Fyctia
29 - Et le regretter
Je ne sais pas pourquoi j’ai dit ça, mais l’ambiance change du tout au tout en un claquement de doigt.
— Ah bon… pourquoi n’ai-je pas pensé à ça plus tôt ? Tant d’énergie déployée pour t’attirer dans mon lit et en fait, il suffisait d’un peu de danger !
— Si tu fais quoi que ce soit qui te mette en danger volontairement, je t’abandonne sur le rocher de la Gabinière et tu te débrouilles pour nager jusqu’à Port Cros.
Il regarde en direction de l’île, avec une mine déçue.
— OK, OK, je serais sage !
On vérifie tout une dernière fois, et avec un signe de tête d’encouragement, je le guide sous l’eau.
Je respire calmement dans mon embout buccal. La plupart des gens trouvent qu’il faut un moment pour s’habituer à respirer avec un morceau de silicone dans la bouche, mais ça ne m’a jamais posé problème.
Anthony n’a pas l’air de mon avis. Il remue beaucoup trop ses bras et ses jambes. Je lui fait le signe des plongeurs pour savoir s’il va bien : index et pouce qui se touchent à l’extrémité, les autres doigts levés. Il me répond pour me signifier que ça va. C’est plutôt encourageant. Malgré son air paniqué, il semble prendre ses marques petit à petit. Je devrais être dépitée qu’il n’ait pas renoncé, mais, sous l’eau, je n’ai pas le cœur à lui en vouloir. Il va avoir droit à la sortie de sa vie !
Le spectacle marin me coupe toujours le souffle. Et je vois bien qu’Anthony est impressionné, lui aussi. Une fois qu’il a pris ses marques, il se déplace le long de la roche, curieux d’y découvrir les parois couvertes d’anémones et d’éponges. Quelques mérous et rascasses passent à proximité, nous laissant les observer de loin.
Mes champs d’études sont situés un peu plus profond que ce que nous autorise son baptême, mais je lui les montre alors que nous les survolons.
Tout le visage d’Anthony s’est illuminé. Est-ce qu’il regrette de ne pas avoir suivi une carrière scientifique, au lieu de rentrer dans l’entreprise de son père ? Il avait largement les capacités pour !
Quand je lui fais signe de remonter, il me surprend en me prenant la main. Je voudrais me dégager, mais techniquement, je suis censée être son instructeur de plongée pour aujourd’hui. Je lui demande si tout va bien et il acquiesce. Pourtant, au lieu de s’éloigner, il se rapproche encore et me prend dans ses bras. Cette fois, ma réaction est épidermique et je me dégage. Qu’est-ce qu’il lui prend ?
Je me propulse avec toute la force de mes palmes et brise la barrière avec la surface. Me débarrassant de mon embout buccal au plus vite, je me tourne vers lui.
— Non, mais ça ne va pas ? Tenter de me couler ne compte pas pour notre pari !
Il me fait son grand sourire de Frimeur, imperméable à ma colère.
— C’était magique ! Wow, Manon, c’est vraiment ça ton métier ? Merci pour le tour, j’ai adoré ! Et tu as vu tous ces poissons ? Et les buissons ? C’est toi qui les a planté ?
Voilà qui me calme. Ah, l’enthousiasme de la première plongée ! Je me rappelle de la mienne, c’était si magique, si beau… que je n’ai jamais pu arrêter, pas même en hiver quand l’eau est glaciale et la mer agitée.
— Non, pas vraiment, on réhabilite l’herbier existant pour éviter sa disparition.
— C’est difficile à faire ?
Pour la première fois de ma vie, je suis en train de découvrir un Anthony Roussel qui s’intéresse à quelque chose sans le tourner en dérision.
— Les tentatives existantes n’ont jamais abouti à une solution perenne.
Je m’apprête à me lancer dans une longue explication, quand soudain quelque chose de très évident me saute aux yeux.
— Anthony, où est passé le Beau Soleil ?
J’ai beau plisser les yeux, autour de nous, il n’y a que la mer et l’îlot… mais pas de voilier.
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paul geister
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Il y a 2 ans
Jo_RileyBlack
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Cécile G
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Laeticia LC
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Maryline PIAUD
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Il y a 2 ans