Fyctia
Joe (1)
Je me sens lasse et épuisée à mon réveil.
Rien d’étonnant après la nuit décousue que je viens de passer.
Même si je devrais avoir quelques éléments de réponse d’ici quelques heures, je n’ai fait que me tourner et me retourner dans mon lit en quête d’une explication, les heures défilant lentement sous mes yeux sur les chiffres lumineux de mon réveil.
Comment en suis-je arrivée là ?
Au-delà de la trahison cuisante, je ne devrais être blessée que dans mon amour propre.
Pourtant c’est bien plus profond que ça. Marc m’avait courtisée des mois durant. Nous avions d’abord été amis puis complices et nous étions sortis ensembles. Ça n’avait pas été un coup de foudre. Nous avions appris à nous connaître, à s’apprécier, à comprendre que l’absence de l’autre créait un manque, et comme une évidence j’avais su que j’étais amoureuse de lui.
C’était venu en douceur sans bruit, sans heurt. Une douce tiédeur d’été qui vous enrobe d’une chaleur bienveillante.
En l’espace de quelques semaines, Matthew, lui, avait débarqué dans ma vie tel un tourbillon et chamboulé mes certitudes, mis à mal les remparts que j’avais érigés pour me protéger. Je ne peux supporter de m’être trompée sur lui et sur ses intentions.
C’est avec cet état d’esprit, trouble et soucieux, que je me rends à mon bureau.
Tel un automate, je salue mes collègues et m’atèle à la tâche sous le regard inquiet de mon amie. Je tente de me concentrer sur les dossiers en cours et je vois à peine passer la matinée.
A midi, Ted nous propose de sortir déjeuner. Aux regards qu’ils échangent et à l’inquiétude que j’y lis, je comprends que c’est un moyen détourné pour essayer de me remonter le moral.
Je prends conscience de devenir un poids pour mes amis avec mes histoires et prétexte un dossier à terminer pour refuser.
Après avoir insisté pour que Jane accepte l’invitation, je les vois quitter le bureau, perplexes.
Leur préoccupation à mon égard leur aura peut-être permis de laisser de côté leur dilemme personnel.
De retour de son déjeuner, mon amie reste évasive sur son tête à tête. Son attitude ne laisse rien transparaître. Elle ne semble qu’apporter plus d’attention à mon bien-être, ce qui loin de me rassurer, m’angoisse d’avantage.
A l’image de la matinée, l’après-midi se déroule dans une ambiance studieuse, bercée par le bruit de l’imprimante, du cliquetis des doigts sur les claviers et des sonneries de téléphone.
Ne voulant pas rentrer chez moi me changer avant mon rendez-vous je traîne à relire des rapports que j’ai déjà contrôlé.
A en croire l’attitude de Jane, je la soupçonne d’en faire autant. Lorsque finalement j’éteins mon ordinateur, je l’entends m’imiter, se lever et prendre sa veste. Je me lève à mon tour alors qu’elle me fait face.
— Ça va aller !
J’acquiesce à peine plus persuadée qu’elle.
— Quelle que soit l’heure à laquelle tu rentres, appelle-moi, je serai là dans la minute s’il le faut.
— Merci, t’es une amie en or !
Je la serre rapidement dans mes bras et nous sortons de l’immeuble ensemble.
Après lui avoir promis de, cette fois, lui donner des nouvelles, nous partons chacune de notre côté.
Il me faut à peine dix minutes pour me rendre dans le bar où je lui ai donné rendez-vous. Plutôt austère, l’endroit est à l’image de ma tenue dont la vitre me renvoie le reflet avant d’entrer dans les lieux. Un tailleur pantalon noir, une chemise gris anthracite qui donnent à mes yeux une couleur acier.
Il ne me faut qu’un instant pour le repérer. Sa carrure, son charisme rayonne malgré la tension que je lis dans les marques qui sillonnent son front. Ce côté ténébreux ne laisse pas indifférentes la serveuse et deux clientes à une table voisine qui lui adressent des œillades de biche.
J’ai besoin d’un instant pour me reprendre. J’avance dorénavant vers lui d’un pas décidé même si chacun de ces pas ne fait qu’augmenter mon appréhension.
5 commentaires
Ellover
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Il y a 3 ans
Jess Swann
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Il y a 3 ans