Fyctia
Chapitre 1 : Ellõra
Le froid envahit mon corps, mais mon cœur baigne dans une douce chaleur.
Je me retrouve assise sur un trône de racines ou de branches emmêlées. Je peux sentir l'écorce lisse et l'énergie qui circule dans les vaisseaux de l'arbre. Cet arbre est merveilleux, je le sens au plus profond de mon esprit.
J'ouvre les yeux. J'aperçois la mer ou l'océan à quelques centaines de mètres.
Je soupire de soulagement.
Me téléporter en pleine forêt ou dans un désert de glace me provoque à chaque fois un sentiment terrifiant. Peur et solitude immense entremêlées, face à l'immensité vide qui m'écrase le cœur et me tord les tripes.
Rien à voir avec l'apaisement que je ressens ici. Je pourrais rester là sans bouger et méditer, mais je ne dois pas rester longtemps. Je ne maîtrise pas suffisamment l'art de la téléportation pour garder le "portail" ouvert plusieurs heures. Seules les grandes prêtresses et les grands maîtres sont capables de le faire.
J'aime beaucoup la vue que j'ai depuis mon siège végétal. Mon intuition me dit que je vais revenir souvent ici.
Le ciel se lève à peine face à moi et caresse la terre froide de ses rayons.
Je respire l'air chargé d'iode. La température est fraîche mais pas glaciale. Je tourne la tête à droite et à gauche pour admirer l'arbre pluri centenaire qui a permis mon voyage.
Les fruits, des gousses vertes régulières, pendent de ses multiples branches. Le tronc le plus ancien est couché presque au ras du sol. C'est sur lui que je suis assise. Des dizaines de troncs plus jeunes partent de cette souche mère qui a survécu. L'arbre est gigantesque.
Cela ne m'étonne pas. Seuls les arbres vénérables, très anciens, et chargés de l'énergie de la terre ou ils sont enracinés, permettent aux Indigos du niveau 7 de se téléporter. J'observe les feuilles, d'un vert soutenu, séparées en de multiples folioles aux bords arrondis.
C'est un caroubier, appelé aussi figuier d'Egypte.
Je dois être dans le bassin méditerranéen. Les cours de botanique, mes préférés, sont vraiment très utiles pour se repérer !
L'étendue d'eau bleue foncée n'est parcourue que de faibles ondulations. C'est sûr, ce n'est pas l'océan. Je dois être en Espagne, ou en Italie sur la côte Adriatique.
Sous ces latitudes, dorénavant les hivers sont polaires et à la belle saison, qui dure à peine deux mois, la température est à peine clémente...
Ma grand mère m'aurait dit que je suis au pays du père noël. Elle a toujours des références du XXème siècle qui me font sourire.
Les vestiges d'une station balnéaire découpent la côte au loin. Malheureusement le climat n'est plus à la baignade !
je songe que j'aurais aimé connaître cette époque. L'insouciance des jeunes du 21ème siècle me laisse rêveuse. Comme ils devaient s'amuser ici !
Je me sens tellement bien au creux de cet arbre millénaire, je soupire, triste de devoir me lever pour quitter la sécurité de ses branches. J'ai à peine une heure devant moi, et je ne dois pas quitter mon état de méditation pour pouvoir repartir. Mission délicate.
Je songe avec dépit à la dernière fois. Mon voyage instantané avait été un fiasco total. Ma prof avait été obligée de venir me chercher.
J'avais d'abord été effrayée par l'immensité des séquoia qui m'entouraient de toute part. La peur m'avait fait perdre ma concentration. Il m'avait fallu de longues minutes pour la retrouver ensuite. Et puis je m'étais laissée distraire par un écureuil trop chou qui courait autour de moi, semblant m'inviter à jouer avec lui. J'avais été envahie d'une joie enfantine, que je n'avais plus ressentie depuis si longtemps ! Après ça, impossible d'arriver à me concentrer suffisamment pour rentrer. Au bout d'un temps interminable, Mme Ciya était apparue, et elle m'avait pris la main pour me ramener.
Les pestes de service : Lycia et Louna, n'avaient pas manqué l'occasion de pouffer et de parler à voix basse entre elles en ricanant. J'avais rougi de honte jusqu'aux oreilles !
J'inspire un grand coup pour me donner du courage. Je me lève prudemment et fait quelques pas vers le soleil. Je dois essayer de mémoriser les lieux pour raconter à tous les Indigos ce que j'ai vu. Ceci afin de savoir si il y a un quelconque intérêt pour la communauté à revenir ici.
Je suis sur un promontoire et une pente douce mène vers la côte. Je décide de m'engager dans cette direction.
La végétation rase de l'été me permet une progression facile. Pas de forêts impénétrables par ici. En m'approchant de la plage, je distingue mieux les vestiges de grandes maisons. Certaines de style colonial, d'autres oriental. L'architecture de ces immenses villas de vacances est très hétéroclite. Aucune n'est indemne. Les ravages de l'hiver...
Je sens que je ne dois pas m'engager plus loin vers la ville. Trop périlleux pour une novice comme moi. Je m'apprête à faire demi-tour, pour aller explorer les hauteurs vers le Sud, quand j'entends un léger craquement.
Mon coeur s'accélère. "Attention à ne pas te déconcentrer Ellõra ! "
Je fouille les alentours du regard. Rien vers la plage. Cela vient forcément d'une des maisons abandonnées. Je me force à respirer calmement et m'approche à pas de loup.
J'espère que c'est un animal. Les grandes prêtresses Indigo pensent qu'aucun humain n'a pu survivre dans ces contrées devenues trop froides.
Je marche sur une pierre instable, détachée d'une clôture effondrée, et manque de me tordre la cheville. J'étouffe un cri et me maudit intérieurement.
Trop tard. La "chose", je ne sais pas comment l'appeler, a détecté ma présence. J'entends des bruits de course. Elle fuit. Je me lance à sa poursuite sans réfléchir.
"Tant pis pour ma concentration, je dois savoir ce que c'est ! "
Je me dirige vers le bruit, zigzagant entre les constructions effondrées, et je trouve que cela ressemble étrangement à la course d'un être humain. Mon cœur tambourine dans ma poitrine et je ralentis inconsciemment.
Je ne suis pas de taille à affronter seule un humain hostile. Au détours d'une ruelle dégagée, j'aperçoit une silhouette de bipède qui s'éloigne d'une foulée souple. C'est un homme. Il se fige et se tourne vers moi. Je stoppe instantanément ma course.
Il est trop loin pour que je distingue les détails de son visage. Il est habillé de noir et une capuche recouvre ses cheveux.
"Oh my goddess !"
Les seuls humains qui s'habillent de noir aujourd'hui sont les adeptes de la magie noire. Ceux que les Indigos combattent !
Nous nous observons quelques instants. Il se retourne et repart d'un pas tranquille, comme si il était sûr que je ne le poursuivrais plus ! Il a raison. Je n'ai pas le courage ou l'inconscience de le faire. Le temps m'est compté. Je dois regagner rapidement le caroubier et essayer de méditer efficacement pour retrouver l'énergie mentale nécessaire à mon retour.
Je lance une menace à voix basse, que je suis la seule à entendre :
-Je reviendrai et je découvrirai qui tu es !
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Liverne Grigois
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Il y a 6 mois
M.B.Auzil
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Il y a 6 mois
Mischa
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Lucie Feyre
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Urban Claire
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