Fyctia
Chapitre 7-3
Je souris en réponse de son rire. Elle n’a pas tort, mais par ma faute, elle vient — encore — de faire des heures supplémentaires. Ce qui m’embête, ce n’est pas de la payer plus, comme ça aurait pu l’être chez… je sais qui, mais bien qu’elle pense à tout le monde ici, mais pas à elle. Elle a toujours été aux petits soins de tout le monde ici : « Roger, tu vas bien aujourd’hui ? Comment va ta femme ? Elle est sortie de l’hôpital ? » ou encore « Mélanie ? Tu es encore là ? Tu ne devrais pas rentrer t’occuper de tes enfants ? », elle s’est également arrangée pour que Mélanie puisse avoir les semaines de vacances qu’elle voulait pour passer un maximum de temps avec sa mère malade dans le Nord. Elle est aussi déjà allée jusqu’à aller à la pharmacie pendant sa pause pour proposer un sirop pour la toux d’Antoine, l’hiver dernier. C’est un ange et elle est aimée de tous, pas de surprise après tout ce qu’elle fait pour les autres.
Je range tous les documents qui traînent sur le bureau, éteins mon ordinateur, récupère mes affaires et sors avec Sylvia de ma pièce de travail. On passe par le secrétariat pour que Sylvia récupère son sac à main. À cette heure, il n’y a plus personne. Les couloirs sont déjà sombres, tous les ordinateurs affichent un écran noir, les chaises à roulette n’ont plus de veste, le coin de pause est vide, sans parole, sans café qui coule et le pire, ce doit bien être lorsque l’on arrive au rez-de-chaussée, sortant de l’ascenseur : plus de secrétaires d’accueil, plus de pas dans le hall, plus rien. Ce bâtiment devient vide et sans âme lorsque chaque salarié est rentré chez lui pour se reposer et prendre du bon temps. Roger est auprès de sa femme et doit sûrement lui cuisiner une bonne ratatouille comme elle l’aime, Mélanie doit être en train d’aider son fils, entré en quatrième, à faire ses devoirs de sciences, Natacha est sûrement devant une télé-réalité avec un masque aux plantes sur le visage et pour toute mon équipe, le quotidien du « après-boulot » se met en route lorsque chacun rentre dans son espace intime.
En y repensant, beaucoup en rentrant ont quelque chose à faire, comme s’occuper de ses enfants, préparer à manger pour son partenaire, se préparer pour la fête d’anniversaire de la meilleure amie ou pour aller à un rencard. Moi, je n’ai rien à faire de tout ça, si ce n’est que de continuer à travailler. Ai-je vraiment une vie de merde ? C’est bien beau de réussir sa carrière en lançant son entreprise, mais si tu te retrouves seul, est-ce que ça vaut vraiment le coup ?
Je balaye cette idée de ma tête, évidemment que ça vaut le coup ! De toute façon, je n’ai besoin de personne dans ma vie pour être heureuse. Faire des rencontres, c’est peu pour moi. Une vie à deux n’apporte rien… du moins que de la souffrance. Allez Olivia ! Concentre-toi donc sur ta soirée avec Sylvia ! Ça fait tellement longtemps que nous nous sommes pas retrouvées comme deux amies le feraient que je ne peux pas continuer à remuer le passé dans mon crâne alors qu’elle se trouve à mes côtés.
Nous sortons de Beautiful Ladies Entreprise et nous décidons de marcher jusqu’à notre bar pour discuter plutôt que de payer un Uber. Fort heureusement, notre lieu fétiche n’est pas à des kilomètres et nous ne risquerons pas les cloques sous les pieds en marchant avec nos talons. À noter tout de même que même si les talons aiguilles ou les escarpins sont jolis, sexys et j’en passe, en porter relève souvent d’une souffrance indescriptible, même si c’est aussi une question d’habitude et qu’aujourd’hui, il existe une multitude de méthodes pour ne plus avoir aussi mal tout au long de la journée avec une telle paire de chaussures aux pieds. Je doute que — même avec ces méthodes — marcher avec ces chaussures pendant plus de trente minutes sur un trottoir goudronneux aussi déformé soit une partie de plaisir.
