Fyctia
Je vis tellement ...
"Je vis tellement au-dessus de mes moyens que nous menons, eux et moi, une existence complètement séparée " - Oscar Wilde
J'arrive enfin près de chez moi. Je n'ai qu'une idée en tête : me plonger dans un bon bain chaud pendant que James Arthur s'occupera de l'ambiance musicale depuis mon enceinte Bluetooth. Après avoir entendu crier les mômes tout l'après-midi et m'être farci la moitié du hit d'exLoser3, j'ai bien besoin de me désintoxiquer les oreilles.
J'ai décidé de ne plus penser à Loser4, qui, lui non plus, n'est plus un loser. Selon Google, c'est maintenant un architecte de renom. Quand je pense à la nouvelle étagère qu'il avait montée pour qu'elle s'écroule deux heures après et aux plans du tout nouvel aéroport design qu'il a dessinés, j'espère qu'ils sont bien assurés chez Emirates Airlines.
J'en veux un peu à Rose. Je n'avais pas besoin de savoir ça. J'aurais préféré que Loser4 reste Loser4. Mais après tout, qu'est-ce que ça peut bien me faire que deux de mes ex aient réussi et soient maintenant plein aux as ? S'ils étaient devenus subitement homosexuels ou phobiques des clémentines au point de ne plus pouvoir passer dans le rayon fruits des supermarchés, OK, j'aurais pu me remettre en question, mais là... Non, franchement, tant mieux pour eux. Je leur souhaite le meilleur. Et à leurs nouvelles conquêtes aussi. Même si elles ne sont probablement qu'une bande de sangsues écervelées qui leur pomperont tout leur fric... Même s'ils ont déjà la fortune et que comme chacun le sait, on ne peut pas tout avoir dans la vie... Même si la roue finit toujours par tourner et que statistiquement, ils ont maintenant 150 fois plus de chances de finir cocaïnomanes, poursuivis par le fisc, enrôlés dans une secte et seuls au moment de leur mort... Non, vraiment, je suis contente pour eux.
Je me gare sur ma place de parking réservée et comme à chaque fois, je me sens privilégiée, un peu coupable même. Puis, je pense aux gens qui se garent sur les trottoirs ou piquent les places handicapées, et je vais tout de suite mieux. Ils iront pourrir en enfer avant moi.
Je me dirige d'un pas léger vers la façade haussmannienne de mon immeuble. Je repère une silhouette masculine à côté de l'interphone. Son attitude, les mains dans les poches de son blouson en cuir et son regard qui papillonne comme s'il attendait un rencard, m'étonne. J'habite un quartier chic où la moyenne d'âge fait qu'on rencontre peu de jeans comme le sien. J'approche en ralentissant le pas. Je m'arrête brusquement en le reconnaissant.
Bastien Reno.
Il m'aperçoit et m'offre un large sourire insolent.
Je ne lui rends pas son sourire.
— Qu'est-ce que tu fiches ici ?
Il ironise :
— Oh, pardon. Tu as aussi privatisé cet espace public ?
— Tu te trouves en bas de mon immeuble.
— Oui mais c'est aussi l'immeuble où a résidé Aurélien Dasc pendant quelques mois... Je fais mon travail d'investigation.
Je pouffe.
— D'investigation ? Carrément !
Il siffle d'admiration en reportant son regard sur la façade haussmannienne.
— C'est un sacré immeuble !
C'est vrai. C'est un véritable luxe d'habiter à cette adresse. Je le dois à ma mère. C'est le seul bien matériel que j'ai accepté d'elle. En partie parce qu'elle l'avait offert à mon grand-père. J'ai passé beaucoup de temps avec lui dans cet appartement quand Aria s'absentait pour un tournage. Je ne voulais pas qu'elle le revende après sa mort, j'y ai trop de souvenirs. Et puis, parce que c'est très compliqué de se loger convenablement à Paris et qu'il y a une grande baignoire à pieds où on peut s'allonger de tout son long même si on fait 1 m 90 (pour rappel, Ryan Reynolds mesure 1 m 88 ).
Bastien continue de contempler le bâtiment en pierre de taille.
— Le loyer ne doit pas être donné !
Je ne peux m'empêcher de le moucher :
— Je suis propriétaire.
Je ne lui dis pas qu'en revanche, je paie des charges astronomiques et que j'ai plusieurs factures en retard.
Je profite de sa surprise pour composer le digicode et pénétrer dans le hall. J'espère lui fausser compagnie mais il se presse derrière moi avant que la porte ne se referme sur lui.
Je l'ignore et grimpe au deuxième étage. J'entends ses baskets crisser sur les marches en bois à ma suite. Arrivée devant la porte de mon appartement, je pivote vers lui.
— Là, c'est mon espace privé. Au-revoir Bastien.
Je me retourne et introduis la clé dans ma serrure.
— Allez, Clem' ! Une petite visite ?
Je secoue la tête et lui claque la porte au nez.
De l'autre côté de la paroi, je l'entends crier :
— Très bien, ça va être moins pratique pour parler, mais bon !
Je souris, amusée malgré moi par sa comédie. J'ôte mon manteau mais n'allume pas tout de suite la télé comme je le fais machinalement d'habitude en rentrant chez moi.
— En fait, ce n'est pas que pour mes investigations que je suis ici... Je me demandais si tu ne cherchais pas un colocataire, à tout hasard !
J'éclate de rire. Ce mec a peur de rien. La demande est tellement absurde que je me sens obligée de répondre.
— Pas du tout ! Et si j'en cherchais un, tu serais probablement la dernière personne à qui je penserais !
— Mais je lave mon bol après mon petit-déj' !
Il insiste et je commence à me demander si ce n'était seulement qu'une boutade.
— Non, mais t'es vraiment sérieux, là ?
— Bah, je suis un peu en galère en ce moment et puis, ton appartement a l'air grand et plutôt spacieux, si j'en crois ce que m'a raconté Aurélien Dasc... Ce ne serait que l'affaire de deux mois, pas plus. Juste le temps de me retourner...
Non mais je rêve ! Il projette vraiment de devenir mon colocataire !
Excédée, je rouvre la porte à la volée pour mettre les choses au clair :
— Il n'en est pas question. Aucune chance que ça arrive. En aucun cas. Ja- mais. Compris ?
Je claque à nouveau la porte et me dirige vers le salon, bien décidée à faire comme d'habitude.
Sa voix se fait de nouveau entendre :
— Tes voisins vont finir par porter plainte pour nuisance sonore !
— Non, ils sont à moitié sourds !
Je m'en veux de lui avoir répondu et décide de l'ignorer jusqu'à ce qu'il veuille bien s'en aller tandis qu'il continue à plaider sa cause.
A court d'arguments, il conclut :
— Bon, je ne voulais pas en arriver là mais tu ne me laisses pas vraiment le choix... Tiens, ça te fera sans doute changer d'avis !
Je me lève de mon canapé. De quoi parle-t-il ?
Je remarque qu'il a fait glisser une feuille de papier A4 sous la porte. J'hésite à m'en saisir comme si elle pouvait me brûler les mains.
De l'autre côté, il ajoute :
— Bien sûr, ce n'est qu'une ébauche...
Je m'empare de la feuille et commence à lire :
Projet d'article pour "Le Petit Hebdo"
Scoop : L'ex d'Aurélien Dasc, le célèbre DJ en vogue, n'est autre que la fille d'Aria Fleury...
20 commentaires
Sand Canavaggia
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Il y a 5 ans
DMDO
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Il y a 5 ans
Elsa Carat
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LilouJune
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Karl Toyzic (Ktoyz)
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