Fyctia

C'est un véritable comité d'accueil qui m'attend dès que je passe le pas de la porte. Ils sont tous là, à m'attendre. Mon père, ma mère, mon frère et... J'explose de rire en apercevant Ester se tenir tout naturellement au milieu de mon clan familial.

A voir son air malicieux, je suis certaine qu'elle trépigne d'impatience de me questionner.

Je me précipite dans leurs bras pour fêter nos retrouvailles. Je prends le temps de les serrer chacun des membres de ma famille pour terminer en beauté avec Ester qui se met à pousser avant son fameux cri de joie incompréhensible.

Même si j'affiche un large sourire sur mon visage, ma séparation avec Alexander arrivée quelques minutes plus tôt me chagrine toujours un peu, s'il pouvait être là, ce serait vraiment la cerise sur le gâteau.

Quoi qu'il en soit, je me contente de profiter de mon noyau familial pour le moment. Mon père ne tarde pas à me servir un grand bol de vin chaud pendant que nous nous installons devant le feu de cheminée.

Pas besoin d'être Sherlock bis, pour deviner que je vais être submergé de questions.

C'est sans tarder que ma mère ouvre le bal.

Alors, l'Ecosse, c'était comment ?

Les paysages sont beaux ?

Il fait froid là-bas ?

Les écossais sont-ils charmants ?

Tu n'as même pas ramené une bouteille de scotch !

Je passe davantage de temps à rire qu'à répondre franchement à ses questions. De toute façon, même si je le voudrais, je ne pourrais pas être totalement franche. Enfin surtout lorsqu'elle me demande si les écossais sont des hommes charmants.

Evidemment qu'ils sont charmants, surtout celui qui loge à 300 mètres d'ici !

Je remarque les regards malicieux d'Ester pendant que je me contente de brouiller les pistes, sachant parfaitement que je mens ouvertement.

Néanmoins, après cette première note, légère à souhait, c'est mon père qui se décide à prendre le relai de la conversation. A scruter son air soupçonneux, la discussion promet d'être bien moins amusante.

– Tout s'est bien passé avec Mr Douglas ? Vous avez les testaments ? - début-il plutôt soft à mon goût -

– Oui, oui. Nous avons les premiers testaments en main. Il a exigé de pouvoir déposer son sceau personnel aux manuscrits et ne les ayant pas hier, nous devrions recevoir les deux nouveaux manuscrits avec sceau, demain, à Londres.

Sans dire un mot, il se contente de hocher de la tête en sirotant son vin chaud.

– Et avec Alexander ?

– Quoi, avec Alexander ? - rétorqué un poil trop agressive en me mordant la joue -

– Il t'a mis le grappin dessus ? - surenchérit-il, aussi colérique -

– Non ! Pourquoi Alexander t'obsède, c'est dingue ! - m'emporté-je pour de bon -

Il se contente de me toiser de son air mauvais pendant que tous les autres semblent retenir leur souffle jusqu'à la prochaine attaque.

– Je me demande où est passé la jeune femme ambitieuse, charismatique et surtout indépendante que je connaissais. - poursuit-il, provocateur -

Il touche une corde sensible.

Je sais bien que me battre contre mon père est un jeu dangereux.

S'il est devenu l'un des avocats les plus réputés de Londres, ce n'est pas par magie.

Malgré ça, je ne me laisse pas abattre pour autant.

– Tu ne supportes pas l'idée que je puisse, justement, prendre mon indépendance en m'affranchissant de ton contrôle ! Cette idée te rend fou, c'est incroyable !

Les scores sont à 1 – 1.

Je sais pertinemment que je viens de le blesser, mais il m'a blessée avant aussi.

Avant qu'il ne puisse rétorquer quoi que ce soit, c'est ma mère qui se porte juge de paix en mettant un terme à nos chamailleries avant que le ton ne monte définitivement trop haut.

C'est finalement au tour de mon frère de prendre le relais pour détendre l'atmosphère tendue que nous venons de jeter dans la pièce. Il me donne un léger coup d'épaule pour attirer mon attention pendant qu'il me scrute de ses iris émeraude.

– Tu sais qu'ils annoncent une grosse tempête de neige à partir de ce soir !

– Ah bon ! - lancé-je surprise -

J'apprécie son effort pour tenter de détourner mon attention, mais je suis toujours vexée par l'attitude de mon père. Pendant que je noie mon amertume dans le vin chaud, je prie pour qu'il ne fasse pas d'esclandres demain, quand Alexander sera parmi nous.

Sur ceux, nous passons à table et la bonne ambiance finit par revenir. Malgré ça, je suis fatiguée, et ce, même si j'ai dormi toute la route. C'est donc assez rapidement que j'informe mes proches de mon départ au lit, toujours talonnée par une Ester qui trépigne d'impatience.

Aussitôt arrivées à l'étage et la porte de ma chambre fermée, elle me saute sur le poil en s'immobilisant face à moi, un doigt pointé sur le nez.

– A mon tour de poser les questions ! Je veux tout, mais attention ! Je veux absolument tout savoir dans les moindres détails ! - m'ordonne-t-elle déterminée -

Je pouffe de rire devant sa mine pendant que j'enfile une tenue plus confortable. Dès que je suis prête à délier ma langue, j'entame un long récit en lui racontant tous les détails croustillants.

Notre arrivée, Amy, la patinoire, la soirée au pub, notre rapprochement, le dîner avec ses parents. Tout y passe et je m'applique même à lui décrire mon ressenti à chacun des moments.

Durant toute mon histoire, son expression est passée par toutes les couleurs, mais jamais sans ajouter un mot. Bien trop occupée à m'écouter très attentivement. C'est seulement à la fin qu'elle se laisse tomber lourdement dans l'oreiller pour pousser un grand – wow – avant de me lancer un long regard de biais en souriant.

– Mais comment tu as fait pour ne pas lui sauter dessus ! Moi je dis que ton Ecossais est à point ! - surenchérit-elle joyeusement -

– Ester !

– Bha quoi ! C'est vrai. Tu ne vas pas me dire que tu ne fantasmes pas à fond sur lui et sur son attribut... - me dit-elle en faisant tourner son index sous mon nez -

Je m'avoue vaincue en levant les mains en l'air et en riant aux éclats.

Evidemment qu'il est l'objet de tous mes désirs, mais ce n'est pas si simple que ça, avec elle tout parait avoir une solution, rapide, nette et sans bavure.

– Tu sais, je commençais à désespérer de te voir bonne sœur ! - poursuit-elle moqueuse -

– Dans un couvent entouré de chats et de corgis ? - pouffé-je de rire -

– Ouais ! J'ai bien cru que j'allais devoir te remettre sur le droit chemin Sainte Anastasia !

– Oh n'abuse pas ! Toujours plus dramatique ! - finis-je par lui lancer en riant et en roulant des yeux -

– Tu sais bien que c'est ma marque de fabrique, le drama ! Et d'ailleurs en parlant de drama... - elle se met à mimer un aïe - On en parle de ton père ?

– Non !

Malgré nos fous rires et la joie de nos retrouvailles, je tombe de fatigue et à voir les petits yeux de mon amie, elle aussi.

Pendant que je tombe dans les bras de Morphée, je repense qu'hier, c'est encore avec Alexander que je partageais ma couche.