Fyctia
Connor
En prenant conscience de ma connerie, je prends les escaliers à mon tour et les descends cinq à cinq. Dans le hall Austin revient, l’air dépité en levant les mains. Madoka est scotchée à son téléphone, pendant qu’Hector grommelle comme un vieux papi.
-Elle est où ? je hurle
-Dans un taxi, direction l’aéroport ! me réprimande Mado. Tu en as fais, des prouesses, dans ta vie Connor, mais celle-là elle est plus grosse que t-
-Vos gueules ! Laissez moi réfléchir !
-Tiens donc, il serait temps que tu t’y mettes ! rajoute Austin en croisant les bras
Accidentellement, mon bras heurte son torse et il se met à tousser. Oups. Je vole le téléphone des mains de Madoka. Excellent, ça, Connor ! Et tu comptes faire quoi avec ça, hein ? Je lui dis : « Oui, écoute, je suis désolé d’avoir été un tantinet con, et j’ai ta bague, on fait un compromis ? »
J’attends que Mademoiselle réponde. Au bout de trois sonneries, elle se décide.
-Madoka, je suis désolée...
-Je t’en supplie ne raccroche pas ! J’ai ta bague ! j’annonce
-Ma...ma bague ?
-Reviens et on discute. Sérieusement, promis !
Elle soupire et accepte. Je suis persuadé qu’elle a changé d’avis uniquement pour sa bague. À tous les coups elle va la récupérer et partir, elle va me filer entre les doigts ! Madoka me reprend violemment le téléphone et me frappe le crâne, tout en reprenant Miranda. Austin lève les bras en haussant les sourcils.
-Du chantage ? Wow, mais c’est que tu t’améliores, Connor !
-Tu avais une meilleure idée, peut-être ?
-Ne pas m’enfermer avec dans une pièce, deux fois d’affilée ?
-C’est ça, qui t’énerve, en vrai ? Quel cœur d’artichaut tu fais ! je m’exaspère.
Je lui donne un micro coup de poing dans le bras, mais vu sa grimace, c’était encore trop violent. Excuse-toi d’être en sucre ! Quand un taxi s’arrête, tout le monde se redresse et se précipite à l’entrée. Miranda se précipite vers moi, le regard grave, et tend la main dans laquelle je pose son anneau en commentant :
-« Toujours dans mon cœur », c’est mignon.
-Que veux-tu ?
-Que tu reviennes gentiment. S’il te plaît ? je m’essaie
-Pour vivre avec ton égocentrisme, ton caractère de merde, tes remarques et gestes déplacés ?
-J’en suis désolé, j’ignorais ce qui avait pu se passer. Mais j’ai besoin d’un kiné compétent pour la saison.
Elle soupire et porte la bague à ses lèvres pour l’embrasser, en murmurant une phrase. Ses traits s’adoucissent et elle reprend son visage habituel, doux et glacial à la fois. Pendant qu’elle semble réfléchir et peser le pour et le contre, je cherche des arguments, en vue d’une future dispute.
Miranda soupire et acquiesce. J’ai déjà gagné une manche.
-Si j’accepte, c’est uniquement pour ta carrière.
-Ça marche. Pour les conditions on-
-Les conditions, c’est moi qui les donne cette fois ! siffle-t-elle
Je crois que j’ai réveillé Miranda de son sommeil hivernal, qui paraissait sans fin. De gentille et docile, elle passe à l’exact opposé, dure et indomptable. Est-ce que je n’aurais pas engendré quelque chose de pire ? Quoi qu’il en soit la machine est lancée, et l’engrenage Mira semble beaucoup plus fonctionnel.
-Je t’écoute.
-Tu arrêtes d’être odieux, avec tous ceux de ton équipe. Tu cesses d’être imbuvable, narcissique et par pitié... Ai de la reconnaissance pour tout ce qu’ils font !
-T’as rien de plus normal à demander ? Augmentation de salaire ou une connerie du genre ? je m’étonne
-Arrête d’être désagréable, aussi ! Apprend à sourire et à écouter, ça aussi c’est bien !
