Fyctia
Chapitre 17
| Lundi 14 Décembre - 7h07 |
J'ai passé une nuit affreuse.
Les paroles de Charli m'ont plus affecté que je ne le pensais. J'en suis venue à passer une bonne partie de la nuit à remettre en question ma vie, toute entière.
Depuis quand suis-je suis rentrée dans le joli petit moule que mon père m'a proposé ?
J'ai toujours voulu être le bon petit modèle, celle qui suit ses traces. Comment pourrais-je lui en vouloir ? Je n'ai jamais tenté d'aller à l'encontre de ses attentes, je m'y suis délibérément glissée dans ce moule.
J'ai choisi moi-même de me mettre une étiquette de carriériste sur le dos. Tout ça pour reproduire l'exemple que l'on m'a donné. Mais pourquoi me mettre autant de pression sur les épaules ? Dans quel but ? Quand je vois Charli, lui il n'a eu aucun scrupule à rire au nez de son père quand il l'a poussé sur la voie du droit. - En même temps... Je pouffe moi-même de rire en imaginant un Charli avocat, ça aurait été du grand n'importe quoi. C'est un artiste, certainement pas un avocat. - Et même mon frère a réussi à se redresser contre les volontés de mon père...
Et enfin, comment ai-je pu m'enfermer dans ma propre prison dorée ? A défaut de ne plus être la fêtarde que j'étais autrefois, au niveau sentimental c'est carrément le néant. Ca doit remonter à il y a plus de cinq ans, le dernier prétendant que j'ai présenté à mes amis ou à mes parents. Je n'avais pas réfléchi à cet aspect de ma vie mais maintenant que j'ai mis le doigt dessus, je me rends compte que je manque cruellement d'interactions sociales en dehors de mes amis.
Mais que m'est-il arrivé depuis ?
Pourquoi ai-je centré ma vie sur le droit en mettant de côté tout le reste !
Cette perspective me met clairement d'une humeur très maussade pendant que je me prépare pour aller au bureau. Ma tenue reflète parfaitement mon humeur du jour. Je habillée en noir de la tête aux pieds.
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Durant le trajet maison - bureau, parti avec mon énorme bouquin dédié aux successions et héritages, je suis bien déterminée à imposer mon point de vue à Alexander dès mon arrivée.
Et, à peine arrivée au cabinet, j'entre comme une furie dans mon bureau sous les yeux ahuris d'Alexander. - Je suis remontée comme un coucou. -
Je pose lourdement mon énorme bouquin de malheur, dispose de part et d'autre mes mains sur la table en verre en faisant face de toute ma hauteur à Alexander. - Son air habituellement suffisant qu'il affiche sur son délicieux minois n'est plus que stupeur. -
-Nous devons imposer un testament authentique à Mr Douglas. - je lève une main en signe d'arrêt avant qu'il n'ouvre la bouche - C'est l'unique solution qui s'offre à nous pour clore ce foutu dossier, une bonne fois pour toute !
-Bonjour Anastasia. Sinon, ça va et toi ? Tu as passé un bon weekend ? - me lance-t-il un poil irrité -
J'avoue que mon intonation était un petit peu trop autoritaire, et que j'ai carrément zappé la courtoisie, mais au moins c'est dit.
Je ne suis pas d'humeur à marcher sur des œufs avec Alexander aujourd'hui.
Tandis que je m'installe à ma place habituelle, il n'a toujours rien répondu au sujet du testament. Il se contente de feuilleter le manuscrit que j'ai ramené.
En attendant qu'il daigne valider ma proposition, j'ai l'impression qu'il prend un malin plaisir à me faire attendre. Il sait pertinemment que j'ai raison. Ne tenant pas en place, je pars me préparer un ristretto, très noir.
-Tu as raison. C'est une excellente idée le testament authentique. - me lance-t-il alors que je passe le pas de la porte. Ces mots semblent lui arracher la bouche, mais que dieu le bénisse, nous sommes enfin d'accord. -
-Ravie que l'on soit d'accord. Maintenant il nous reste à contacter Mr Douglas pour mettre en place la procédure.
-N'oublions pas qu'il faut qu'il contacte son juriste et son notaire avant notre venue. - réplique-t-il -
-Notre venue ? - surenchéris-je septique -
-Mr Douglas a expressément spécifié qu'il n'effectuerait aucun déplacement dans le cadre de ce dossier.
Même si je savais que l'éventualité d'un déplacement me pendait au nez, je n'avais pas envisagé cette option sous cet angle. Quoi qu'il en soit, je me contente de hocher de la tête en signe d'affirmation.
Puisque nous sommes d'accord, Alexander s'empresse d'informer Mr Douglas de notre future venue en Ecosse en lui expliquant la procédure que nous avons choisie. Le client approuve, semble même soulagé par notre proposition. C'est bon signe, les choses s'améliorent.
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Suite à notre appel à Mr Douglas, nous attendons dans le cours de la semaine, la confirmation de rendez-vous avec son juriste et notaire personnel. En attendant la date, puisque nous sommes d'accord sur la méthode, nous n'avons rien à faire de plus que de d'attendre son appel.
Etant rémunéré à la commission, j'estime de ma présence au cabinet n'est donc pas nécessaire. Il est 12h37, j'ai faim et toujours de mauvaise humeur.
Je soumet à Alexander mon opinion concernant notre présence inutile puis, je me dirige vers le bureau de mon père pour l'en informer.
La période étant creuse, la plupart des collaborateurs sont en congés payés ou à défaut, en télétravail. Comme prévisible, il n'y voit aucun problème à ce que nous quittions le cabinet. Ayant un minimum de conscience, je le questionne pour savoir si d'autres dossiers seraient en attente, apparemment non. Même pas une petite affaire de protection de la propriété intellectuelle, très courante en période de fêtes.
Il ne m'en faut pas plus pour prendre le départ du cabinet. J'embrasse rapidement mon père, je passe saluer Alexander puis je prends le départ.
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Dans le cours de l'après-midi une sublime idée me vient en tête. Je me décide à écrire sur notre groupe de discussion commune à mes amis.
En attendant une réponse, je feuillette l'un des journaux sur la table basse.
Je suis d'abord surprise de voir sa réponse. Depuis quand fait-il partie de ce groupe ? Puis, je me mets à pouffer de rire devant sa note d'humour. Depuis quand est-il capable d'ironie ? Malgré tout, c'est la première fois de la journée que j'affiche un sourire sur mon visage.
Bel exploit Mr Sheperd me dis-je intérieurement.
Mon amie me répond favorablement et je m'active à me préparer à partir.
Je sautille en me disant que j'ai déjà hâte d'entendre les derniers potins croustillants qu'elle aura certainement à me raconter.
C'est exactement ce dont j'ai besoin maintenant pour reprendre en main ma vie sociale.
25 commentaires
M. Florisoone
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Il y a 4 ans
Paupipauline
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Il y a 4 ans
AlphyM
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Il y a 4 ans
Paupipauline
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Cendre Elven / Mary Ann P. Mikael
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Il y a 4 ans
Fanfan Dekdes
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Il y a 4 ans