Fyctia

– Tu n'aurais pas oublié de me raconter quelque chose ? - m'adresse ma mère, complice et bienveillante -

Rien qu'à voir son air malicieux sur son doux visage, je sais d'emblée de quel sujet elle souhaite papoter.

Je commence vraiment à me demander si c'est si flagrant que ça. Apparemment oui puisque ça n'échappe à personne. Ou si, aux deux concernés peut-être.

– De quelle chose ? - réponds-je ingénue -

– Peut-être de la raison de ton sourire qui ne se décolle plus de tes lèvres ? - poursuit-elle en penchant la tête sur le côté -

Dès lors je me rends compte que j'ai bien ce petit sourire niais encore collé au visage.

Foutu visage expressif que j'ai.

Je m'approche doucement d'elle pendant qu'elle termine de badigeonner la dinde et pose mes deux mains sur ses épaules pour lui administrer un doux massage aux trapèzes.

– Tu sais bien que tu peux me faire confiance, je serais muette comme une tombe !

Je continue mon massage sans répondre un mot pendant que je me mets à rire doucement devant sa curiosité.

– C'est vrai qu'il faut avouer que c'est vraiment un bel homme cet Alexander ! Si j'avais ton âge...

– Non, stop maman ! Je ne veux rien savoir ! - lui rétorqué-je en riant en chœur avec elle -

Cette fois-ci je détache ma prise pour venir m'appuyer contre le plan de travail de façon à lui faire face. Tout en triturant nerveusement mes doigts, j'espère trouver des réponses à mes questions.

– Tu sais pour quelles obscures raisons papa est tellement remonté contre Alexander ?

Elle, se contente de continuer à apprêter la dinde dans son plat sans détacher le regard.

C'est tout en haussant doucement les épaules qu'elle affiche une moue interrogative.

– Tu sais ma puce, je suppose qu'il a peur de te perdre si tu tombes amoureuse d'un homme... - bafouille-t-elle gênée -

– Evidemment. Peur de perdre sa petite main mise sur mon futur... Tu sais qu'il a ajouté à nos contrats une clause interdisant toutes relations de type amoureuses au sein du cabinet !

Ma mère redresse subitement sa tête pour trouver mon regard. Elle affiche une impression de stupeur sur ses traits et je ne peine pas à deviner qu'elle est aussi surprise que moi.

Elle secoue doucement la tête en soupirant, décontenancée.

– Il exagère quand même ! Mais Anna, écoute, je t'en prie, évitons les foudres de ton père et surtout pendant ces deux jours ma puce. - m'adresse-t-elle avec douceur en prenant douceur mes mains dans ses paumes chaudes -

– Mais oui... Ne t'inquiète pas maman...

Elle reste silencieuse en enfournant son plat dans le four et tandis qu'elle se retourne, elle essuie rapidement ses mains contre le tablier pour défaire le nœud arrière et l'ôter.

Pendant qu'elle s'approche de moi en me poussant en direction du salon, elle m'adresse une petite tape sur les fesses avant de surenchérir.

– Bon en tout cas, j'ai la confirmation qu'il se passe bien quelque chose entre vous deux !

Je lui retourne un sourire exagéré en mimant un – chut – de mes doigts avant de m'activer à préparer la table pour ce soir.

Ces dernières années, la préparation de la table et de son dressage sont devenus notre petit rituel à nous. De toute façon, les hommes de la maison considèrent cette activité comme étant féminine, c'est donc tout naturellement que j'ai pris le relais de mon père.

L'avantage est que j'adore dresser la table de pré-réveillon, tous les ans, selon mon humeur du jour, je décore la table à mon image.

Cette année, je vois bien une nappe rouge, des faux flocons de neige, quelques feuilles de houx, une guirlande lumineuse et des petites bougies tout le long du chemin de table.

Alors que je m'active à dresser la table, j'attaque par la décoration puis les assiettes en grès noir que je choisis soigneusement avant de poser les couverts et le trio de verres devant chaque assiette. Je dispose la guirlande, quelques bougies, le houx ici et là et je prends un mètre d'écart pour observer mon travail.

Je suis satisfaite !

La table reflète bien mon état d'esprit du jour. Un mélange de douceur, de gaieté tout en étant suffisamment sophistiqué.

Je rajoute la – final touch – en déposant dans chaque assiettes les crackers, ces couronnes en papier que nous portons traditionnellement lors des jours de fêtes.

Prise dans les préparatifs j'en aurais presque oublié l'heure qui, elle, ne s'arrête pas de tourner pour mes beaux yeux. C'est dans un élan fulgurant que je me dirige vers l'étage avec la ferme intention de m'accorder une mise en beauté toute particulière pour ce soir.

Après avoir passé un temps considérable sous la douche puis à me sécher, me maquiller et me brushinguer, il est l'heure de passer par la case dressing. C'est avec une petite idée derrière la tête que j'ouvre mon tiroir à lingerie et que je prends tout le temps nécessaire de choisir mes dessous. Il y en a pour toutes mes humeurs dans cette commode.

C'est rapidement que j'attrape l'un de mes ensembles rouges, celui-ci est encore plus fin que les autres avec sa fine soie et son tulle. La matière soyeuse laisse apparaitre la peau nue en dessous de la jolie forme corbeille du soutien-gorge et encore plus au niveau du tanga. J'attrape le porte-jarretelles assorti à l'ensemble, m'installe sur le bord du lit pour enfiler mes deux bas noirs et je termine par clipser le tout.

Je me relève pour faire quelques pas en direction du grand miroir. Je m'inspecte de face, de dos, de côté. Même si j'aurais besoin de faire davantage de sport, j'apprécie de voir mon corps mis en valeur dans mes ensembles de lingerie.

Même si la majorité de mes amies ne comprennent pas pourquoi je ne porte que des porte-jarretelles et non des collants, elles n'y voient pas tous les bénéfices. Surtout pour elle-même. Prendre le temps de se mettre en valeur contribue grandement à son capital confiance, à être bien dans sa peau et à être prête à déplacer des montagnes.

Oui, oui, des montagnes !

Tout comme le parfum, ce sont des détails qui nous rendent plus fortes et principalement face aux hommes et tout ceci en ayant conscience de sa propre beauté.

C'est en sautillant joyeusement à cette pensée que je me dirige vers mon dressing pour terminer ma tenue. C'est un peu blasée que je passe mes Christmas Jumper – ces pulls hideux de Noël – même s'ils ne m'inspirent pas, j'opte pour un col roulé rouge à broderie blanche représentant des flocons et j'ajoute à ma tenue une touche de fun en enfilant ma jupe à sequins argentés.

Une tenue à mi-chemin entre l'ange et le démon.

Je suis tirée de ma rêverie lorsque je me rends compte qu'il est 17h30 passé et que je suis déjà en retard pour retrouver mon acolyte. Je jette un coup d'œil rapide à la fenêtre, il neige considérablement et le niveau de poudreuse augmente d'heure en heure.

J'enfile rapidement mon manteau, je saute dans mes cuissardes et je dévale les escaliers pour prendre aussitôt le départ pour retrouver mon charmant Ecossais.

J'ai déjà hâte.