Alconstance Un Noël (beaucoup trop) proche de toi ! 1- Victoria (1/2)

1- Victoria (1/2)

La robe rouge repose sur mon lit, inoffensive en apparence. Pourtant, elle me fixe, me défie. Je devrais être excitée à l'idée de cette soirée, mais mon estomac se noue. Quelque chose cloche, et je ne parviens pas à mettre le doigt dessus.


Henry est un patron adorable, exubérant et surtout, complètement fou. Son entreprise prend de l’ampleur grâce à ses idées innovantes, mais pas seulement. Sa capacité à mettre les gens à l’aise l’aide à se forger une vraie réputation. Il s’agit là de gloire, et je suis fière d’en faire partie.


Henry prépare quelque chose. Je le sens. Une annonce, une surprise… et je déteste les surprises.

Je ne suis pas comme ça, loin de là. Je suis distante, assez froide avec les personnes que je ne connais pas, et j’aime que tout soit bien rangé. Que tout soit en ordre. Il n’y a pas de place pour l’imprévu dans ma vie. Pourtant, ce soir, lors de cette soirée, je sais que l’imprévu va montrer le bout de son sale petit nez. Je suis censée agir comme une personne normale, mais tant que je ne saurai pas ce qui m’attend, je vais stresser. Et le stress me rend encore plus froide. C’est le serpent qui se mord la queue.


Je ne peux plus faire marche arrière. J’attrape cette maudite robe qui, soit dit en passant, est magnifique, et l’enfile. Elle me va comme une seconde peau. C’est la première fois que je la mets. Amy – ma meilleure amie et, accessoirement, la traîtresse de secrétaire d’Henry qui refuse de me dire ce qu’il manigance – m’a accompagnée et m’a aidée à la choisir. Non pas que j’aie besoin d’une aide particulière pour des événements mondains, mais quand même.


Un rapide coup d'œil dans le miroir accroché à mon mur pour une vérification de la coiffure et du maquillage, et je dois y aller. Le retard, ce n’est pas pour moi. Le retard n’est qu’un prétexte pour les gens de paraître cool alors qu’en réalité, cela montre simplement qu’ils n’ont que peu d’égard pour leur hôte. Et jamais je ne ferais ça à Henry.


Mon taxi m’attend en bas de l’immeuble. Il fait déjà nuit alors qu’il est à peine dix-huit heures. Les joies du mois de novembre. Il fait un peu frais, notamment avec cette robe bustier en mousseline, mais je suis prévoyante. Un fin gilet accompagne cette tenue. Lorsque j’approche du taxi, celui-ci me déshabille des yeux. J’ai une furieuse envie de lui enfoncer mes doigts dans les orbites. Ce serait une mauvaise idée, n’est-ce pas ? Oui, sans aucun doute. J’affiche mon plus grand sourire lorsqu’il m’ouvre la portière tel un gentleman, et je m’engouffre dans l’habitacle. Quelques instants plus tard, c’est à son tour de s’installer derrière son volant.


— Et je vous dépose où, très chère ? chante-t-il d’une voix doucereuse qui me fait frissonner de dégoût.


— Au Grand Salon, hôtel particulier à Montmartre !


Je l’entends siffler avant de démarrer. Je n’ai pas particulièrement envie de parler. J’ai plutôt besoin de me mettre dans ma bulle, de me préparer à affronter toute l’entreprise qui est invitée. À voir des personnes que je ne connais pas ou que je connais trop bien. Mis à part Rémi et Amy, mes deux meilleurs amis, je n’ai envie de voir personne d’autre. Oui, bon, sans compter Henry et sa femme Monique, bien sûr.


Le chauffeur roule plutôt correctement. Je ne prends plus de VTC, pas après cette terrible nuit de janvier dernier où le chauffeur, trop ivre, a grillé un feu rouge dans les rues de Paris, m’envoyant directement aux urgences. Aujourd’hui, je fais très attention, et les taxis ont une vraie formation. Enfin, j’essaie de m’en convaincre moi-même.


Paris m’épuise. Trop de bruit, trop de monde, trop de stress. Je rêve du Sud et de son soleil, mais pour l’instant, je suis coincée ici.


— Vous allez à une soirée ? demande mon chauffeur en constatant que je n’engage pas la conversation.


Qu’est-ce qui t’a mis la puce à l’oreille ?


Je prends une grande inspiration. Ne commence pas à être désagréable avant même que la soirée ne commence ! m’ordonne ma conscience.


— En effet. Un repas de boulot.


Je retourne à mes pensées, regardant les Parisiens marcher dans les rues sombres, admirant les lumières de cette ville qui porte de moins en moins bien son surnom de Ville Lumière. Et surtout, je contemple les quelques arbres qui perdent leurs feuilles, presque nus. L’éternel recommencement. Passer par l’hiver pour retrouver un été heureux et prospère. Une sacrée idéologie, quand on y pense. Il ne peut y avoir d’été sans que l’hiver soit passé. Comme il ne peut y avoir de lumière sans obscurité. Pas de bien sans le mal. Les pensées philosophiques dans toute leur splendeur.


Le trajet s’éternise. Les embouteillages de fin de journée règnent en maîtres absolus. Et si je finissais à pied ? Irais-je plus vite ? Je regarde mes escarpins et ma tenue, et la réponse devient évidente : absolument pas. Non seulement je mettrais des heures, mais en plus, je risquerais de me faire agresser. Je souffle une nouvelle fois, essayant de calmer mes nerfs déjà à vif. Je dois prendre mon mal en patience.


Nous finissons par arriver devant cet hôtel particulier. Je m’égare quelques instants dans la contemplation du lieu. Henry sait les choisir lorsqu’il a une annonce importante à faire.

Le chauffeur de taxi vient m’ouvrir la porte et me tend une grande main. Il s’attend sûrement à ce que je l’accepte, mais j’ai besoin de mes deux mains pour sortir du véhicule sans marcher sur ma robe. Il semble déçu, mais je m’en moque. Ma carte bleue a déjà été utilisée pour le payer, je ne lui dois rien de plus.


Je m’avance jusqu’à l’entrée, où un homme en costume me regarde arriver. Un homme grand et bien bâti. Absolument mon genre. Il me fixe sans jamais me regarder. C’est fascinant, un portier, quand même.


— Votre nom ? prononce-t-il d’une voix grave qui fait vibrer mon âme.


J’en ferais bien mon quatre-heures si je n’étais pas aussi absorbée par cette soirée.


— Victoria Campos.


Un petit vent s’engouffre sous ma robe tandis qu’il cherche mon nom sur la liste des invités. Puis, il me fait signe de passer et me souhaite une bonne soirée. Facile, quand la seule chose qu’on a à faire, c’est vérifier les identités des autres. Je lève les yeux au ciel. Je deviens méchante, mais heureusement, ce n’est qu’une conversation entre moi et moi.



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8 commentaires

Krissa Danos

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Il y a un mois

Victoria a du pep's, un caractère bien trempé, une personnalité bien marquée. On ne va pas s'ennuyer avec elle ! J'aime le dynamisme de ce premier chapitre. Le trajet pour se rendre à la soirée est saupoudré de ses pensées et de ce qu'elle ressent. Et ça, c'est cool! On en apprend directement sur elle et tout en finesse en plus ! Bravo à toi !

NICOLAS

-

Il y a un mois

💕🫶😍
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