Fyctia
Chapitre 4 — partie 4/4
Le temps file. Elle peste, s’agace. Son sac vole contre le mur. Son contenu se répand. Elle souffle, tombe à genoux et ramasse ses affaires. Introuvables. Un bruit mécanique brise le silence : six chants d’alouette. Dès que l’oiseau regagne sa cache, sa montre vibre.
Il s’agit de Zoé.
— Hello ! Élo !
— Re ! Bonne journée ?
— Hormis que ma sœur a fini en taule, ça va !
Élodie se jette sur son canapé tout en narrant sa journée : la rencontre avec Stéphane, l’essai de l’IA, la scène sanglante, la dispute avec l’agent de sécurité, l’éclair du taser, la cellule et même le junkie. Elle grogne contre l’absence de Nourredine, son rôle dans ce cauchemar. Elle se plaint… sans penser une seconde à l’accord de non-divulgation. Un chant d’alouette plus tard, Zoé peut enfin réagir.
— Et alors, comment tu l’as trouvé, Stéphane ?
— T’es sérieuse ?! Après tout ce que je viens de te raconte ! C’est ça ta première question ?
— Oh, ça va ! T’es la personne la plus solide que je connaisse. Après tout ce que tu as affronté dans ta vie, c’est pas une broutille qui va t’achever. Tu te remettras vite de tout ça ! Alors que d’un Stéphane… pas sûr ! Hihi !
— C’est pas drôle… Et, en plus, tu dis rien sur ce bug bizarre ? Vraiment ?!
— Si tu y tiens… c’est sûr que c’est bizarre. Surtout si Stéphane n’a pas vu pareil.
— Non, mais toi t’en dis quoi ? Je deviens folle, c’est ça ?
— Jamais je ne penserai ça de toi ! C’est certainement dû à une mauvaise conception du produit. Si la tech était fiable, ça se saurait.
— Et si ça venait de moi ?
— Pff ! N’importe quoi ! T’es pas Harry Potter !
Élodie grommelle et retrousse ses babines. Elle râle, elle rit. Grâce à Zoé, la voilà détendue.
— Le Stéphane dont tu me parlais, c’était lui ? Stéphane Duroy ?
— Ouais ! T’as vu ça ? Il est mignon !
— J’avoue… peut-être trop parfait pour être honnête. Non ?
— C’est pas sympa. Il m’a envoyé des messages tout l’après-midi pour prendre de tes nouvelles. Il s’est vraiment inquiété. En tout cas, une chose est certaine. Tu lui as tapé dans l’œil.
— Tu crois ?
— J’ai un radar pour ça. En plus, franchement, vous iriez trop bien ensemble !
— Mouais… j’en mettrais pas ma main à couper, dit Élodie alors que son cœur s’emballe.
— T’es pas optimiste, ma pauvre. Appelle-le, tu verras bien.
— Hors de question !
— Dommage… mais ça m’étonne pas de toi. Faire le premier pas, c’est pas trop ton truc. En tout cas, je te soutiens quoi qu’il arrive !
Elle glousse.
— Je dois y aller, le repas ne se fera pas seul, poursuit Zoé. Au fait, tu vas manger quoi ?
— Junk. Comme d’hab ».
— Faut sans doute que t’apprennes à cuisiner.
— Oh, putain ! Le GPS !
— Hein ? Qu’est-ce que tu racontes, Élo ?
Ses pieds sautillent contre l’accoudoir.
— Déso », Zozo, tu pourrais pas chercher où sont mes LingPods ? Tu as leur trace GPS, normalement.
— Euh… attends deux secondes.
Élodie n’a pas le temps de ronger l’ongle de son annulaire. Zoé la coupe dans son élan :
— Sur la carte, il y a marqué : « Boulot de Nono ». T’as dû les oublier, hier.
— Fait iech ! J’ai pas envie d’y retourner.
— Propose à Stéphane qu’il te les ramène, hihi !
— Très drôle… j’vais plutôt demander à Nono. Que ça lui fasse les pieds à ce faux frère.
— Pas sûr qu’il te réponde. Hier soir, il m’a dit qu’il serait injoignable pendant une semaine, ou deux, ou trois. Bref, j’sais plus. Le boulot. Tout ça, tout ça.
— Il a intérêt à me répondre !
— Tu me fais rire ! Par contre, j’dois vraiment te laisser. Désolée, Élo. À plus !
— Ouais, bisous ! À plus, Zoé !
— Au fait…
— Quoi ?
— J’t’aime sœurette.
— Euh…
Élodie grimace, rougit et gesticule.
— … moi aussi, Zoé.
La communication coupe.
— Mais faut pas me lancer ça à moi, Zozo. J’sais plus quoi dire après ça ! Bref, faut quand même appeler Nono.
Elle était prévenue. Il ne répond pas. L’amertume dicte un message : « T’as intérêt de me rappeler dès que tu vois ce message ! »
Aucun signe de vie de la part de son meilleur ami.
— Tant pis, pff… p’tit con…
Son ventre gargouille. Elle commande un veggie burger, des frites de patate douce, un sundae caramel cacahuète. Le tout livré en quinze minutes.
Elle se débarrasse de sa montre sur la table avant de manger à même le carton, devant un navet de 2042. Une histoire de guerre dans l’espace, aussi creuse qu’un discours politique. Il ne parvient pas à la faire sourire, ne serait-ce qu’un petit peu. Elle enchaîne sur un ovni de 2041, prétendument une comédie romantique. Sans plus de succès. Minuit sonne, puis une heure du matin.
À deux heures, elle craque. Elle récupère sa montre, lance l’affichage sur ses lentilles. Aucun signe de Nourredine. Soudain, son cœur s’affole, elle choisit « Stéphane Duroy ». Une tonalité. Puis deux. Puis rien. Un simple message vocal : « L’appareil que vous cherchez à joindre est en mode sommeil. »
Elle soupire, éteint tout et s’allonge sur le canapé. Elle croise les doigts pour que demain soit un jour meilleur.
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Louisa Manel
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