Fyctia
Premiers jours d'école
Elle fut durant un an le théâtre de tes fantasmes.
Ta sœur t’en parlait tellement.
« A l’école on apprend à lire, on a plein de copains, on fait des dessins, de la pate à modeler. »
Nous y allions tous les jours, deux fois par jour pour chercher ta sœur.
Tu connaissais les lieux, les gens , les bruits.
Pour autant je n’étais pas sereine.
Ta sœur avait toujours adoré l’école. Ultra sociable, dès sa première rentrée elle y était comme un poisson dans l’eau. Je me souviens du jour de sa première rentrée. C’est elle qui m’a reconduite à la porte de la classe sans un bisou.
Moi j’ai pleuré toute la matinée dans ma voiture.
Quand je suis venue la récupérer à midi , elle n’avait qu’une hâte , y retourner.
Je n’étais pas dupe, je savais qu’avec toi , ce ne serait pas la même mayonnaise.
Nous t’avons préparé tout l’été.
Tu étais propre, avide de savoir, ravi d’accompagner ta sœur dans cet endroit mystérieux dans lequel elle semblait apprendre tant de choses magiques.
C’est remonté comme un coucou que tu es parti conquérant pour ton premier jour d’école.
Il faut reconnaitre que ces derniers temps tu avais fait de gros progrès.
Ma maman te prenait régulièrement pour le week-end et tu acceptais de passer quelques heures chez tes autres grands parents.
Tu ne pleurais plus systématiquement quand je tournais les talons et même si tu n’appréciais pas trop que je quitte la maison certains soirs pour profiter de mes copines, tu ne faisais pas trop de scandales.
Quand nous sommes entrés dans ta classe, à la vue des autres enfants j’ai senti ta petite main me serrer très fort . Sentant ta panique monter, je me suis dirigée vers un petit garçon qui faisait un puzzle. Je me suis assise à coté de lui et tu m’as imité.
Je lui ai demandé son prénom et vous ai présenté.
Après un petit moment , je t’ai annoncé mon départ. Ton regard s’est voilé de larmes.
-Tu retrouves ta sœur dans une heure à la récré. Je vous récupère à midi et on passera l’après-midi tous les deux.
A ma grande surprise, tu n’as pas opposé de résistance.
Tu t’es contenté de regarder le sol, perdu.
J’ai pleuré toute la matinée. Je suis faible, tu me connais.
A midi, je suis venue te rechercher. A ma grande stupéfaction tu étais tout sourire.
-Ca y est maman , je suis allé à l’école, m’as-tu annoncé fièrement.
-Ca t’a plu ?
-Ouiiiiiiiiiiiiiii
-Génial ! Dis au revoir à tes camarades.
-Au revoir
-A demain
A ces mots, tu t’es figé
-Pourquoi demain ?
-Et bien demain, tu retournes à l’école.
-Mais j’y suis déjà allé !
Mais Loulou, l’école c’est tous les jours ! Tu vois bien ta sœur y aller.
Plus tard dans la soirée, pour te préparer au lendemain je t’ai interrogé sur ce qui t’avais plu. Le bilan fut bien maigre, mais à ma grande surprise, il y avait eu du bon.
-J’ai un copain
Le premier de ta vie
-Mais c’est super ça ! Comment s’appelle t’il ?
-je ne sais pas
-Ah ? Et Pourquoi c’est ton copain.
Ton regard se met à briller et tu me réponds admiratif
« parce qu’il a de lunettes »
Le lendemain ,
Tu as refusé de t’habiller, de déjeuner, de marcher.
Par chance nous habitions à trois maisons de l’école .
C’est dans des hurlements démoniaques que je t’ai ramené au pénitencier, devant les yeux effarés des autres parents et celui très inquiet de ta maitresse.
Cette dernière, réputée pour être excessivement maternelle, a tout tenté pour t’adoucir.
Rien à faire.
Tu te débattais, tu hurlais, tu suppliais.
Elle a tenté de te faire un câlin . Bien mal lui en a pris!
Je pense qu’elle a dû te croire possédé
"Partez madame, votre présence ne fait qu’aggraver les choses."
Evidemment c’était de ma faute.
Je ne l’imaginais pas à l’époque mais il allait falloir m’y habituer.
J'ai de nouveau passé ma matinée à pleurer.
Le samedi, ta mamie est venue me prêter main forte
-Alors l’école dis-moi ?
-C’est nul
-Mais mon loulou c’est trop bien l’école, y a plein de copains !
-je n’aime pas les copains
-Il te faut le temps de t’habituer, mais tu verras, tu vas apprendre plein de choses. Tu vas apprendre à lire (argument de taille puisque tu avais commencé à apprendre en écoutant ta sœur faire ses devoirs)
-On n’apprend rien à l’école. Si c’est pour colorier des chapeaux en vert, je peux le faire chez moi.
Le verdict était sans appel
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5 commentaires
Lys Bruma
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Il y a 9 mois
Vinnie Catz
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Il y a 9 mois
Émilie Chevallier
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Il y a 9 mois
Vinnie Catz
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Il y a 9 mois