Fyctia
Chapitre 1.5
— Vous êtes mal renseignés, monsieur le porte-parole, rétorque Eskander sans parvenir à masquer son agacement. Je suis un Chasseur, comme vous dites. J’épie les Déviants renégats, je les traque, les capture, et j'assure leur livraison, le tout contre des euro-dollars sonnants et trébuchants. Je n’enquête pas. Et puis, au vu de la faible considération que me porte monsieur Kum, pourquoi me confier une mission aussi cruciale ? Vos bureaux regorgent de jeunes enquêteurs aux dents qui rayent le parquet.
— Impossible de confier une telle tâche à un Déviant, vous avez raison. Et pourtant, seul un esprit atypique, non conforme, est capable de comprendre les motivations d'un cerveau malade. Nous sommes face à un paradoxe dont vous êtes la solution, car vous êtes précisément le seul Déviant à n’être pas suspect dans cette affaire.
— Vous dites cela parce que ma propre mère a été tuée ? Quel cynisme.
— Logique élémentaire, dit cruellement Abel Kum. J’ai tout même pris quelques renseignements, vérifié vos relations. Tout m’a semblé en ordre, et j’ai autorisé Simon à vous approcher.
— Alors, qu’en dites-vous ? insiste Simon. Nous vous fournirons une couverture convaincante et un Pass énergétique adéquat. Toutes vos dépenses seront assurées par nos services. Si vous menez votre mission à bien, et si vos renseignements mènent d’une façon ou d’une autre à la capture du commanditaire, vous serez grandement récompensé. Nous pourrions envisager, pour commencer, une relocalisation dans le Condo de votre enfance, qu'en dites-vous ?
Simon Doucet le regarde avec attention, essayant de percer à jour les secrets de son âme, ses désirs les plus profonds. Eskander ne peut réprimer son trouble.
— Nous n’avons pas toute la journée, s’impatiente Abel Kum. Acceptez-vous ?
— Ai-je seulement le choix ? réplique Eskander.
— Pas vraiment, je le crains, dit Simon Doucet. Un refus de votre part serait considéré comme un aveu de culpabilité. Nous serions contraints de vous mettre en examen pour complicité de terrorisme.
— Je peux vous garantir que vous ne reverrez pas de sitôt la lumière du jour, précise Abel Kum, un sourire carnassier sur le visage.
— Très bien, soupire Eskander. Vous avez dit plus tôt avoir identifié le terroriste ?
— Il s’appelle Sobek Zhang, répond aussitôt Simon.
— Ce nom ne me dit rien.
— Peut-être pas, dit Abel, mais vous partagez un certain nombre de points communs.
Eskander envisage un instant de fondre sur Abel Kum, et d’enfoncer son poing dans sa face de serpent desséché. Le regard désespéré et implorant de Samuel l’en dissuade.
— Nous voulons des réponses, et vite, dit brusquement Abel Kum. Qui a fourni à ce Sobek les moyens de concevoir un engin explosif improvisé, de franchir 14 postes-frontières sans se faire prendre, de pénétrer dans l’Académie en s’affranchissant du système de sécurité, puis de se faire exploser. Le timing n'était pas son fort, l'acte aurait pu avoir des conséquences dramatiques. Il n’a pas agi seul, c’est tout bonnement impossible. Quelqu’un l’a aidé, c'est évident. A vous de le découvrir.
— Si je peux me permettre ...
Le teint maladif de Samuel surprend Eskander. Il ne l'a jamais vu aussi mal en point.
— Il y en a peut-être d’autres, murmure-t-il, avec angoisse. D’autres élèves Déviants, prêts à intégrer l'Académie, dans le seul but de commettre des crimes tout aussi abominables ! Cet acte était peut être un essai, un genre d'avertissement macabre. Je n'ose imaginer qu'un tel attentat se reproduise, dans une école pleine à craquer. Eskander, tu dois trouver les responsables et les mettre hors d’état de nuire !
— Ça tombe bien, remarque Eskander d'un ton las. Voilà qui est pile poil dans mes cordes.
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Marie Andree
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Mary Lev
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Il y a 8 jours
Gottesmann Pascal
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Il y a 19 jours
Mary Lev
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Il y a 8 jours
NohGoa
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Il y a 20 jours