Fyctia
Chapitre 2
La musique résonnait doucement dans les jardins, se propageant entre les arbres et les parterres fleuris. Les étudiants, vêtus de leurs uniformes d'étude, commençaient à se rassembler, leurs voix se mêlant au murmure du vent. Les Veilleurs, postés à des endroits stratégiques, formaient un cercle protecteur autour de l’école.
Une brise estivale, douce et parfumée, soulevait l'odeur sucrée des fleurs en pleine floraison, ajoutant une touche de sérénité à l’atmosphère. Mais alors que l'immense horloge de la cour sonna dix-sept heures, son tintement profond résonna comme un écho sinistre. Ce son fit frissonner le grand jeune homme à la silhouette élancée, dont les lunettes glissèrent légèrement sur le pont de son nez. Nigel.
Malgré la mélodie apaisante du piano et le chant mélodieux des cordes, il était en proie à une inquiétude palpable. Ses mains tremblaient légèrement, et une fine pellicule de sueur perlait à la base de sa nuque, non seulement à cause de la chaleur étouffante de ce jour d’été, mais aussi à cause de l’angoisse qui le tenaillait.
Le dernier élève de troisième année manquait à l'appel. Sa magie, habituellement fiable, l'avait trahi cette fois. Dans sa main, la carte des Sept Royaumes était froissée, témoin de ses multiples tentatives infructueuses pour localiser le jeune garçon. Trois explications possibles traversaient son esprit, chacune plus inquiétante que la précédente.
La première, la moins probable, était que Dimitri avait érigé des barrières magiques pour se dissimuler, mais cela surprenait Nigel, car les protections de Dimitri étaient toujours imparfaites. La deuxième hypothèse, plus inquiétante, était qu'il se trouvait dans le royaume maudit de Funestia, un endroit où même les sorts les plus puissants étaient détournés et rendus inutiles. La dernière, et la plus terrifiante des hypothèses, était qu'il soit mort, mais mieux valait ne pas y penser.
Par les déesses, s'il avait été assez stupide pour se rendre à Funestia...
Nigel traversa le pont qui surplombait le plan d'eau scintillant de Nyxeria, se frayant un chemin à travers les étudiants rassemblés, leurs murmures s'estompant à mesure qu'il progressait.
Il monta les marches de marbre blanc menant à l'entrée majestueuse de l'école, ses pensées tournées vers la tâche qui l'attendait. Au sommet, il retrouva Dame Morgana, la directrice de l'école. Elle se tenait là, imposante et sereine, telle une gardienne de ce lieu sacré. Sa robe bleu nuit ondulait légèrement sous la brise, contrastant avec l'éclat de ses cheveux blancs.
Morgana était absorbée par la contemplation de l'immense horloge du château, dont les aiguilles ornées de runes semblaient avancer au rythme des battements du cœur de l'école elle-même. La cérémonie était imminente. Nigel sentit un nœud se former dans son estomac. Seigneur, devait-il mentir pour éviter le pire ?
« Madame. »
La voix de Nigel était à peine plus qu'un murmure, mais elle perça le silence. La directrice se tourna lentement vers lui, ses yeux perçants le fixant avec une intensité qui le fit vaciller. Il passa une main nerveuse dans ses cheveux bruns, cherchant à masquer son embarras.
« C'est à propos de votre fils, » dit-il, sa voix trahissant une anxiété mal dissimulée.
Nigel fut interrompu par l'apparition soudaine de deux adolescents à ses côtés. Son cœur manqua un battement lorsqu'il aperçut Dimitri, en uniforme, parfaitement indemne, sans la moindre égratignure. La tension qui pesait sur ses épaules s'allégea quelque peu, mais son attention fut rapidement captée par la jeune fille qui accompagnait le garçon.
Dimitri, malgré la situation, semblait à l'aise, presque détendu, tandis qu'il adressait un regard confiant à sa mère, la directrice. La jeune fille à ses côtés était frappante : ses longs cheveux blonds encadraient un visage à la fois délicat et mystérieux. Ses yeux d'un bleu envoûtant brillaient d'une lueur mélancolique, comme si un lourd fardeau pesait sur son âme. La douceur de ses traits contrastait avec la détermination qui émanait de son regard, une force intérieure qu'elle semblait dissimuler sous une apparence fragile.
« Désolé, mère, une élève semblait s'être perdue. Mais nous sommes prêts, » déclara Dimitri avec assurance.
Dame Morgana s'apprêtait à le réprimander, mais les mots restèrent coincés dans sa gorge lorsqu'elle croisa le regard de la jeune blonde. Nigel, encore sous le choc de cette rencontre inattendue, consulta rapidement sa liste.
« Tu dois être la première année qui manquait, fit-il en fixant la jeune fille. Vesperia, c'est bien ça ? »
La jeune fille entrouvrit timidement les lèvres pour répondre, mais Dimitri la devança en posant une main rassurante dans son dos.
« C'est ça. C'est Vesperia, confirma-t-il. Je vais l'amener avec les autres à la cérémonie des nouveaux arrivants. »
Ils s'éloignèrent des adultes, et tandis qu'ils marchaient, la jeune blonde se crispait légèrement, ses doigts se serrant en un poing discret. Son regard se perdait dans l'immensité des terres du royaume, une étendue vaste et majestueuse qui, à cet instant, lui semblait hostile. Dimitri, observant cette réaction, se demandant ce qu'il pouvait bien se passer dans la tête de la jeune fille.
Doucement, il lui prit la main, cherchant à l'apaiser.
« Jusqu'au coucher du soleil, tu te souviens... »
Ils avaient passé un pacte. Il avait besoin qu'elle l'écoute et suive chacune de ses directives. En échange, il lui promettait des explications, mais seulement lorsque le soleil disparaîtrait à l'horizon. Elle avait insisté pour sceller leur accord par la magie, un lien indéfectible qui se manifesta par un tatouage fin et noir sur son poignet, représentant un soleil. Ce symbole disparaîtrait une fois le pacte honoré.
Se forçant à se détendre, elle déclara d'une voix à peine audible :
« Vesperia est un nom horrible... » souffla-t-elle.
Dimitri, approchant son visage du sien, murmura à son oreille, provoquant un léger frisson le long de sa nuque.
« Ne t'en fais pas, en privé, je t'appellerai par ton vrai prénom, Céleste. »
Ces mots, doux et rassurants, semblaient néanmoins porteurs d'une ombre que seule Céleste pouvait percevoir.
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Il y a 7 mois