Beryl L Un noël surprise au pays des crocodiles Chapitre 2

Chapitre 2

Mon père dirige un grand fond immobilier. Son entreprise vend et achète de grands complexes, pour la plupart hôteliers. Je n’y ai jamais compris grand chose et malheureusement cela ne s’est guère amélioré depuis que j’ai mis véritablement mes escarpins dans l’entreprise en octobre de l’année dernière. C’est un travail sans grand intérêt je dois dire. Je suis en mode pilote automatique. Je suis l’assistante de l’assistante d’un type qui travaille pour papa et qui s’appelle René. Il est Québécois et parle anglais avec un horrible accent. Moi je suis l’assistante de Gina qui elle même est sous les ordres de René qui lui même est sous les ordres de mon père. Vous voyez ? En gros je suis esclave de mon père par paumé interposé. Je dis paumé parce que René a l’air d’un paumé, un peu bégayant et dégarni, mais je crois qu’il fait du bon travail malgré les insultes que Gina crache parfois dans sa barbe. Gina a tout sauf une barbe bien sûr, elle est hyper bien sapée, toujours à la dernière mode et ça se voit qu’elle aspire à mieux dans sa vie que d’être sous les ordres de ce quarantenaire sans ambition capillaire. Moi ça me va, je n’ai aucune ambition de vie non plus, si ce n’est de trouver un prince charmant 2.0. Janice me dirait que je suis super contente dès que j’ai un follower supplémentaire et qu’au fond je rêverais d’être influenceuse de mode et faire carrière à l’internationale, mais elle se trompe complètement. Faire des cafés et confirmer des rendez-vous me convient tout à fait, enfin pour le moment.

Mon père me voyait déjà à Harvard ou à Colombia et il a été déçu lorsqu’il a compris que je n’avais même pas essayé d’y entrer. En même temps, avec mes notes, je ne vois pas à quel moment il aurait pu avoir de l’espoir. Pour moi, envoyer ma lettre aurait été comme d’envoyer la postulation de René à un concours de beauté. J’ai une certaine dignité tout de même. Plutôt que d’aller dans une prestigieuse université je suis seulement allée dans un banal college. Papa aurait dû être content, je restais à la maison, dans notre penthouse trop vaste pour nous deux. Cela lui faisait une présence et surtout des économies qu’il a décidé de placer sur mon compte épargne. Peut-être aurait-il préféré ne plus m’avoir dans les pattes afin de refaire sa vie ? De toute manière il était moins souvent à la maison que le réparateur du wi-fi, c’est dire. Au lycée ne n’avais aucune amie, mais au college je me suis entourée d’un super cercle de filles dans le vent comme Vera et Janice. Je me suis créé un compte public sur les réseaux sociaux et j’ai commencé à faire la fête avec mes nouvelles amies. Entre les pyjamas parties chez moi et les soirées endiablées dans les boîtes de nuit de Manhattan ou de Brooklyn, je n’avais pas non plus le temps pour les soirées en tête à tête avec mon père et en un claquement de cil, je passais de le cape de la vingtaine.

Je remonte la 5ème avenue au petit trot. C’est là que se situent les bureaux, tout près de Central Park. En arrivant au vingt-deuxième étage, je dépose mes achats sous mon minuscule espace de travail. Je suis l’heureuse « propriétaire » d’un minuscule coin à moi dans l’open space, à proximité du semi-minuscule espace qu’occupe Gina, en face du bureau vitré de René. Je suis en retard, j’avais pris ma matinée dans l’urgence puisque notre avion, à Vera et moi, part demain soir, et je m’attends à subir les foudres de Gina, mais notre zone est vide, pas de Gina ni de René à l’horizon. A la place de la pile de dossiers à traiter dans l’ehure auquel je m’attends, un post-il géant de couleur rose m’attend sur mon bureau, là où il reste de la place entre les piles de documents et les tasses vides. Je n’ai jamais aimé ranger, j’avais Dolores pour le faire à ma place depuis que je sais marcher et éparpiller mes affaires. Sur le post-il est écrit : URGENT. BUREAU DU BOSS.

Papa ? Qu’est-ce qu’il me veut encore ? Je ne traite pas avec lui au travail et pour le reste, il a mon numéro de portable, il sait que j’y suis pendue H-24.


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18

18 commentaires

Justine_De_Beaussier

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Il y a 7 jours

Paige a l’air perdue. Comme quoi les privilèges ne font pas tout… N’hésite pas à sauter une ligne entre les paragraphes pour aérer ton texte 😉

Beryl L

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Il y a 7 jours

Oui merci. Je le fais maintenant mais c’est à cause des 7000 qui collaient tout juste à mon découpage …. Frustrant !

Justine_De_Beaussier

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Il y a 7 jours

Je compatis…

mima77

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Il y a 8 jours

Paige est assez drôle, et en même temps j ai de la peine pour elle. Pas simple les relations familiales.

Beryl L

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Il y a 8 jours

Oui! La famille finalement c’est souvent le plus compliqué dans les histoires (et la vraie vie)

TomAllavenaBooks

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Il y a 10 jours

Encore un chouette moment de lecture avec ce deuxième chapitre ! J’aime beaucoup le ton plein d’autodérision du personnage, c’est vraiment fun à lire. Les descriptions du travail et des collègues sont très imagées. Et puis, malgré le ton léger, on sent quand même un petit fond plus profond, une forme de solitude ou de décalage dans sa vie, ce qui rend le personnage attachant. Bravo, hâte de découvrir la suite !

Beryl L

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Il y a 10 jours

Merci, je vais essayer de creuser cette aspect solitude et décalage par la suite !

Emmy Jolly

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Il y a 15 jours

Paige est une nana qui a l'air de vivre à cent à l'heure...

Candace Lovely

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Il y a 19 jours

Ah okay en Suisse ! Oui, on utilise postuler en tant que verbe. "Je vais postuler chez Mcdo". Mais pas postulation. Ce terme est employé plus dans un contexte juridique. Dans ton contexte, on dira candidature.
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