Fyctia
Chapitre 1 — partie 1/3
Boum ! Boum ! Boum !
— Élo ! T’es là ?
— Gné, gémit-elle en se levant difficilement de son canapé.
Boum ! Boum ! Boum !
— Élodie !! C’est Nono !
— Merci, j’avais compris, Ducon, marmonne-t-elle en se frottant la mandibule.
Boum ! Boum ! Boum !
— Chris ! Ouvre, je caille dehors !
L’estomac d’Élodie se contracte. Un mot, un prénom. Une fraction de seconde, et un souvenir affleure. Les phalanges de la jeune femme blanchissent ; ses iris lancent des éclairs, sa mâchoire paraît prête à dévorer Nourredine, qui tambourine toujours. Elle accourt, trébuche sur une petite culotte rose et des chaussettes sales — et trouées —, se redresse, ramasse les clés sur le bar de l’entrée. Une grande inspiration. Un soupir. Elle déverrouille la porte. Sans le moindre ménagement !
— Tu répètes une seule fois ce nom et, crois-moi, je te crève les yeux ! Compris ! Nourredine ?
— Ça va ! Au moins je ne mourrai pas congelé.
Il patiente sur le seuil. L’air froid de février s’engouffre dans l’appartement. Élodie inspire bruyamment.
— T’attends qu’il fasse moins trente chez moi, avant de ramener ton cul sur une chaise pour boire un café ?
Il écrase sa cigarette et la jette dans le pot de fleurs près de la porte.
— Tu vas me ramasser ça de suite si tu veux pas que je te la fasse bouffer !
— Oui madaaame !
Il s’exécute, frotte ses pieds sur le paillasson, puis se dirige vers le coin cuisine. Le mégot à la poubelle, il fouille un placard, en sort deux tasses et prépare autant d’espressos.
— Tranquille, t’es partout chez toi, Nono !
— On se connaît depuis mille ans. C’est pas comme si on avait grandi ensemble.
— Mouais. T’es quand même sans gêne. J’sais pas si on te l’a déjà dit !
— Toi, tous les jours ou presque.
— Bref, ramène les cafés et ton cul sur le canap’ et viens me dire ce que tu me veux de si bon matin.
L’éclat de rire de Nourredine envahit la pièce. Par trois fois, il manque de renverser le liquide brun… Non, quatre.
— Il est dix heures quand même.
— Oui, mais c’est dimanche. Et la grasse mat’, c’est sacré !
Il souffle sur la crème, libérant un léger parfum de noisette — typique de l’arabica bon marché. Jusque-là, Élodie est restée assez sereine ; pourtant, elle lève maintenant les yeux au ciel et mord sa lèvre inférieure. Avant qu’elle n’ouvre à nouveau la bouche pour le réprimander, elle s’étonne : que peut bien lui vouloir Nono ? Pourquoi tourne-t-il autant autour du pot ?
— Calme-toi, j’y viens, j’y viens ! La patience et toi ça fait quatre.
— Si c’est pour faire comme l’année dernière, chercher à me surprendre pour mon anniversaire… Comment te dire ? Cherche pas, c’est mort. Je vous ai cramés, Zoé et toi, depuis un an déjà !
— Dans ce cas-là, n’oublie pas ton anniversaire surprise samedi prochain, ricane-t-il avant de se brûler la langue avec le café.
— J’en étais sûre. Pas un pour rattraper l’autre. J’ai passé une nuit exécrable, une journée d’hier pourrie et maintenant, il faut que vous me refassiez le coup…
Elle s’allonge sur les cuisses de son ami et enfouit son visage sous un oreiller.
— Eh ! Tu m’as pris pour ton coussin ?! Dégage de là !
Mais elle ne bouge pas. Au contraire. Elle s’ancre davantage et laisse brièvement courir son imagination. Cet interlude ne dure pas : Nourredine la secoue à l’instar de ses vêtements dans le lave-linge qui ronronne.
— T’es vraiment pas cool comme gars, tu le sais ?
— Jamais avec les potos ! Par contre, avec ta copine Vanessa, je pourrais devenir le mec le plus sympa de la Terre ! Non ! De l’Univers !!
— Au moins ! Et ta grand-mère ?!
— Elle va bien. Elle m’a préparé son couscous pour le repas de ce soir ! J’en bave déjà !
En effet, il bave. Un filet menace même de tomber sur le visage d’Élodie. Sans se gêner, elle repousse le menton du jeune homme vers l’accoudoir.
— Abruti ! jacte-t-elle tandis qu’elle s’écarte de lui.
— Ton café va être froid.
— TG !
— Tu parles comme un chalutier, t’es sûre d’être prof d’histoire ?
— Charretier !
— Quoi ?
— On dit : « comme un charretier ». Pas : « comme un chalutier ».
— Osef ! Ça te va bien prof, t’as toujours été la Hermione Granger du groupe.
Elle secoue la tête et souffle sur une mèche rebelle qui lui gâche la vue. Sa dose de caféine l’appelle.
— Ah ! Ah ! Très marrant, ironise-t-elle. Il est dégueulasse, ce café.
Elle repose sa tasse sur la table basse avec sa délicatesse toute personnelle. Le « clac » est si sec que Nourredine sursaute.
— Tu vas péter la vitre si tu ne fais pas gaffe !
— Ouais ! Ouais ! Je ne suis pas future chômeuse comme toi !
— T’es folle ! Au boulot, on va révolutionner le monde !
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Océane Ginot
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Anthony Dabsal
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Akiria.s
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Manonst
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Anthony Dabsal
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