Fyctia
Chapitre 1 : Premier ef... 2/3
C'est à ce moment que je la remarque – une silhouette féminine à l'entrée des coulisses. Grande, élancée, dans une petite robe noire qui hurle "je coûte plus cher que ton loyer annuel" et des escarpins qui pourraient payer six mois de traitement pour ma mère.
Nos regards se croisent dans le miroir. Elle semble figée là, visiblement mal à l'aise mais tentant de le dissimuler sous un masque d'indifférence polie. Pas le genre de femme qu'on trouve habituellement dans les coulisses d'un club de strip-tease – trop classe, trop réservée, trop tout.
— Eh merde, lâche Carlos en l'apercevant. Une infiltrée.
Je me tourne vers elle avec un sourire que je réserve habituellement à la scène.
— Le spectacle privé, c'est après le show public, Princesse. Ou alors tu paies un supplément pour l'avant-première ?
Ses joues s'empourprent légèrement, mais ses yeux restent froids.
— Je cherchais les toilettes, répond-elle d'une voix qui trahit une éducation privilégiée.
— Bien sûr, c'est ce qu'elles disent toutes, ricane-je en m'approchant. Si tu voulais voir le Père Noël préparer sa hotte, il suffisait de demander.
Je désigne mon bonnet ridicule avec un clin d'œil exagéré. Son expression passe de la surprise à l'agacement.
— Je me suis simplement trompée de porte.
— Et tu ne pouvais plus détourner les yeux ? C'est compréhensible. L'effet que je fais aux femmes est scientifiquement prouvé.
Je crois voir un minuscule sourire contraint au coin de ses lèvres.
— Je crois avoir assez de diplômes pour affirmer que ça n'a rien de scientifique, rétorque-t-elle.
— Oh, des diplômes ! s'exclame théâtralement Carlos depuis son miroir. Attention Ethan, celle-là sait lire !
— Contrairement à d'autres, apparemment, réplique-t-elle avec un regard glacial vers Carlos qui siffle d'admiration devant sa répartie.
— Les toilettes sont à gauche en sortant, Princesse, je lance en faisant un geste théâtral vers la porte. Évite de te perdre sur le chemin du retour, tes amies vont s'inquiéter. À moins qu'elles ne soient toutes aussi curieuses que toi de voir ce qu'il y a sous le costume du Père Noël ?
Elle rougit davantage, clairement d'irritation cette fois.
— Je préfère garder le mystère intact, répond-elle en tournant les talons.
— Dommage, le mystère est la meilleure partie ! je lance avant qu'elle ne disparaisse complètement.
— Wow, souffle Darius quand elle est partie. C'était glacial.
— Ces filles de la haute, elles nous regardent comme des animaux de zoo, commente Rick. On est les attractions qu'on regarde sans toucher.
— Parle pour toi, rétorque Carlos. Certaines aiment bien toucher aussi.
Miguel passe la tête dans l'embrasure, interrompant notre conversation.
— T'es prêt, Miller ? Les filles s'impatientent. Et c'était qui cette nana ?
— Juste une égarée, je réponds en ajustant mon ridicule bonnet de Père Noël. Elle cherchait les toilettes.
— Mon cul, elle cherchait les toilettes, marmonne Miguel. Enfin, peu importe. C'est ton heure. Fais-les hurler, Caméléon !
Je me lève, étire mes épaules et laisse Ethan Miller, l'homme aux problèmes financiers et aux responsabilités familiales, s'effacer. Le Caméléon prend sa place.
— Ho-ho-ho, bébé. Le Père Noël arrive.
Le Paradise Lounge ressemble à la version pour adultes de la maison du Père Noël. Miguel n'a pas lésiné sur les décorations cette année – des guirlandes lumineuses clignotent au plafond, des cannes de sucre géantes encadrent la scène, et même les poteaux de pole dance sont enrubannés de rouge et blanc comme d'immenses sucettes de Noël. L'effet est à mi-chemin entre festif et grotesque, mais les clientes semblent adorer.
La musique change – les premières notes de "Santa Baby" résonnent dans les enceintes. C'est mon signal. Je franchis le rideau et entre sur scène sous les cris enthousiastes des femmes rassemblées pour l'enterrement de vie de jeune fille.
Elles sont une quinzaine, regroupées autour de tables couvertes de cocktails aux couleurs vives et de décorations de Noël kitsch. La future mariée est facilement repérable au centre, avec sa couronne en plastique et son écharpe "Future Mrs." qui brille sous les projecteurs.
Je commence ma routine, me mouvant au rythme de la musique, jouant avec mon personnage du Père Noël séducteur. Mes mouvements sont calculés – sensuels sans être vulgaires, suggestifs mais jamais explicites. C'est un art, vraiment. Peu importe ce que pensent les gens comme la fille des coulisses.
Et en parlant du loup... Je la repère, assise légèrement en retrait du groupe principal. Contrairement aux autres qui hurlent et agitent des billets, elle observe la scène avec une expression indéchiffrable, sirotant discrètement un cocktail. Elle tente visiblement de paraître indifférente, mais je la vois suivre chacun de mes mouvements.
Son attitude m'agace. Si elle me trouve si répugnant, pourquoi reste-t-elle ? Je décide instantanément de la cibler – non pas par intérêt, mais par pure provocation. Je veux la voir sortir de sa zone de confort.
Je me dirige vers elle, ignorant délibérément les billets tendus par les autres. Elle réalise mon intention et je vois une brève lueur de panique dans ses yeux. Parfait.
Je m'arrête juste devant elle, ondulant au rythme de la musique, jouant sur la proximité sans jamais la toucher. C'est la règle – ne jamais toucher sans permission.
— Viens t'asseoir sur les genoux du Père Noël, je murmure assez fort pour qu'elle m'entende par-dessus la musique. Je sais exactement ce que tu veux pour Noël.
Elle secoue légèrement la tête, tentant de maintenir son expression neutre malgré la rougeur qui envahit son cou.
— Je préfère rester sur la liste des sages, répond-elle sèchement.
Je ris, authentiquement amusé par sa réplique.
— Dommage. Les vilaines filles s'amusent tellement plus.
Je lui tourne délibérément le dos, revenant vers la future mariée qui, elle, n'a aucun problème à glisser des billets dans mon ceinturon. Du coin de l'œil, je vois la princesse en noir se raidir sur son siège. J'ai touché un point sensible.
Le reste du show se déroule parfaitement. Je me débarrasse progressivement de mon costume, ne gardant finalement que le bonnet de Noël et bientôt qu'un string rouge stratégiquement décoré d'un pompon blanc. Les filles hurlent, les billets pleuvent, et l'alcool coule à flots.
Au moment d'enlever mon pantalon, je jette un regard provocateur vers Mademoiselle Coincée. Elle détourne les yeux, mais pas assez vite. Je l'ai vue regarder.
Pour une raison que je ne m'explique pas, l'irriter me procure une satisfaction particulière. Probablement le plaisir basique de déranger quelqu'un qui se croit au-dessus de tout ça.
7 commentaires
Gwen.David
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Il y a 3 jours
JustineSt
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Il y a 16 jours
Assmag
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Il y a 17 jours
Mayana Mayana
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Il y a 17 jours