Fyctia

Après un moment muet, il se met à rire à gorge déployée. Pendant qu'il hoche doucement de la tête en passant sa main dans ses cheveux, je suis littéralement en train de me liquéfier.

-Ne prends pas tes désirs pour des réalités ! - me lance-t-il en m'adressant un clin d'œil complice - Mais en revanche... Je ne pensais pas tu aimais ce genre d'endroit.

-Et pourquoi ça ? - lui rétorque-je en riant doucement -

-Je ne sais pas, c'est assez fantasque, non ?

-Ce n'est pas ton truc ce genre de soirée, dans les clubs hein ? - lui lance-je avec ironie -

-Comment sais-tu que je ne fréquente, qu'exclusivement les soirées kilts et cornemuses ? - cette fois-ci j'éclate franchement de rire devant sa repartie bien placée -

Tandis que je me préparais à lui répondre avec humour, je suis coupée dans mon élan. Je suis saisi par le bras avec une certaine force et pendant que découvre de qui il s'agit, je me lance dans les bras d'un bon ami. Il s'agit d'un ancien camarade de Cambridge, Paul.

Prise d'assaut par ses nombreuses questions, nous nous mettons vivement à discuter dans le vacarme du club. Je jette parfois de discrets coups d'œil à Alexander qui adresse plusieurs regards de biais à mon ami. Bien que j'ai tenté d'intégrer Alexander à notre discussion, son attitude, s'est soudainement fermée. Ceci me donne l'impression qu'il n'apprécie guère cette présence masculine qui vient de se greffer à nous. - J'avoue que j'aurais bien poursuivi ce petit numéro de charme, mais, ainsi soit-il. -

Après quelques minutes de plus, se sont Ester et Carla qui viennent nous rejoindre à leur tour. Elles sont accompagnées par les deux jeunes hommes et après un questionnement au sujet de la présence de Charli, je leur donne le peu d'informations que je détiens.

Nous restons là, tout attablés jusqu'à ce que Paul me salue, puis les filles à leur tour nous informent de leur départ. Apparemment elles comptent bien rentrer en charmante compagnie ce soir. Je leur adresse un sourire complice tandis qu'elles partent. Elles sont infatigables me dis-je en riant intérieurement.

Alors que ne sommes plus que quatre, Ophélie et Charli finissent par se rejoindre à nous. Visiblement, leurs différents ne se sont pas réglés, et à voir Ophélie rassembler ses affaires, nous sommes donc sur le départ.

-Je pense que l'on va partir avec Charli, c'est trop compliqué de parler ici ! - me lance Ophélie en criant pour que je l'entende -

-D'accord. Vous allez où ? - lui répondis-je avec une voix également un peu trop forte -

-Charli m'a proposé d'aller chez lui, tu viens aussi ?

Tandis que je me contente de hocher en signe d'affirmation, j'espère silencieusement qu'ils ne s'enfermeront pas dans leur bulle une fois là-bas. De toute façon, j'habite à côté, au pire, je rentrerais à pied chez moi.

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Durant le trajet, le silence est d'or. Seuls, les deux tourtereaux assis à l'arrière, discutent à voix basses. Ceci me laissant à l'avant, aux côtés d'un Alexander toujours très silencieux. Arrivés sur la Green Street, nous montons rapidement dans l'appartement. Nous prenons nos dans quartiers dans le salon, où une douce odeur de feu de cheminée rempli l'espace. - C'est aussi pour ça que j'aime tellement l'hiver, pour ces odeurs réconfortantes. -

-J'ai le poison parfait pour terminer la soirée mes lapins ! - nous lance Charli avec les yeux pétillants -

Il nous sort une vieille bouteille de rhum arrangé à la vanille, cannelle et cardamome. J'avoue que l'odeur de ce breuvage est clairement aguichante. Il nous sert, puis s'installe à côté d'Ophélie, en passant délicatement un bras autour de ses épaules. La scène me fait sourire, il y a deux clans face à face. Les deux tourtereaux assis dans le canapé, ne réclamant qu'à rompre la distance entre eux et il y a nous, avec Alexander, assis, silencieux et plutôt distants.

-Alors vous aimez ? - lance Charli en faisant rouler le rhum dans son verre -

-Epicé, c'est parfait pour une soirée d'hiver ! - lui répondis-je avant de marquer un temps de pause en fixant, souriante, Ophélie et Charli - Alors vous avez trouvés un terrain d'entente ?

-Je suis en pourparlers, mais la demoiselle est difficile en affaires ! - rétorque Charli en regardant avec complice Ophélie -

-Oui, ça c'est sûr qu'il lui reste du travail ! - surenchère Ophélie en riant franchement -

Tandis qu'ils se dévorent des yeux, la tension dans ces deux-là est presque palpable. C'est finalement Alexander qui vient à rompre le silence.

-D'ailleurs, il est où ton père ce soir ? - le questionne Alexander -

-Je ne sais pas, je crois qu'il avait une soirée de prévu ce soir. A mon avis, il n'est pas prêt de rentrer ! - répond joyeusement Charli -

C'est finalement un nouveau silence qui s'installe pendant qu'Ophélie et Charli se replongent dans leur discussion mais à un détail près, ils sont nettement plus proches.

Ici, rien à signaler, c'est le calme plat pendant que nous sirotons nos verres. Je crois qu'à défaut d'être plutôt mal à l'aise, nous ne savons pas vraiment comment engager la discussion avec Alexander, alors nous nous contentons d'observer nos deux protagonistes se faire les yeux doux.

Le coup de grâce est asséné lorsqu'ils se mettent à s'embrasser goulûment. - Là c'est le niveau de gêne ultime - Nous nous regardons en riant doucement avec Alexander, quoi qu'un peu de gêne se mêle à nos expressions. Cherchant désespérément à couper court à cette situation, je termine d'un trait mon verre sous le regard amusé d'Alexander.

-Mal à l'aise ? - me lance-t-il avec une incroyable décontraction -

-Plutôt oui !

-Tu as mieux à faire que de partir ?

-Que proposes-tu ? - lui lancé-je en haussant les épaules -

-Viens, laissons-les se dévorer.

Alors qu'il se lève, il m'intime à le suivre en direction du petit salon à gauche. - De toute façon, au point où j'en suis. - Je le suit sans dire un mot.

-Tu sais jouer ? - en désignant du menton le billard -

-Il me semble que j'étais plutôt bonne à une époque.