Fyctia
Prologue : Scénario à p... 2/2
À ce stade, vous vous demandez probablement pourquoi je n'ai pas simplement dit la vérité. "Désolée, maman, toujours célibataire, faudra faire avec." Mais vous n'avez jamais rencontré ma mère. Catherine Deveraux ne "fait pas avec". Elle transforme, manipule et remodèle la réalité jusqu'à ce qu'elle corresponde à sa vision. Et je n'ai absolument pas la force de subir deux semaines de regards désapprobateurs, de soupirs déçus et de tentatives pas si subtiles de me présenter à chaque homme célibataire de Manhattan.
Quelques heures plus tard, je retrouve ma meilleure amie Léa dans un bar du centre-ville. L'endroit est suffisamment chic pour que les cocktails coûtent un bras, mais pas assez prétentieux pour qu'on s'y sente mal à l'aise en jean.
— Tu as fait QUOI ? s'exclame-t-elle en me regardant par-dessus son martini.
— J'ai paniqué, je réponds en faisant tourner distraitement mon verre de vin. Tu connais ma mère. Elle est comme un missile à tête chercheuse qui ne s'arrête jamais.
— Alors tu as inventé un petit ami imaginaire ? s'esclaffe Léa. Brillant, counselor. Et comment comptes-tu le matérialiser pour le 14 ? Par magie de Noël ?
Je grimace. Léa est ma meilleure amie depuis la fac de droit, et la seule personne qui me parle comme à un être humain normal plutôt qu'à l'héritière Deveraux. C'est aussi la seule qui peut me faire sentir complètement idiote en l'espace d'une phrase – un talent rare.
— Je n'en sais rien. Engager un acteur ?
— À deux semaines de Noël ? Bonne chance. Ils sont tous pris pour les publicités de parfum et les téléfilms de Hallmark Channel.
Elle a raison, bien sûr. Mon cerveau juridique passe en revue les options, les écartant une à une comme des pièces à conviction irrecevables.
— Je pourrais demander à un collègue...
— Qui devra ensuite travailler avec toi après avoir rencontré ta famille ? Cruel.
— Ou dire qu'il est tombé malade au dernier moment...
— Ta mère fera livrer une armée de médecins à votre porte.
Je soupire profondément et avale une généreuse gorgée de vin.
— Je suis fichue.
Léa termine son martini d'un trait et me regarde soudain avec cette étincelle dans les yeux que je connais trop bien – celle qui précède généralement une idée soit brillante, soit catastrophique. Dans son cas, la frontière est souvent floue.
— Tu sais, dit-elle avec un sourire grandissant, mon enterrement de vie de jeune fille est samedi.
— Oui, et ?
— Au Paradise Lounge.
Je la fixe sans comprendre pendant quelques secondes avant que la lumière ne se fasse.
— Un club de strip-tease ? Tu suggères que je recrute un strip-teaseur comme faux petit ami pour les fêtes de Noël avec ma famille ?
Léa hausse les épaules avec une nonchalance étudiée.
— Pourquoi pas ? Ils sont beaux, habitués à jouer un rôle, et franchement, ils ont probablement besoin d'argent pour les fêtes. C'est gagnant-gagnant.
Je la dévisage, partagée entre l'horreur et une fascination morbide. À ce stade, chers lecteurs, n'importe quelle personne sensée aurait éclaté de rire et commandé un autre verre. Mais je ne suis clairement plus dans mon état normal.
— C'est la pire idée que j'aie jamais entendue.
— C'est la seule idée que tu as, réplique-t-elle. Qui sait, peut-être que tu trouveras ton Prince Charmant parmi les princes du strip-tease !
Je ne peux m'empêcher de rire face à l'absurdité de la situation.
— Tu es complètement folle.
— Peut-être, mais je serai une folle mariée dans deux semaines. Toi, tu seras seule face à ta famille... à moins que tu n'aies un chevalier à paillettes à tes côtés.
Les jours suivants passent dans un brouillard de travail, de remises en question et d'anxiété croissante. Le samedi soir arrive trop vite. Je me retrouve devant mon dressing, confrontée à un dilemme vestimentaire inédit : que porte-t-on pour aller recruter un faux petit ami dans un club de strip-tease ?
Mon placard révèle une collection impressionnante de tailleurs Armani, de robes de cocktail appropriées pour les galas de charité, et exactement zéro tenue digne d'une soirée dans ce genre d'établissement. Pathétique, n'est-ce pas ?
Au fond d'une étagère, je déniche une petite robe noire que je n'ai portée qu'une seule fois, lors d'une rare soirée en boîte avec Léa. Suffisamment élégante pour ne pas avoir l'air désespérée, suffisamment sexy pour ne pas ressembler à une bibliothécaire en goguette.
Je l'enfile et me regarde dans le miroir en pied. La femme qui me fixe semble à la fois familière et étrangère. Juliette Deveraux, avocate respectée spécialisée en droits humains, sur le point de proposer un contrat à un inconnu pour qu'il prétende être amoureux d'elle. Si mes professeurs de Yale pouvaient me voir maintenant...
Mon téléphone sonne – un message de Léa : "On se retrouve à 21h. Viens comme tu es, ne te change pas pour la 15e fois."
Elle me connaît trop bien.
Je ferme les yeux et imagine le dîner de Noël qui m'attend. Les regards de pitié, les questions insidieuses – "Toujours pas de petit ami, Juliette ? À ton âge, ta mère était déjà mariée..." – et cette sensation suffocante d'être un échec malgré tous mes accomplissements professionnels.
Non. Pas cette année.
Cette année, je reprends le contrôle. Si ma famille veut un spectacle, je leur en donnerai un qu'ils ne sont pas près d'oublier. Et vous, chers lecteurs, vous êtes sur le point d'assister à la création du plan le plus absurde et le plus désespéré qu'une femme de 27 ans ait jamais conçu pour survivre aux fêtes de fin d'année.
Ce que j'ignorais en enfilant cette petite robe noire et en me dirigeant vers ce club aux néons criards, c'est que j'allais y trouver la solution à tous mes problèmes... et le début des vrais ennuis. Laissez-moi vous présenter Ethan Miller, l'homme que j'allais payer pour briser mon cœur.
12 commentaires
L'amisolitaire 🔥
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Il y a 4 jours
Zatiak
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Il y a 4 jours
Gwen.David
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Il y a 10 jours
Sunny NDV
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Il y a 15 jours
JustineSt
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Il y a 16 jours
Assmag
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Il y a 17 jours
Zatiak
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Il y a 16 jours