, vous vous trompez, ce n'est qu'une arnaque bien ficelée" ?
— Ça aurait été honnête, au moins !
Il rit de nouveau, secouant la tête.
— Parfois, l'honnêteté est surestimée. Allez, viens, madame ma fiancée.
Je lui donne un petit coup sur l'épaule, mais je ne peux m'empêcher de sourire. Je sens déjà la chaleur de mes joues et pas à cause du froid londonien.
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Gwen.David
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Sarael
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C.J_Robin
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lovelover
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