Fyctia
28 - Promettre l'impossible
Je commence à gravir l’échelle mais il se précipite à ma rencontre.
— Non, non, je ne vais pas me dégonfler !
C’est bizarre, sa belle assurance est quelque peu entachée par la façon dont il regarde les bouteilles.
— C’est un super site ici même à faible profondeur, tu vas voir !
Mon ton enjoué ne semble pas lui plaire du tout. Il fronce les sourcils, comme s’il essayait de décider si ça en valait le coût.
— Rassure-moi, tu sais nager ? me moquai-je.
— Mieux que toi, grommelle-t-il.
Peine perdue, je vois bien qu’il n’en mène pas large. Je lui donne encore deux minutes avant qu’il n’aille se cacher dans les jupes de Baptiste.
— Si tu as trop peur, tu n’es pas obligé…
Ça m’arrangerait bien, même, de pouvoir aller faire mes post-traitements. J’adore faire découvrir les fonds à des débutants, mais moins quand ma tête me crie “tu n’as pas le temps, tu n’as pas le temps”…
C’était la provocation de trop. Il redresse les épaules, respire un grand coup et déglutit bruyamment.
— Non. Je vais le faire. Pas de souci. Après tout, on a été des animaux marins, il y a très longtemps, non ?
Il y a vraiment très longtemps. Je suis quasi-sûre qu’il va abandonner avant que j’ai fini de l’équiper. Rien que la façon dont il regarde sa combinaison en dit long.
— Je suis obligé de mettre ça ?
Il croit vraiment qu’il va plonger en maillot de bain ? Je hoche la tête et il l’attrape avec une expression faciale appropriée à la découverte d’une bouteille en plastique en pleine mer.
— Mais c’est froid !
Les combinaisons ne sont pas vraiment froides, c’est sa peau qui a chauffé au soleil qui est trop chaude.
— Tu devrais survivre.
— Très drôle.
J’ignore son grommellement pour me concentrer sur les vérifications des bouteilles.
S’il était réticent à l’idée de mettre une combinaison, ce n’est rien comparé aux coups d’œils plein d’appréhension qu’il jette aux bouteilles.
On n’est vraiment pas rendus.
Il finit par s’habiller, en grimaçant comme si on le torturait. Je lève les yeux au ciel.
— Besoin d’aide ?
Anaïs est revenue en sauveuse.
— Par pitié, l’imploré-je.
Ses yeux bleus pétillent de malice. Il faut croire qu’elle ne m’en veux pas de mon attitude irascible. Quant à savoir, si moi, je suis toujours agacée… je n’en ai aucune idée. J’ai n’ai jamais aimé me retrouver en groupe et je persiste à penser que cette excursion se passerait beaucoup mieux si nous n’étions que toutes les deux.
Anthony descend dans l’eau et se met à battre des bras bien plus vite que nécessaire.
— Calme-toi. Respire. Ton corps sait flotter.
Il grommelle quelque chose qui ressemble fortement à “seulement si je meurs”.
Nana vérifie une dernière fois nos niveaux d’oxygène, lui répète comment bien respirer et comment signaler s’il a un problème. Je suis prête à parier qu’il va s’évanouir avant même d’être sous l’eau. J’espère que ce ne sera pas après, en tout cas… je n’ai pas du tout envie de prendre un nouveau jour de retard à cause d’un détour par les urgences.
— Reste bien calme, lui conseille Anaïs alors qu’on voit bien qu’il va nous claquer entre les doigts. Au moindre problème, tu te signales et tu remontes.
— Il ne faut pas faire des paliers ? demande-t-il d’une toute petite voix.
— Pour la décompression ? Pas à cette profondeur.
Quand j’ai passé mon brevet d’instructeur, je n’avais pas vraiment en tête qu’il me servirait avec le Frimeur qui me rendait la vie impossible au lycée. S’il savait que j’ai commencé la pratique à cette même période, justement pour penser à autre chose qu’à ses piques incessantes, il pourrait même en être flatté !
Anaïs me passe les équipements d’Anthony pour que je l’aide à les enfiler dans l’eau, ce qui est plus facile que de sauter du bateau avec.
Ce n’est qu’à ce moment-là que je réalise qu’elle ne s’est pas équipée elle-même.
— Tu ne viens pas ?
Elle lance un regard furtif en direction de la poupe où Baptiste bronze au soleil avant de secouer la tête.
Oh non. Tous les deux, seuls sur le Beau Soleil… si on retrouve le bateau en un seul morceau, on aura de la chance !
— Pas de batifolage dans ma cabine !
— Chuuuuuuut !
On tourne toutes les deux la tête vers Anthony mais il a l’air trop occupé à éviter de se noyer en mettant ses palmes.
Ma meilleure amie me passe la bouteille du Frimeur, alors que je lui lance un regard méfiant qu’elle ignore.
— Viens par là !
Le Frimeur m’obéit avec difficulté. Je vois bien que c’est l’appréhension, le problème, et non la nage, mais je ne peux m’empêcher de le charrier :
— Peut-être qu’on devrait commencer par un cours de bébé nageur.
— Ah, ah, ah ! La prochaine fois, je t’emmène à la salle avec moi, on verra si tu ries autant.
Pfff, s’il croit que je vais mettre les pieds dans ce genre d’endroit !
Anthony met un temps incroyable à endosser sa bouteille. Mais c’est quand il doit mettre l’embout buccal dans sa bouche que ça devient vraiment marrant.
— Comment tu veux que je respire avec ça ?
— C’est le principe même du truc : te permettre de respirer.
— On dirait un truc médical pour les gens dans le coma !
— Je te promet qu’il ne va rien t’arriver !
— Ah bon ? Tu serais prête à le jurer ?
— Je serais prête à te promettre de sortir avec toi, si quelque chose se passe mal !
16 commentaires
Caroline-Noëlle
-
Il y a 2 ans
iris monroe
-
Il y a 2 ans
A.m_books
-
Il y a 2 ans
Rose Foxx
-
Il y a 2 ans
Maryline PIAUD
-
Il y a 2 ans
Ninja
-
Il y a 2 ans
R.T. Manon
-
Il y a 2 ans
Coeur fondant
-
Il y a 2 ans
Lina Lépy
-
Il y a 2 ans
Jo_RileyBlack
-
Il y a 2 ans