Fyctia

- S’il lui arrive quelque chose, vous aurez à faire à mes avocats.

Rachel me regarde intensément. Est-ce que mes menaces sont vraies ? Je ne rigole pas avec ce genre d’histoire. Revoir ses expressions tristes ne sont plus d’actualité. Cette période a été difficile pour tout le monde. Cinq ans pour retrouver le véritable sourire de notre petite sœur. Beaucoup de séances avec un psychologue et du temps à se débrouiller toute seule. Comme une enfant qui a peur du noir.

Je sors sans attendre un mot de plus de la part du directeur. Je croyais qu’avec l’argent on pouvait tout acheter. J’avais tort sur certaines choses. Rachel va devoir prendre sur elle, mais il va falloir que je trouve un moyen de les séparer, ces deux-là. Mes mains serrent le volant d’une force que je ne maîtrise pas. La dernière fois que je l’ai fait, je ne veux plus y penser. Pourtant, je ressens ce sentiment. M’énerver ne va résoudre à rien. J’aurais dû continuer les cours de boxe.

J’arrive en quelques minutes à mon bureau. L’immeuble dont le nom Walker est marqué ressemble à un entrepôt customisé pour que chaque employé se sentent comme chez eux. Ce visuel ou devant on voit les vitres montrer les bureaux de réunions. C’est tout derrière ou ça se joue. On garde le mystère jusqu’à la date limite du défilé. Il arrive que des tenues ont fuitées. Dans la limite, ce sont des influenceurs qui dévoilent nos bureaux sans faire attention. Les contrats sont clôturés et nous choisissons ceux en qui nous avons le plus confiance.

Ma secrétaire m’accueil tout en me donnant mon planning que j’ai à faire aujourd’hui. J’ai des rendez-vous avec des magazines l’après-midi. Des photos à prendre pour la promotion. Retrouver des mannequins pour préparer la surprise que le monde entier attend lors de chaque défilé. Une tenue spéciale en harmonie qui défend les droits de l’humanité. Elle n’est pas prête. Le défilé approche à grands pas. Le stress augmente et je suis en train de me demander si je ne vais pas abréger ses rendez-vous pour que je puisse avoir plus de temps pour m’y consacrer.

- Mon rendez-vous de ce matin est arrivé ? demandé-je en vérifiant sur le papier.

- Oui monsieur Walker, elle vous attend dans votre bureau comme chaque mercredi.

- Bien, je veux que vous veniez dans mon bureau dans cinq minutes avec un café noir, trois doses de sucres et le dossier du nouveau stagiaire.

- Bien monsieur Walker.

Cette personne qui attend dans mon bureau endure comme chaque année, mes crises lorsque le défilé approche et rien n’est toujours prêt. Aujourd’hui, je dois me prendre en main et me retrouver seul pour réfléchir à comment est-ce que je vais terminer cette tenue. Je croise beaucoup de monde qui déambule dans les couloirs. Comme tout bon citoyen, je salue mes coéquipiers qui travaillent d’arrache-pied.

Mon cœur palpite. Ma respiration devient courte. Cette femme m’a beaucoup aidé depuis le début du lancement de ma marque. Elle a vu le potentiel que d’autres n’ont pas remarqué. Pourtant, je me sens faible à ses côtés. Je ne pense pas que ça soit de l’amour. Elle qui le croit dure comme fer. Une relation interdite. La soumission et des chantages.

- Bonjour Madame Gonzales, je suis navré. Je ne vais pas pouvoir vous garder longtemps aujourd’hui.

- Oh bonjour mon lapinou, sourie-t-elle lorsque j’ai fermé la porte de mon bureau pour qu’on soit tranquille. Nous avons tout notre temps pour parler de ce défilé. Je suis sûr que beaucoup de personnes voudront me voir défiler après tant d’années d’absences.

Elle s’approche de moi de sa façon gazelle. Ses câlins m’apaisent. Nous ne sortons pas ensemble. Pourtant, je me sens hypnotisé.

Ma secrétaire entre tout en apportant ce que je lui avait demandé. Mme Gonzales recule et sourit.

- Je vais y réfléchir, dis-je en récupérant les dossiers pour les nouveaux stagiaires. J’ai beaucoup de boulot qui m’attend. Nous nous retrouverons la semaine prochaine pour en reparler.

- J’espère bien, sinon il se pourrait que ce défilé soit annulé.

Ces menaces me font mal au cœur. Ainsi, j’ai plus l’impression qu’elle n’est là pour sa gloire. Cette vieille femme de quarante ans, qui a le même âge que ma mère, est indispensable pour la survie de la marque Walker. Je sais que c’est mal. Qui pourrait m’aimer avec tout ce que j’ai fait.

- Merci beaucoup Séria, soupiré-je en m’asseyant à mon bureau.

- Je vous en prie Auden, c’est mon devoir de secrétaire.

Qu’est-ce que je vais faire maintenant ? Je ne peux en parler à personne. Le boulot est plus important en premier.