Fyctia

Je profite de la fraîcheur du bord de mer pour m'éclaircir les idées. Cette fille, c'était un mirage. Il faut que ma raison reprenne le dessus.

Les mains dans les poches, je prends le chemin le plus long pour rejoindre la maison que nous partageons avec mon meilleur ami. Les bras de Morphée ne viendront pas me cueillir cette nuit, le travail me tiendra compagnie.

Arrivé dans l'entrée, je me débarrasse de mes chaussures, puis je monte dans ma chambre. Avant de m'installer au bureau, je fais un saut par la salle de bain. J'ai besoin d'une douche froide pour me recentrer.

Je sors de la salle de bain, une serviette enroulée autour de ma taille quand j'aperçois Milo, ma boule de poil sur le pas de la porte de ma chambre. D'habitude, il sait qu'il n'a pas le droit d'être à l'étage. Il a l'air d'attendre, assis sur le pas de la porte, que je lui donne l'autorisation d'entrer sur mon territoire. J'enfile un boxer et lui fait signe de venir. Il est là, comme s'il pouvait sentir que je suis bouleversé. Milo me suit jusqu'à mon bureau, face à la mer, et se couche paresseusement à mes pieds.

Je passe la nuit à dessiner, à imaginer des villas, des chalets tous plus extravagants les uns que les autres. Concentré sur mon travail, je ne pense plus à ce qu'il s'est passé quelques heures plus tôt.

Vers sept heures du matin, alors que quelques rayons de soleil tentent de percer la brume, j'entends Tom rentrer, trébucher, jurer avant de s'écrouler sur le canapé du salon. Le chien dormant lui aussi, je décide d'enfiler une tenue de sport pour aller courir en bord de plage comme tous les dimanches. Ce que j'apprécie le plus, c'est de sentir les courbatures. Comme une récompense confirmant l'effort fourni. Le réconfort d'une bonne douche pour détendre les muscles.

Je ne peux m'empêcher de repenser à la peau douce sous la pulpe de mes doigts. A la courbe des reins de la jeune femme d'hier. Il faut que je la retrouve, j'en suis déterminé et c'est la première chose que j'annonce à Tom encore endormi quand je rentre, des viennoiseries à la main. Je fais couler le café pour deux et réveille Tom. Il se redresse difficilement sur le canapé du salon, tout ensommeillé.

« - Mon vieux, on va la retrouver dès ce soir. On va retourner, où je l'ai vu pour la dernière fois !

- Mais de qui tu me parles ? rétorque Tom en baillant et se passant les mains sur le visage.

- Je te parle de la fille d'hier soir, celle que j'ai été stupide de fuir aussitôt que ses ennuis étaient finis. »

Tom m'observe derrière sa tasse de café. Je me doute qu'il est en train d'essayer de se remémorer le début de la soirée. Puis, il se met à sourire comme un idiot et m'assène :

« Ah oui ! C'est vrai que tu es un lâche ! ».

Il réfléchit un instant avant de continuer : « Si ça peut te rassurer, je crois que je n'ai pas couché avec elle. ».

A son sourire, je vois bien qu'il cherche à me provoquer. Il sait que je suis à fleur de peau et que je pourrai bien lui en coller une. Il finit d'un trait sa tasse de café, et se lève me signalant qu'il va prendre une douche. Au passage, j'en profite pour lui faire un petit croche-pieds amical, qu'il mérite bien après tout.

« Salaud va ! ».

Après cette petite confrontation matinale, enfin plutôt méridienne, je ne vois pas Tom de toute la journée. Je me suis renfermé dans mon bureau. Au lieu de commencer mes recherches sur l'apparition d'hier soir, je préfère dessiner. Un peu d'architecture, un peu de design et de décoration intérieur. Je travaille avec beaucoup de tons terre et nude. Mon style reste assez classique et plutôt industriel. J'aime assez utiliser le verre, le bois brut et le métal.

En fin de journée, j'entends la porte d'entrée claquer et Tom qui en a après Milo. Apparemment, ce dernier a pris un bain d'eau de mer, avant de se rouler dans le sable. Quand je descends pour l'aider, Tom peste de plus belle. Et Milo, lui, n'en fait qu'à sa tête. On finit par le traîner jusqu'au bain, où il se laisse chouchouter. Tom pendant qu'on savonne Milo me raconte la balade et son acte de bravoure. Ce dernier aurait secouru une jeune demoiselle en détresse qui manquait de se noyer. Enfin, ça, c'est sa première version. Il sait très bien que je ne le crois.

« Bon la véritable version des faits est bien moins glamour. Mais je crois que c'est ce que tu attends quand même. ».

Il a l'air tout penaud, alors que vraisemblablement je me moque un peu de comment Milo a pu finir dans cet état. Je laisse donc mon ami raconter la véritable version des faits sans se faire passer pour un héros.

« Euh donc on était sur la plage. J'ai reçu un sexto d'une des filles d'hier soir et j'en ai lâché la laisse de Milo. »

Je m'esclaffe de rire, je n'attendais rien d'autre venant de Tom, qui reprend un fois que je suis calmé.

« Milo en a profité pour aller prendre un bain dans la mer, sans se soucier des promeneurs et sa laisse s'est enroulé autour de la cheville d'une nana qui avait fini son jogging. Sauf, qu'elle était pétrifiée par Milo et c'est moi qui ai dû la lui enlever. Puis elle s'en est allée avec un simple merci et toute mouillée. Quelle ingrate ! ».

Je ris de plus belle.

« Pauvre petit Tom, tu n'as pas eu ta récompense de héros. ».

Je lui tapote l'épaule avant d'attraper une serviette pour commencer à sécher Milo. Je sors de la salle de bain, quand j'entends mon coloc balancer « De toute façon elle était quelconque et sauvage. Ca ne m'intéresse pas ! ». Traduction : j'en aurai bien fait mon goûter.