Devant sa détermination, je suis contraint d’accepter et je me dévoue pour remonter ses affaires dans sa chambre. Elle me suit d’un pas glacial. J’ai l’impression que sa seule présence fait chuter la température. Elle s’assoit sur son matelas et fait passer l’anneau sur la table. La curiosité me titille une nouvelle fois.
-Donc tu es fiancée ?
-T’es vraiment long à la détente ! rit-elle. J’ai été mariée.
-Ça s’est mal finit ? J’ai jamais cru en ces histoires de « jusqu’à ce que la mort nous sépare ».
-Pourtant, c’est vrai...
Elle sourit tristement et je comprends ma bêtise. Putain, je mets les deux pieds dans le plat à chaque fois ! Je cherche comment amorcer la question « Qu’est-ce qui s’est passé » mais j’ai l’impression de marcher sur des œufs. Je ne cherche pas longtemps, puisqu’elle se dévoue :
-Il était boxeur, comme toi. Tu dois probablement le connaître...
-Décidément, ta vie tourne autour de nous !
-Peut-être trop justement... Après son décès, j’ai arrêté d’exercer, tout ce que je faisais et voyais me le rappelait sans cesse.
-Je peux avoir son nom ?
Miranda sourit et prend une grande inspiration. Je suis conscient que ce n’est pas forcément un moment agréable, mais c’est le meilleur moyen de repartir sur de bonnes bases avec elle. Elle relève la tête, les yeux pleins de larmes, prêtes à dévaler ses joues rouges. Son petit sourire se teinte de perles cristallines et ses cils s’humidifient.
-Il s’appelait Ricky. Ricky Morton.
J’écarquille les yeux. C’est elle ? La nana dont tout le monde à parlé sans cesse, pendant des mois ? C’était la putain de femme à cette espèce de légende ! Je prends la chaise et m’assieds pour essayer de digérer la nouvelle. Miranda Owel était la kinésithérapeute de Ricky. Ce mec, c’était une légende ! Un modèle pour ceux de mon gym* à l’époque.
-Je suis désolée... elle prend un mouchoir. Je suis pathétique.
-Pourquoi tu ne l’as pas dis avant ?
-Parce que ça ne sert à rien de remuer le couteau dans la plaie !
-On aurait pu faire en sorte de t’aider à t’adapter ?
-J’avais besoin de temps pour m’y remettre... mais t’es pas très patient.
Elle sourit entre deux reniflements. Madoka était fan de Stéphanie, la sœur de Ricky, pas étonnant qu’elle ait reconnu Miranda et l’ait comprise aussi vite. J’aurais dû faire le rapprochement... C’était sous mon nez, je suis tellement aveugle. Voyant que ses larmes affluent, je m’assieds à côté d'elle et maladroitement, j’essaie de la calmer. Sa tête se pose lourdement sur mon épaule. J’ai l’impression que je vais m’effondrer. J’ai pas l’air idiot comme ça, une boîte de mouchoir dans une main et l’autre qui lui caresse le dos.
-Calme toi, tu vas te déshydrater !
Elle lâche un petit gloussement, puis ses larmes reviennent de plus belle. Je ne suis pas fait pour ça, où est Austin quand j’ai besoin de lui ? Lentement, elle se calme. J’essaie donc de me dégager, sauf que madame vient de s’endormir. Après avoir versé dix litres de larmes, c’est compréhensible. Difficilement, j’arrive à m’extirper de là et rejoins les autres en bas.
-Vous faisiez quoi, là-haut ? se plaint Austin
-Connor ? T’as fais quoi ?
Elle pointe mon épaule, trempée.
-J’ai servi de repose-tête et de mouchoir.
Madoka éclate de rire et jure en russe, pendant qu’Austin ravale sa jalousie dévorante (et son envie de pleurer à son tour) de ne pas être monté à ma place. Je pousse un long soupir et passe mes mains dans mes cheveux. Ces femmes vont finir par me rendre dingue !
8 commentaires
FeizaBabouche
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Il y a 7 ans
AisuYumiya
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Il y a 7 ans
Emilie May (Bookofsunshine)
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Il y a 7 ans
AisuYumiya
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Morganou
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Il y a 7 ans
AisuYumiya
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Il y a 7 ans
Caro Handon
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Il y a 7 ans
AisuYumiya
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Il y a 7 ans