Fyctia

- Ah oui. Tu verras, ils t’expliqueront tout ça mieux que moi en cours, » dit Dimitri en haussant les épaules, comme si cela n’avait aucune importance.

Céleste secoua la tête, ses pensées tourbillonnant.

« Tu crois vraiment que je vais continuer à jouer le rôle de l’élève ? Je ne vais pas aller en cours, Dimitri. Je ne vais pas simplement oublier ce qu’il s’est passé : ma vie, la guerre, le coma, les ténèbres… pour jouer une vie qui n’est pas la mienne. Je dois reprendre ce qui est à moi, mon royaume, mes pouvoirs, vaincre Umbriel… Me venger -

- Et c’est exactement ce que tu feras, affirma-t-il doucement. Tu feras tout ce que tu souhaites, et je t’aiderai. »

Il prit sa main, la chaleur de son contact apaisant un instant le tumulte intérieur de Céleste.

« Mais tu n’y arriveras pas en fonçant tête baissée. Ce que tu veux accomplir demandera de la patience. Tu dois aller en cours, apprendre ce qu’est devenu notre monde, comprendre l’histoire des royaumes et la magie des Siphons. Tu dois maîtriser tes pouvoirs, apprendre la discipline, et surtout, te faire des alliés. Comprendre qui sont tes ennemis.

- Et toi, tu vas m’aider ? demanda-t-elle, sceptique.

- Oui, » répondit-il sans hésitation, avec une certitude désarmante.

Ses paroles semblaient douces comme du miel, mais Céleste ne pouvait s’empêcher de se méfier. Dimitri avait peut-être été bienveillant jusqu’à présent, mais elle savait que personne n’agissait sans intérêt.

« Qu’est-ce que tu y gagnes ? » demanda-t-elle, son regard perçant, comme si elle tentait de lire dans ses pensées.

Il laissa échapper un léger rire amusé, puis claqua la langue, réfléchissant à sa réponse.

« Tu réfléchis au mensonge que tu vas me sortir ? » ajouta-t-elle d’un ton sarcastique, croisant les bras.

Un petit rire sorti de la bouche de Dimitri, il secoua la tête en souriant.

« Tu étais beaucoup plus timide et fragile quand je t’ai récupérée. Tu sais, dans les livres, on te décrit comme un ange. L’héritière de la lumière, douce, gentille, compatissante, aimante. »

Céleste soupira, massant ses tempes, le poids de tout ce qu’elle avait traversé rendant ce portrait d’elle presque ridicule.

« Bon, j’arrête, je vais répondre à ta question, dit-il finalement, son ton devenant plus sérieux, Sur un plan plus personnel, j’attends de toi que tu me laisses siphonner un peu de ta magie. »

Céleste fronça les sourcils.

« Siphonner ma magie ? Pourquoi ?

- Vois-tu, continua-t-il, je ne suis lié à aucun élément. Mais tout le monde croit que je suis lié à la lumière, car lors de la cérémonie, j’ai versé mon sang sur ton cristal.

- Ça aurait dû te lier à moi, répliqua-t-elle, perplexe.

- Non, parce que ce n’est pas mon élément, expliqua Dimitri, d’un ton plus grave.

- Les Siphons n’ont pas d’éléments, ils sont nés sans magie. »

Il soupira légèrement.

« Tu as vraiment beaucoup à apprendre. Vous les héritiers sous-estimiez les Siphons et leurs capacités. C’est à cause de cette ignorance qu’Umbriel a réussi à renverser le pouvoir. Les Siphons sont nés sans pouvoir mais ils sont tous affilés à une des sept pierres élémentaires »

Céleste se laissa tomber sur le matelas, ses yeux fixés sur le plafond, essayant de digérer ces nouvelles informations. Sa tête lui faisait mal, comme si son cerveau luttait pour comprendre quelque chose qui lui échappait.

« Tu comprendras tout cela bientôt, dans les cours d’histoire sur les sept royaumes, poursuivit-il, adoucissant son ton.

- Donc, tu m’as libérée juste pour siphonner mon pouvoir ? demanda-t-elle, un soupçon de colère dans la voix. Tu ne vaux pas mieux que les autres… Tu as vu ce que ça me fait quand on me siphonne. »

Dimitri grogna, visiblement irrité par la comparaison.

« Je ne t’ai pas libérée seulement pour ça, protesta-t-il. J’aspire à un plan bien plus grand. »

Il s’approcha d’elle, ses yeux brillant d’une étrange détermination. « Quand j’ai compris que tu étais la source du cristal de lumière et non la pierre élémentaire, j’ai su que je devais intervenir. Appelle ça le complexe du héros si tu veux, mais je n’ai pas pu supporter de voir notre monde sombrer ainsi. Si nous continuons sur cette voie, tous les royaumes finiront comme Funestia. Il faut rétablir l’équilibre, arrêter Umbriel. Mais seule la lumière peut vaincre l’obscurité. »

Il posa délicatement sa main sur son bras, un contact presque apaisant. Céleste frissonna, mais ne le repoussa pas, trop absorbée par ses mots.

« Alors j’ai besoin du pouvoir de la lumière, reprit-il doucement, mais pour que je puisse vraiment fair le poids contre la menace, je dois puiser directement en toi. Je te promets que cela ne te fera pas mal. J’ai appris à être subtil. Les hôtes ne sentent rien quand je leur prends du pouvoir »

Céleste sentit la chaleur de la main de Dimitri caresser son bras, un geste réconfortant. Elle le regarda, cherchant à comprendre ses véritables intentions. Était-il sincère ? Les ténèbres qu’elle avait affrontées étaient encore trop présentes dans son esprit pour qu’elle accorde sa confiance aveuglément.

« Je t’ai sauvée parce que je ne pouvais supporter ce que tu endurais, c’était si cruel… J’espérais aussi que tu pourrais m’aider à combattre la menace qui plane sur les sept royaumes. Je veux tous nous sauver du destin funeste qui nous attend. »

Dimitri lâcha doucement le bras de Céleste. Cette dernière se redressa, se hissant lentement jusqu’à être assise. Le garçon leva alors la main, et une douce lumière en émergea. De petites étoiles dorées apparurent dans l’air, flottant autour d’eux, leurs reflets dansant dans ses prunelles. Céleste tendit un doigt vers l’une d’elles. Lorsqu’elle la toucha, une chaleur réconfortante envahit son être, dissipant un instant le froid qui s’était logé au fond de son cœur.

« Je ne te forcerai à rien, continua Dimitri d’une voix calme, mais pleine d’intensité. Tu connais mes intentions. C’est à toi de choisir si tu veux m’aider, te lancer dans cette aventure. »

Céleste, encore éblouie par la scène, observait le garçon sous un jour nouveau. Il n’était plus seulement son sauveur à ses yeux, il était devenu celui qui pourrait sauver ce monde. Malheureusement, une autre lumière commençait à crépiter en elle, plus sombre, plus féroce. Elle aurait dû vouloir la paix, l’équilibre. Après tout, elle était l’héritière de la Lumière. Elle aurait dû accepter pour la cause la plus noble : préserver l’harmonie des royaumes. Mais alors que ses lèvres se pincèrent et que sa tête hochait lentement en signe d’accord, la véritable raison brûlait comme une flamme noire en son cœur. Ce n’était pas pour les sauver qu’elle disait oui. C’était pour se venger. On lui avait tout pris. On avait brisé son passé, réduit sa vie en cendres.

Et tandis qu’elle jurait intérieurement devant les sept déesses, elle savait que si elle devait mettre le monde à feu et à sang pour que justice soit faite, elle le ferait sans hésiter.

« Par où on commence ? »