Fyctia

Alors qu'Alexander vient briser le silence qui venait de s'installer entre nous, je ne tarde pas à entendre le délicieux timbre de sa voix, à la fois douce et grave. Bien que j'avais déjà eu à plusieurs reprises des doutes, dès qu'il se met à parler, je ne peux manquer l'accent qui s'échappe de ses lèvres, il n'y a aucun doute, il est Ecossais.

-C'est étrange, pourquoi une fille comme toi, qui semble plutôt intelligente, se laisse dicter sa vie par son père. Qu'est-ce que tu cherches à te prouver en faisant ça ? - me dit-il avec un air détaché, presque méfiant -

Alors que je sais parfaitement où il veut en venir, il n'a pas mis longtemps à me cerner. C'est vrai que je n'ai jamais vraiment voulu être avocate, j'ai davantage choisi cette voie pour rendre fiers mes parents de mon parcours, même si aujourd'hui j'excelle dans ce domaine. Tandis que je prends mon temps avant de lui répondre, je scrute ses grandes iris vertes qui me fixent.

-A vrai dire, je ne cherche pas vraiment à prouver quoi que ce soit. J'ai validé haut la main le barreau et comme mon frère a pour horreur le domaine juridique, j'ai l'impression que c'est de mon devoir de suivre les traces de mon père. - il m'écoute attentivement en hochant doucement de la tête en signe de compréhension avant de prendre le relai -

-Je comprends ton point de vue. Mon frère s'applique, comme toi, à suivre le chemin familial. Moi je me suis battu pour devenir avocat, pour toi c'est presque comme si tu gâchais ton potentiel dans un domaine que tu n'affectionnes pas vraiment. Néanmoins, penses-tu qu'une femme comme toi, qui fait tourner la tête des hommes est capable de s'imposer dans ce milieu ? - je reste un moment stupéfaite de la lucidité de ses propos et de son ton légèrement sexiste, est-il sérieux en mettant en doute qu'une femme puisse se faire sa place dans un milieu d'homme ?-

-Tu a l'air très ambitieux Alexander et c'est tout à ton honneur d'en être arrivé là, mais... Si tu douterais de ma capacité à me faire une place dans ce milieu, je le suis. J'ai déjà deux ans d'expérience en tant qu'avocate du droit des affaires internationales et puis à Londres... Tout le monde connait la fille, successeure, de Marc Austin. - lui lancé-je souriante avec les iris pétillantes de défi et un ton malicieux. Je ne voudrais pas froisser d'entré de jeu mon futur collaborateur. -

-Tu comptes commencer lundi au cabinet ? - me lance-t-il avec le même regard malicieux -

-Effectivement, serais là lundi.

-Parfait, j'ai hâte de voir ce que tu vaux Miss Austin. Et d'ailleurs, tu n'es pas seule à témoigner d'une belle expérience aussi jeune, j'ai aussi fait mes armes dans un autre cabinet avant celui de mon oncle... Fais donc attention à toi Anastasia, rien n'est jamais gagné d'avance et la compétition éveil mes sens... - me lance-t-il avec une expression faussement détaché et espiègle, avant de plonger son regard dans le mien, son expression tourne au prédateur, il marque un temps de pause, écrase sa cigarette, arc un sourcil, me fixe intensément puis reprend - Il reste encore un léger détail, Anastasia, n'oublie pas d'essuyer le filet de bave qui s'échappe de ta bouche quand tu me regardes, je n'arracherais pas ta petite culotte ce soir et ni aucun autre soir d'ailleurs. - je ne peux m'empêcher d'éclater de rire devant sa mine à mi-chemin aguichante et sérieuse -

-Quel sérieux Mr Sheperd, qu'est-ce qu'il te fait croire que tu pourrais me plaire ? Serais-tu gay ? - il se penche doucement vers moi de façon à ce que nos visages ne soient qu'à quelques centimètres et pendant qu'il me scrute, il m'adresse un sourire carnassier -

-Simple supposition. Et non... Je ne suis pas gay. J'aime particulièrement les femmes mais elles ne sont que perte de temps. Comme tu l'as dit, je suis ambitieux et l'ambition ne laisse pas la place à névrose de l'amour, et encore moins avec la fille de Marc Austin.

Sur ces paroles, il tourne les talons et rentre dans le bar sans dire un mot de plus. Il souffle aussi bien le chaud que le froid, enfin surtout le chaud et ça me déstabilise. Il est en lui même une véritable intrigue. Son attitude, ses paroles, sa façon de se comporter, pique au plus au point ma curiosité. A cet instant précis, je n'ai qu'une envie : le rendre totalement fou. Il me tarde de lui prouver qu'une femme peut aisément concurrencer un homme et aussi en lui prouvant que je serai capable de le faire craquer, lui-même en tant qu'homme et prédateur.

Tandis que je l'observe regagner notre table à travers les grandes vitres du bar, mon regard le suit avec attention. Je le vois se faufiler à travers la foule et je ne peine pas à constater qu'un bon nombre de femmes se retournent sur son passage pour observer Alexander. - comment peut-il avoir un pouvoir de séduction aussi fort sur la gente féminine ? - Alors que je finis par terminer ma cigarette, je ne sais pas combien de temps j'ai bien pu rester sur ce trottoir à épier ses faits et gestes. Après un bon moment, je me décide à rejoindre le reste de mes amis à l'intérieur et j'inspire une dernière fois une grande bouffée l'air frais pour me remettre les idées en place...