Fyctia

Point de vue de Steeve.

Mon père arrive, il a une heure de retard, je ne pensais pas qu'il mettrait autant de temps à revenir de son voyage en amoureux. Argh, que cela me dégoûte. L'amour n'existe pas, ce n'est qu'une illusion que l'on a inventé pour faire croire que les humains sont faits pour s'entendre, mais il n'en est rien. Les humains, en vrai, ne sont pas foutus de vivre ensemble sans se taper dessus. Bref, je ne supporte pas les hypocrites qui parlent d'amour comme si c'était quelque chose de fabuleux. Tous les couples s'engueulent, la plupart se sépare et presque un mariage sur deux finit en divorce. Je suis bien mieux seul, à enchaîner les conquêtes d'un soir. Au moins, pas de prise de tête, le contrat est posé dès le début. Juste un moment charnel entre deux personnes sans suite. Il m'est déjà arrivé de voir la même fille à plusieurs reprises, mais cela reste un plan cul, rien d'autre. Si l'une d'elles à le malheur de me sortir qu'elle a des sentiments, je la ban.

Mon père prend ma place. Il semble encore sur son petit nuage. Je claque des doigts et le ramène à la réalité.

— Je te signale que tu ne dois pas te reposer sur tes lauriers. Tu as une banque entière à faire tourner. Je ne peux pas te remplacer continuellement. J'ai déjà dû me taper tes rendez-vous de la matinée. Au cas où que tu aurais oublié, je ne suis ni banquier, ni conseiller. J'ai un travail à temps plein qui me prend tout mon temps. La prochaine fois, rentre de ton petit séjour débile la veille, cela ne m'obligera pas à me taper des idées de projets totalement stupides. Entre celui qui voulait créer son propre parc d'attractions et l'autre qui voulait faire construire un château fort comme au Moyen-Âge pour faire des vidéos sur YoTobe.

— Ils ont des rêves et des projets, je trouve ça génial. Dis-moi quels sont tes projets Steeve? Tu n'en as aucun. Tu as ton propre cabinet mais cela ne va pas au-delà de ça. Tu aurais pu faire chirurgien et non, toi tu préfères prendre le métier le plus facile, le moins glorieux.

— Mon métier est glorieux. Mais tu ne peux pas comprendre, tu ne les aimes pas.

— Ce n'est pas de ma faute. Tu ne pourras jamais me changer. Et, tu as retenu certains projets?

— Non, aucun.

— Même la jeune femme avec sa pâtisserie? Elle m'avait envoyé ses plans, je les trouvais vraiment sympathiques.

— Non, elle n'a pas le profil pour ce genre de projets. Elle est beaucoup trop fragile. Elle n'a pas réussi à passer le second test. Enfin, en quelque sorte.

— Comment ça?

— Elle a claqué la porte du bureau, j'ai bien cru qu'elle allait se briser et avant de partir, elle m'a insulté de connard.

— Oh, joli caractère.

— Laisse tomber, elle n'a pas assez de force pour mettre en œuvre un projet, elle n'a même pas essayé de me forcer à regarder ce qu'elle avait fait et ce pour quoi elle travaille depuis des mois. Elle n'a aucune force de caractère et tu sais très bien qu'il en faut pour mettre à terme un projet, elle n'est pas assez déterminée et elle se laisse trop facilement marcher dessus.

— Je te fais confiance, mon fils. J'espère simplement que tu ne t'es pas trompé. J'aimais beaucoup son projet.

— Pourtant, tu n'y gagnes pas beaucoup.

— Ce genre de choses peut être négocié.

— Je sais. Bon, je vais te laisser. Certains patients risquent de souffrir plus longtemps qu'il ne le faut par ta faute. Je dois être à la clinique dans une dizaine de minutes.

Je sors de la compagnie et prends ma moto. Je speede sur la route pour arriver à l'heure. Certains humains sont déjà présents devant la porte de la clinique. Je m'arrête et gare ma moto avant d'ouvrir la porte et d'inciter mes patients à entrer.

— Ne vous inquiétez pas, je suis à vous dans quelques minutes seulement, laissez-moi juste me laver les mains et me mettre des gants.

Je fais exactement ce que viens de dire avant d'appeler mon premier patient.

— Alors, aujourd'hui, je commence avec... Tommy! Allez, viens là mon pote.

Tommy court jusqu'à moi et me fait un câlin. Je l'emmène dans ma salle et commence à l'ausculter. Au bout d'une vingtaine de minutes, mes collègues et employés arrivent à la clinique. Ils prennent chacun leurs patients. À la fin de la journée, mon dernier patient me fait un bisou. Je ris en voyant cette bouille adorable me remercier. Je lui offre alors une friandise comme à chaque visite.

— Allez mon Grand, fais attention à toi. Je ne veux pas te revoir avant ton prochain contrôle.

Je lui frotte la tête et ôte mes gants avant de les jeter dans la poubelle cachée dans l'une des portes des placards de la salle d'examen. Mes employés quittent ensuite un à un leur lieu de travail. Voilà une journée bien remplie comme à son habitude, c'est ça d'avoir la meilleure clinique de la ville et des environs. Après avoir tout vérifié, je ferme la clinique et enfourche mon bolide pour me rendre à mon bar préféré: Stars. J'ai prévu de passer la soirée avec Léo, mon meilleur ami. Pas de fille pour cette nuit, non, plutôt une soirée chill avec mon meilleur pote. Je gare ma moto sur le parking en arrivant et enlève mon casque. J'entre ensuite à l'intérieur du bar où le patron ne met pas de temps à me faire un signe. Je suis un véritable habitué, j'ai même le pass VIP. Je m'assois à ma table fétiche, là où est déjà assis Léo.

— Yo, mon pote, alors? Quoi de beau?

— Yo! Oh, tu sais, la routine. Avec Amélia, c'est toujours le parfait amour et nous avons décidé d'emménager ensemble.

Amélia? C'est sa petite amie, ils sont ensemble depuis quatre ans. Ils vont enfin vivre ensemble, j'attendais qu'il me le dise. Ils ont mis tellement de temps à se décider. Je crois bien que c'est le seul couple qui me fait espérer que l'amour existe vraiment. Enfin, si je ne compte pas le couple de mon père, mais après avoir vécu un divorce, il fait forcément plus attention. Même si pour moi, sa meuf n'est qu'une michto qui n'en veut qu'à son fric. Je feins un vieux sourire sur mon visage pour lui montrer que je suis heureux pour lui, même si je ne comprends pas la raison de son engouement autour de l'amour avec sa petite copine. Je suis seul et je suis très bien. De plus, l'avantage à avoir un plan cul au lieu d'une nana qui nous colle sans cesse, c'est que je n'ai pas de cadeau à offrir, ni faire semblant. Si je suis de mauvaise humeur, je n'ai qu'à la dégager et je ne suis même pas obligé de lui donner une raison valable. C'est ça, la liberté.

— J'ai bien compris mon cher Steeve que tu ne pouvais pas me comprendre, alors enlève-moi donc ce sourire hypocrite de tes lèvres.

— Je suis vraiment content pour toi si ça se passe bien avec Amélia et elle est gentille, je ne dis pas le contraire, mais tu ne regrettes pas l'époque où tu pouvais aller à droite et à gauche sans problème? Je veux dire, c'était vraiment cool, non?

— C'était bien quand on était à l'université, mais maintenant, on a l'âge de se caser et de fonder une famille.