Fyctia
un peu trop sensible?
Voltaire disait « Je suis doué d’une sensibilité absurde, ce qui érafle les autres me déchire ».
Je dirais que ça te définissait bien.
Physiquement.
Jusqu’alors, je n’y avais pas trop prêté attention, mais à presque cinq ans, certaines évidences ne pouvaient plus être niées.
Tu étais douillet. Pas un peu douillet, non exagérément douillet, follement douillet, démesurément douillet.
Tout semblait décuplé chez toi.
Très vite tu n’as plus supporté certaines chaussures, puis aucune chaussettes .
« Mais maman, les coutures me font mal »
Impossible de te faire porter les pulls même les plus doux faits avec amour par ta mamie, pas plus que la moindre étiquette, une certaine forme de sous vêtement…
T’habiller était une vraie galère.
Sans compter ton sens de la galanterie.
Il t’était intolérable d’aller où que ce soit si ton boxer n’était pas accordé à tes chaussettes et ton t shirt.
Un dimanche, alors que tu étais chez ta grand-mère , tu lui as fait une crise monumentale. Dans la valise le dernier pull ne s’accordait avec rien. Mamie devait sortir. Du haut de tes cinq ans, ni elle ni moi n’avons réussi à te convaincre, tu es donc sorti en t shirt . Je me suis dit qu’après tout , tu finirais bien par admettre ton erreur.
Evidemment tu ne l’as jamais admis et tu as claironné toute la journée qu’il faisait vraiment très chaud pour un mois d’hiver.
Petite bourrique !
Nous entendions parler du moindre bleu pendant des semaines.
La moindre maladie te mettait dans tout tes états .
Je ne compte pas les fois où , démunie, je te regardais te tordre de douleur en me demandant si je devais jouer le jeu ou faire preuve d’un peu de fermeté.
La fermeté.
Au-delà de la moindre douleur physique, tu n’as jamais supporté l’autorité telle qu’on peut se l’imaginer.
Là encore, je fus pointée du doigt à maintes reprises.
Tu n’as jamais été un petit garçon difficile. Tu n’as jamais fait de bêtise. Tu ne t’es jamais montré méchant avec qui que ce soit, la méchanceté t’est d’ailleurs parfaitement étrangère.
Mais comme tout le monde, tu avais de mauvais jours. Et comme tout enfant, il fallait parfois te reprendre.
Tu pouvais te mettre dans des colères noires. Et là, il valait mieux savoir s’y prendre.
L’école en a souvent fait les frais.
Je sens encore sur moi la consternation de certains regards quand en pleine crise, je me penchais vers toi, je te contenais de mon corps et je t’embrassais en te disant des mots d’amour. La crise s’estompait en moins d’une minute pour ne devenir qu’un lointain souvenir.
La vérité, c’est que je ne les avais pas attendus pour apprendre à te connaitre.
Non je n’ai jamais eu de préférence pour un de mes enfants.
Mais quand ta sœur réagissait à un ton ferme, voir menaçant, toi tu sortais de tes gonds et devenais incontrôlable.
Il n’y avait que deux manières de te ramener à la raison, l’humour et la tendresse.
Rien d’autre
Ton papa avait du mal avec ces méthodes.
Sans me l’avouer, je pense qu’il était un peu de l’avis général, qu’avec toi j’étais laxiste et que je t’aimais trop pour être ferme.
Mais d’une nature douce et conciliante, il me laissait faire, et m’appelait quand il n’arrivait pas à désamorcer la crise.
Je ne lui en veux pas. Il était un peu perdu et avec lui tu te montrais particulièrement dur et détaché.
C’est bien plus tard que vous avez noué une très forte relation.
J’ai longtemps eu le monopole de ton cœur.
A ce sujet , de moi tu ne tolérais aucun jugement, quand celui des autres te passait bien au dessus.
Si j’avais le malheur de te faire la moindre critique, tu en faisais une tragédie et tu pouvais m’en parler pendant des semaines .
J’en faisais donc peu, très peu. Et je dois admettre que chaque fois que j’ai eu à te faire une remarque un peu verte, tu as corrigé le tir dès le lendemain.
Mon opinion était presque vitale, à mes yeux tu te devais d’être parfait.
La perfection
C’est ce qui t’attirait chez les autres.
Chez Matthis, chez ta sœur, chez ta grand mère, chez moi.
Evidemment nous étions tous très loin de l’être, mais à tes yeux nous l'étions.
Tu te montrais toujours très critique à l’égard des autres, presque un peu sectaire.
Tu avais des idées bien arrêtées sur le monde et sur les gens et tu ne supportais aucun débordement.
Tu as voulu essayer le foot à quatre ans, te connaissant j’étais un peu surprise mais je t’ai emmené à un entrainement.
Tu es rentré consterné.
« Les footballers sont violents et vulgaires. »
Sans appel
Il y avait un petit garçon qui t’aimait beaucoup et t’invitait chaque mercredi. Tu déclinais toutes les semaines. Pour ne pas le blesser, j’ai inventé toutes les excuses du monde.
A bout d’argument et un peu irritée de tes refus, je t’ai mise le dos au mur.
- Ou bien tu me dis ce que tu lui reproches, ou bien tu y vas
-Il est méchant !
-Simon ? Mais, c’est un adorable petit garçon tout en douceur.
-Il a dit à Matthis que son pull était moche !
C’était toi …
La moindre vulgarité, la moindre parole blessante envers un autre que toi (oui parce que paradoxalement, les gens pouvaient te critiquer toi, ça tu t'en fichais), le moindre geste violent et tu jetais aux oubliettes.
2 commentaires
Lys Bruma
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Il y a 9 mois