Fyctia

Elle se décompose et ses petites pommettes prennent une teinte rosée. Que c’est beau de voir de la couleur sur son visage si pâle. Je me régale de ses petits yeux, remplis d’incompréhension et d’appréhension. Ses lèvres fines sont légèrement entrouvertes; j’ai une soudaine envie de m’introduire. Elle est vraiment attrayante, comme femme. Je passe mon pouce sur ses lèvres meurtries, qu’elle mordille pour ne pas flancher. Ses petits poignets en ma possession, j’ai conscience de pouvoir lui faire faire tout ce que je désire. Et actuellement, j’ai pleins de bonnes idées !

-S’il te plaît, lâche moi...

Je sens la détresse dans sa voix, je la sens s’écouler dans ses veines, où son sang affecté tape contre mes doigts, tout comme son pouls affolé.

Ses yeux qui étaient, à l'instant, pleins d'amusement, deviennent sombres et tristes. À cet instant, je comprends pourquoi Madoka la couve. Elle est tellement vulnérable, une brise et elle se brise, un coup et elle s’effondre. Elle se cache derrière un masque qui se fissure de jours en jours, dévoilant ses larmes qui ne cessent de couler. Depuis longtemps, j'ai l'impression.

-Miranda, qu’est-ce qu’il t’est arrivé ?

-Rien qui puisse t’intéresser...

Je resserre mon étreinte, quitte à lui couper la circulation sanguine. Je veux qu’elle parle, et elle parlera ! Elle est bloquée contre le mur. J’ai conscience de la connerie que je fais, mais j’ai besoin de savoir ce qu’il se passe dans sa putain de tête ! Son corps se met à trembler contre le mien, et elle relève la tête. Son visage est sombre, haineux, et ses yeux expriment un surplus de colère, elle semble prête à exploser.

Je me risque :

-Tu vas parler ?

-Connor. Je t’ai dis de me lâcher ! hurle-t-elle

Elle se dégage vivement de mon étreinte et me retourne une gifle, plus que douloureuse, avant de me repousser sauvagement. Miranda me fixe, je n’ai jamais vu autant de choses se bousculer dans le regard de quelqu’un. Sans prendre plus de temps à me maudire, elle s’en va en bousculant Austin au passage. Ce dernier me fixe avec de gros yeux. Et merde... Il faut toujours qu’il mette son nez dans mes affaires, littéralement. Et vu la façon dont mon meilleur ami me regarde, en serrant ses poings, ça ne lui plaît pas. Sans force ni technique, son poing essaie de percuter mon visage. Un mouvement de tête et c’est esquivé. On en est là ? Monsieur le chevalier blanc veut un duel pour prouver sa valeur à sa donzelle ?

Pathétique.

-Écoute, on a juste fait plus ample connaissance !

-En lui faisant piquer une crise ? Je ne connaissais pas cette façon de faire ! Bravo.

-Tu la connais, maintenant ! je me moque

-Connor, arrête de jouer cinq minutes au roi des cons. Et... Tu ne peux pas arrêter de tout me voler ? Tu n’en as pas assez ?

J’observe mon meilleur ami, visiblement irrité. Où veut-il en venir encore ? J’ai beau réfléchir, je ne me rappelle pas lui avoir volé quoi que ce soit. À part un t-shirt, une veste et une paire de chaussettes, mais ce ne sont certainement pas de choses aussi insignifiantes dont il veut parler.

-D’abord, mon rêve, et maintenant... T’es vraiment un enfoiré ! Je ne suis peut-être pas aussi fort, charismatique ou aussi bien foutu que toi. Mais contrairement à toi, je me sers de ma tête pour réfléchir et non pour cogner !

Il passe sa main sur son visage, coloré par l’énervement. Je me sens con, pris au dépourvu, et je n’aime pas ça. Austin tourne les talons en poussant un rire nerveux. Il claque la porte, me laissant dans le silence le plus total.

Seul, perdu dans mes réflexions, j’essaie de comprends où j’ai pu merder. Je comprends mieux la phrase « Il y a des jours où il vaut mieux rester couché ». J’ignore combien de temps je suis resté à cogiter mes actions du passé. Madoka entre à son tour dans la salle. Encore un round pour une engueulade où on s’arrête pour aujourd’hui ? Parce que là, j’abandonne. Les femmes sont trop puissantes pour moi, à ce niveau, je ne fais pas le poids...

Son coude vient se poser sur mon épaule, et elle secoue la tête en souriant nerveusement.

-T’es con.

Merci Madoka, ça fait toujours plaisir, surtout dans un moment pareil où j’ai besoin d’être au meilleur de moi pour la compétition. Non, vraiment, merci.

Je lâche un long soupir et elle acquiesce. Lentement, elle fait des va et vient dans la pièce. Soudain, elle s'arrête, me tournant le dos.

-J’espère que tu comptes lui présenter des excuses ? Parce que si ce n’est pas le cas... (elle se retourne) Je te castre.

Avec un regard digne d’une psychopathe en cavale, elle pointe du doigt mes parties génitales, puis son genou. Je viens de me prendre une tarte phénoménale qui me brûle encore, je pense que je vais limiter la casse pour aujourd’hui. Pas sûr que les femmes aiment les hommes émasculés.

Sous le regard pesant de Madoka, je prends la direction de l’étage de Mademoiselle Owel, où je ne manque pas de trouver Austin tambourinant à la porte. Il se fait vite remettre à sa place par la voix emplie de colère et de tristesse de Miranda.

Mais est-ce que cette putain de journée aura une fin ? Parce que j’en ai pas l’impression !

Sans grand espoir, je m’avance à la porte et toque à mon tour, avant de gueuler :

-Miranda, ouvre !

-Va te faire voir, Connor !

Ça, c’est fait ! Je savais pas que l’option "injures" était installée chez elle, ça me fait sourire.

Elle est visiblement pleine de surprise, Casper. Je me dis que si sa bouche peut sortir de telles choses, elle peut sans aucun doute en faire de plus belles. En oubliant mon allusion, je tente ma chance une seconde fois. Je n’ai pas le temps d’ouvrir la bouche qu’elle sort avec un sac et une valise.

Bon, je crois que j’ai merdé, bien comme il faut. Il va falloir la jouer fine pour que tout redevienne normal, vu l’ampleur des dégâts... Ça va être compliqué !

-Miranda, on peut parler ?

-On a finit de parler. Ôte toi de mon chemin, Connor.

Son regard noir me fait l’effet d’une droite qui me déboîte la mâchoire. Elle me bouscule et s’avance vers l’ascenseur sous les « Attends » inutiles d’Austin. Sans lui prêter une once d’attention, elle entre dans la boîte métallique et disparaît.

Austin jure et se précipite dans la cage d’escalier. Je l’entends dévaler les premières marches.

Mon poing cogne la porte qui s’ouvre sans broncher. J’entre par pure curiosité, les tiroirs sont encore ouverts, les lumières allumées. Je m’assois sur le matelas, beaucoup trop mou à mon goût, puis passe mes mains sur mon visage, qui s’en est pris pas mal en moins d’une heure.

Une petite lueur attire mon regard, une bague fine en argent, posée sur la table de chevet. Elle me dit vaguement quelque chose. Je la prends et la tourne dans tout les sens. Quand j’essaie de l’enfiler, elle ne m’arrive qu’au bout de l’auriculaire. Miranda a vraiment de tout petits doigts. Je tourne sans cesse l’anneau comme s’il allait m’aider. Soudain une inscription tout en blanc, incrustée à l’intérieur, me fait l’effet d’une bombe.

Tout s’éclaire.

-Oh le con !