— Dis-moi Olivia, tu as conscience que tu n’as jamais entrepris un projet d’une telle ampleur en si peu de temps ? me fait sortir de mes pensées Sylvia.
— Je le sais. Ce n’est pas vraiment mon genre de bâcler le travail, mais comme tu le sais, je n’aurais pas pu supporter pendant des semaines, voire même pendant des mois, de créer ce projet de collaboration avec John Buddy. Il est insupportable et comme tu as pu le constater par toi-même, il a tellement la flemme de faire la moindre des choses, que même quand c’est moi qui m’occupe de tout avec mon équipe, il ose venir en retard au rendez-vous fixé avec une excuse aussi bidon que son amour pour son travail.
— C’est vrai qu’il est un peu lourd, mais on ne peut pas nier qu’il a des recettes qui dépassent la plupart des concurrents de lingeries féminines.
— C’est bien pour ça que je n’ai pas eu le choix de faire ce projet avec lui. Je sais que j’ai trop précipité les choses et que ça pourrait nuire à la réputation de Beautiful Ladies si la collection devenait un véritable fiasco sous les projecteurs des critiques des internautes, mais je ne sais pas pour quelles raisons, je suis aussi tendue en ce moment. C’est comme si j’avais eu ce mauvais pressentiment que quelque chose n’allait pas dans les chiffres de l’entreprise.
— Tu es assez réputée dans le milieu pour avoir des timelines très serrées tout en sortant des créativités toujours aussi éblouissantes et surtout à succès, mais cette fois-ci, en une semaine, tu as fait l’impossible. C’est censé prendre bien plus de temps et toi, tu nous as déniché une collection incroyable. Je vais commencer à croire que tu es une véritable génie de la mode.
— Hahaha !! Tu me fais rire ! Oh que j’en suis loin. Crois-moi que tout le mérite revient à toute l’équipe qui a bossé sur ce projet jusqu’à très tard le soir. Par ailleurs, j’ai déjà vu avec le comptable de la société pour envoyer une prime pour tous ceux qui ont donné de leur âme dans cette collaboration.
— Ils le méritent bien, oui.
— Tu sais que je ne me confie pas souvent, mais ça me rend vraiment anxieuse toute cette histoire de nouveau concurrent sur le marché, de site internet loin d’être à la mode. Surtout que je me rends compte que tout ça est causé par ma simple faute.
— Pourquoi dis-tu ça ?
— C’est mon rôle en tant que PDG d’entreprise de faire en sorte que tout soit pensé et anticipé. Malheureusement, je n’ai pas imaginé une seule seconde qu’il aurait fallu remodeler entièrement le site internet. Le monde de l’ordinateur et de l’informatique n’est pas vraiment ma tasse de thé et ça a visiblement eu ses conséquences négatives sur Beautiful Ladies…
— Arrête donc de te lamenter. Ce n’est absolument pas de ta faute. Tu as toujours su gérer cette entreprise d’une main de fer et d’une organisation sans faille. On va trouver un codeur expérimenté et il va nous arranger ça en deux-trois mouvements ! Alors, pour une fois, passe une bonne soirée, loin de ton boulot et de ta carrière. Je compte bien te refaire tomber dix ans en arrière, où BL était encore une toute petite larve ! Je vais te rappeler comment s’amuser, tu vas voir !
11 commentaires
Josianne
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Il y a 3 ans
Zoé Sonobe (zizogoto)
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Il y a 3 ans
Mira Perry
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Il y a 3 ans
Zoé Sonobe (zizogoto)
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Il y a 3 ans
Sholaine77550
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Il y a 3 ans
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Il y a 3 ans
Zoé Sonobe (zizogoto)
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Il y a 3 ans
LilyLefébure
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Il y a 3 ans
Zoé Sonobe (zizogoto)
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Il y a 3 ans