Fyctia
Chapitre 2 : Tout oublier! (2)
Le réveil sonne, je l’assomme d’un geste de la main. Je rêvais, Leo Per était là, bien sûr, ça ne serait pas un rêve sinon ! Je baille et essuie mes yeux avant de vérifier l’heure. Le 7 digital, bien que légèrement trouble, est bien visible. Pour l’instant, tout va bien, je ne suis pas en retard. Tel un chat, je m’étire. J’adorerais en avoir un comme animal de compagnie, en fait, je crois que j’adorerais être cet animal de compagnie. Je me pelotonne un peu plus sous ma couette. Comme je l’ai déjà dit, je suis à l’heure, tout va… On toque, je sursaute et découvre Amélie dans l’entrebâillement de ma porte :
— Tu ne pars pas travailler ?
— Si, pourquoi ?
— Il est huit heures.
— Comment ça ?
Il y a 5 minutes, c’était 7h, j’ai juste fermé les paupières et…
— Tu t’es rendormie, conclut Amélie pour moi.
— Ce n’est pas vrai !
Je me lève précipitamment et, d’un mouvement rapide du regard, cherche de quoi m’habiller. Mon collant troué qui traîne au sol me saute aux yeux mais ne me sera pas d’une grande utilité. Il me rappelle ma chute et Jules, le casting, brutalement, tout me revient de plein fouet. J’agite la tête comme pour chasser définitivement ces souvenirs, puisque la nuit n’aura pas suffi, et conclus que, de toute façon, je n’ai pas le temps de m’appesantir sur mon sort. D’un geste vif, j’attrape le jean qui pend sur ma chaise et un pull chauve-souris dans mon armoire. Amélie me regarde tourbillonner sans rien dire.
— J’ai pioché dans ton rayon, cas extrême, mais je te rembourserai tout.
— Pas de souci.
Elle marque une pause avant de reprendre :
— Ça va ?
— Oui, pourquoi ?
Ma colocataire me dévisage, le fait que j’essaye d’enfiler ma tête dans une manche n’y est sans doute pas pour rien.
— Hier, ça n’avait pas l’air d’aller, d’après Jared, et comme, ce matin, tu ne te levais pas…
J’apprécie qu’elle se fasse du souci pour moi. Nous ne sommes pas vraiment amies, mais ces six derniers mois nous ont tout de même rapprochées.
— Non, ça va, je t’assure. Je suis juste un peu fatiguée.
— D’acc, je dois filer. Bonne journée et ménage toi.
— Oui, merci.
Ça y est, je suis enfin habillée. Je file dans l’entrée sans prendre de collation. Je n’ai pas le temps. Mes bottes m’attendent mais je leur fais un pied de nez en choisissant mes vieilles baskets. Jared les appelle « les horreurs » mais je m’en moque car, de 1, elles sont confortables et, de 2, il n’est pas là. Mon manteau sur un bras, je claque la porte et dévale les escaliers quatre à quatre. Dehors, l’air frais me réveille totalement. Je me précipite jusqu’à mon arrêt de métro, mets la main dans ma poche et réalise que j’ai oublié mon téléphone. Catastrophe ! Je fais demi-tour, je ne peux pas m’en passer. Alors que le stress me gagne, je prends une profonde inspiration et essaye de relativiser : je suis déjà en retard, un peu plus, un peu moins… Au pas de course et sans tomber – merci mes baskets – je regagne l’appartement. Heureusement, je n’ai pas à chercher bien longtemps mon smartphone. Il m’attend gentiment sur le banc, dans l’entrée. Je m’en empare et retourne jusqu’au métro. Durant les 5 minutes d’attente, j’en profite pour regarder les notifications que j’ai reçues : un mémo vocal, un message sur l’application de rencontre et un appel raté. En voyant le numéro s’afficher, je réalise qu’il s’agit de mon employeur. Mince, j’essaye de le rappeler, à mon tour. C’est Suri, une collègue qui décroche :
— Tout va bien, Camille ?
— Oui, c’est juste une panne de réveil. Je suis désolée, je suis en route.
— D’accord, pas de problème, ça arrive. On s’inquiétait juste, comme tu n’es jamais en retard !
C’est vrai, généralement, c’est moi qui fais l’ouverture. Je raccroche car le métro arrive. Le message de l’application de rencontre s’ouvre de lui-même et je découvre que Jules m’a bannie, radiée de ses contacts… Il ne pouvait décemment pas en être autrement, mais je suis déçue de ne pas avoir pu le faire en premier ! Agacée, je monte dans le véhicule tout en regardant comment désinstaller cette application. Tania a insisté, mais je savais que ce n’était pas une bonne idée. Entre les faux profils, les adeptes des rendez-vous sans lendemain, les mufles,… je vois difficilement comment faire « LA » bonne rencontre. L’image de Suri traverse mon esprit. Elle est l’exception qui confirme la règle.
Soudain, on me bouscule, il y a beaucoup de monde dans la rame alors je lève le nez de mon portable. L’affiche, face à moi, me saute aux yeux et je fais immédiatement le constat suivant : quand tu as décidé d’oublier volontairement quelque chose - pas comme mon téléphone précédemment, à moins que ça ne soit un acte manqué ? - la vie se fait fort de te le rappeler. Dans l’espace dédié aux publicités, est placardé une banderole aux couleurs vivres : Casting exceptionnel à Lyon, partagez l’affiche avec Leo Per. Mon acteur favori tient la pose, accoudé à une lettre de son prénom, dans un blouson en cuir et un jean moulant. Évidemment, il est beau à mourir. Je soupire et me mord la lèvre du bas, tout en repensant à la liste des profils recherchés. Pas de jeune femme célibataire, ils doivent avoir peur des groupies !
1 commentaire
Ana_K_Anderson
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Il y a 2 ans