Fyctia

— Adrian attends-moi ! m’écrié-je à sa poursuite.

Lincoln me relâche lorsque ses potes le rejoignent. J’entre dans le bâtiment et une foule d'étudiants m’empêchent d’avancer. Le panneau d’affichage est surbooké. Adrian disparaît derrière le couloir qui mène à la bibliothèque ou les salles de cours. Mon grand frère de deux ans d’écart est une branche à mystère. Il ne parle pas beaucoup avec les trois autres. Adrian ne s’efforce pas pour garder un semblant de contact avec nous. À l’appartement, il s’enferme dans sa chambre. Il sait aussi que nos frères abusent de la façon de gérer son emploi du temps. Le métier de couturier est très long. C’est un processus lent. Le résultat est parfait à la fin. Mes frères sont fiers dès que ça prend forme. La réalité est impressionnante et j’ai dû faire face à ce grand succès. Ma famille s’est vue monter les échelons jusqu’à habiter parmi les personnes les plus riches au monde. J’aurais préféré être une simple famille comme les autres.

Au moment où je vais tourner pour rejoindre Adrian, on m’empêche d’aller plus loin. Boule de neige me regarde d’un sourire gêné.

- Ils viennent de mettre une annonce sur le panneau d’affichage, ça ne va pas te plaire.

- J’ai autre chose à m’occuper avant de reprendre ma vie d’étudiante.

- Courir après Adrian Walker est un rêve surréaliste, il ne se laisse pas approcher si tu n’es pas un membre de sa famille.

- Ne t’inquiète pas, je ne suis pas n’importe qui pour eux. Pourquoi venir me voir ? J’y serai allé à la pause déjeuner.

- Je pensais que tes amis te le diraient mais ils viennent de quitter la fac.

- Ils pensent que je sors avec toi maintenant que tu me cours après, marmonné-je en soupirant. Je vais aller voir puisqu’il n’y a presque plus personne devant le panneau d’affichage.

Lincoln a raison. Je viens de voir une de mes amies sortir du bâtiment et de ne pas prendre la direction des salles de cours. J’en ai l’habitude car je suis moins présente pour les sorties de groupes. Mes frères refusent que je participe dès qu’il y a beaucoup de garçons. Eux ne comptent pas, mais c’est difficile de parler d’autres choses de moins gênant.

Les affiches sont des fois importantes et se trouvent non loin du secrétariat et du bureau du directeur. Les clubs sont toujours là en cas si un étudiant est intéressé, ou lorsqu’un nouveau arrive. Généralement, ce sont les pièces de théâtres les plus populaires. Dire qu’on attend de quoi nos amis inscrits sont capables d’aller jusqu’au bout.

J’observe ce bout de papier dont les duo pour les exposés du cours de philosophie sont affichés. Mes pensées sont mises sur pause. Je croyais que le directeur savait ce qu’il faisait. Enfin, il n’a pas écouté les recommandations des garçons.

- Je ne vois pas ton nom, me dit boule de neige une main sur mon épaule pour déchiffrer la feuille. On m’a dit qu’il ne fallait jamais que tu sois avec un garçon.

- Mon nom de famille ne t’a pas fait comprendre quelque chose ?

- Je ne te trouve pas dans la liste, dit-il honnêtement. Tu es Rachel Waller ?

- Walker.

- Oh, dit-il surpris. Tu es avec moi pour l’exposé. Je croyais que c’était une autre personne.

- Ce n’est rien, il faut juste que les garçons ne l’apprennent pas.

- Tu as un plan pour ça ? me demande-t-il alors que nous nous éloignons.

- Je dois essayer de trouver Adrian avant la fin de la journée. Sinon je peux dire adieu à l’exposée avec toi.

Nous nous approchons de la bibliothèque universitaire. Je regarde à travers les rayons de livres. Lincoln surveille les tables mais aucun signe de mon frère. Heureusement que c’est le seul qui est encore dans les études. Pourtant, il passe son temps dans la couture.

- Je ne pense pas qu’on va le trouver ici, m’assure boule de neige après avoir tout observé.

- Je crois savoir où il est, dis-je en m'enfuyant de cet endroit au plus vite.

- Tu vas ou comme ça ?

Lincoln me rattrape en quelques pas. Je l’ignore dès qu’il repose la question. Il décide de me bloquer devant lui par son torse que je me prends en plein visage. Boulé de neige a descendu trois marches pour être à ma hauteur. Ses bras me tiennent en place afin que je ne tombe pas en arrière.

- Je suis quelqu’un de patient, déclare-t-il alors que ses mains serrent mes hanches. Et je deviens têtue si je n’ai pas de réponse à mes questions.

- Désolé. Je n’ai pas fait attention que tu me suivais toujours.

- Donc ?

Des élèves nous regardent juste en jetant un coup d’œil. Je me sens gênée. Lincoln est le garçon le plus gentil au monde et je ne fais pas attention à ce qui m’entoure. Avec son visage qui arrive parfaitement devant le mien, on peut penser que nous nous embrassons. Je vais devoir prouver à mes frères qu’ils peuvent me faire confiance jusqu’à ce qu’on passe pour l’exposer. Tous les hommes ne sont pas mauvais et Lincoln va pouvoir m’aider.

- Il doit être dans sa pièce spéciale que tout le monde ne connaît pas. Seuls les professeurs et la direction le savent. Il l’utilise généralement pour ses créations personnelles.

- Allons-y avant qu’il ne soit trop tard.

- Merci.

Lincoln me tend sa main. Je la prends avec délicatesse, comme si tout ceci n’était qu’un rêve. Je ne veux pas le voir partir de mon entourage. Savoir qu’aucun de mes frères peuvent savoir ce qu’ils se passent lorsqu’ils ne sont pas là me fait du bien. Mais je serais toujours sous surveillance quoi qu’il arrive. Le directeur de l’université est en conflit sur les règles avec mes frères. La mixité sûr des projets à plusieurs n’est pas un option lorsqu’on s’appelle Walker.

Le temps nous est précieux lorsqu’on veut retrouver une personne. Mes frères bougent dans les quatre coins de la ville. Ce n’est pas de la rigolade. Beaucoup de travail et d'acharnement pour arriver à ce résultat. Nous arrivons devant la pièce où Adrian se cache. La porte est fermée.

- Mince, j’étais sûr qu’il serait ici.

- Pourquoi le placard à balai au sous-sol ? demande-t-il accoudé contre l'entrée.

- Si tu observes bien, dis-je en le prenant pour lui montrer le fond de la petite pièce, il y a une porte dissimulée. Personne ne peut ni entrer ni sortir.

- Je ne l’avais jamais remarqué avant, observe-t-il attentivement. C’est comme une énigme.

- Je n’ai pas fait attention lorsqu’il m’a emmené la première fois. Maintenant, je n’ai plus qu’à lui envoyer un message.

- On va se poser au réfectoire ? Comme ça nous pourrons parler du sujet de l’exposé.

- On doit le rendre quand ? demandé-je alors que nous sortons du sous-sol de l’université.

- Dans trois mois, si je me souviens bien.

- Donc ça me laisse un peu de tranquillité pour préparer les défilés que ce devoir.

- Ce devoir compte pour la dernière note du trimestre qui va déterminer si nous pouvons continuer nos études philosophiques. Je pense qu’on ferait mieux de commencer maintenant.

- Tu ne vas jamais me laisser ?

- Pas avant que nous nous débarrassions du projet. Peut-être même que je vais faire en sorte que nous soyons les meilleurs amis.