KBrusop Saveur Citron Joe (2)

Joe (2)

Je grimpe à mon tour les escaliers et trouve sans difficulté la chambre d’Ashley, un panneau « no trespassing » rose girly fixé sur la porte.


Je frappe doucement à la porte pour ne pas réveiller la petite Lilly qui dort profondément dans la pièce adjacente.


— Ashley, c’est Joe, je peux entrer ?


J’entends le bruit de sanglots étouffés mais elle ne me répond pas. Comme « qui ne dit mot consent » j’appuie sur la poignée de la porte qui s’ouvre sans résistance. J’entre prudemment

dans la pièce et trouve la jeune femme effondrée sur son lit, le visage enfoui dans l’oreiller, les épaules tressautant au rythme de ses sanglots.


Je jette un regard circulaire sur la pièce. Quelques photos accrochées au mur, un bureau sur lequel traînent quelques livres scolaires et un ordinateur portable, une décoration dans les tons pastel et des meubles d’un blanc immaculé. Sur une liseuse quelques peluches, vestiges d’une enfance révolue et sur le pouf près de l’armoire un amoncellement de vêtements, résultat sans conteste de la recherche de la tenue idéale, raison de ma présence dans cette pièce. Je m’approche du lit et m’y assois.


— Chut, calme-toi ! dis-je doucement en lui caressant les cheveux.


Elle relève lentement la tête, dans son regard toute la tristesse du monde.


— Il ne me laissera jamais aller en boite à moins que je ne mette un col roulé… je vais avoir l’air ridicule, plutôt mourir que d’y aller habillée comme une gamine…lâche-t-elle dans un hoquet, une larme traçant un nouveau sillon sur sa joue.


J’aperçois une boite de mouchoir sur le bureau et me lève pour aller la chercher.


— Ecoute, c’est ton père et il t’aime. Tu grandis plus vite qu’il ne voudrait et je crois que tu y es allée un peu fort avec cette tenue. Il ne te voit plus comme une petite fille mais pas encore tout à fait comme une femme, et là… comment dire…dis-je en lui désignant sa mini robe, c’est un peu radical comme transformation.


Elle s’est redressée en position assise sur le lit et prend le mouchoir que je lui tends avant de reprendre ma place à ses côtés.


— De toute façon c’est trop tard, il ne voudra plus que j’y aille maintenant, je lui ai dit que je le détestais, ajoute-t-elle sombrement en triturant son mouchoir, les larmes menaçant de revenir.


— Et tu ne le pensais pas, il le sait très bien…


Je passe une de ses mèches de cheveux derrière son oreille et elle me regarde en me faisant oui de la tête.


— Dans ce cas si on essayait de trouver une tenue pour satisfaire tout le monde.


Elle acquiesce lentement même si je vois bien qu’elle doute que cela existe.


— Mais avant toute chose dis-moi où je peux trouver du lait démaquillant et du coton, parce que là tu es plutôt partie pour faire un tabac à une soirée d’halloween…


Après avoir regardé son reflet dans le miroir ma remarque a l’effet escompté et lui redonne le sourire.


— Dans la salle de bain à droite dans le couloire.


Je m’y rends et y trouve tout le nécessaire pour redonner un visage humain à cette jeune fille. J’embarque également ce que je suppose être sa trousse de maquillage, une brosse à cheveux et quelques accessoires de coiffure. Je retourne dans la chambre et retrouve Ashley enveloppée dans une grosse veste en laine toujours assise sur le lit, impatiente dorénavant de savoir ce qu’on va bien pouvoir trouver.


Je me positionne sur le lit face à elle, imbibe un coton de produit et commence à la démaquiller.


— Je peux te poser une question… un peu bizarre ?


Les yeux clos, elle relève un sourcil d’interrogation et me fait oui de la tête.


— Tu préfères être quoi : une glace à l’eau ou une tartelette aux fraises ?


Elle ouvre un oeil, puis l’autre et me lance un regard incrédule avec un haussement d’épaule mais j’ai toute son attention.


— Une glace à l’eau c’est frais et acidulé mais sans surprise…cheap, plutôt artificiel, un vulgaire glaçon avec des colorants et des arômes. Tu en trouves partout, la manges en un rien de temps, et après l’avoir consommée elle ne laisse pas un souvenir impérissable.


Je fais une pause pour voir si elle suit mon raisonnement. Au froncement de ses sourcils je vois qu’elle saisit la métaphore.


— Et la tartelette aux fraises ?


— Elle est plus sophistiquée, subtile, les produits sont nobles. Elle est plus inaccessible, tu dois faire des efforts pour en trouver une digne de ce nom. Pour la manger il faut y aller doucement, y mettre les formes, la déguster, en apprécier toutes les saveurs, et qui n’a pas en souvenir la meilleure tartelette aux fraises qu’il n’ait jamais mangé…


Elle jette un œil sur sa tenue, elle semble la voir différemment.


— Incontestablement je veux être une tartelette aux fraises, tu crois que tu peux y arriver ?


Son sourire fait écho au mien et je me lève pour aller jeter un oeil à sa garde robe.


— On peut toujours essayer, dis-je en passant en revue les vêtements de son armoire.



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6 commentaires

ÉmilieC28

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Il y a 3 ans

Tu vois encore une fois je suis un peu gênée par les dialogues et le message qui se cache derrière les deux derniers chapitres, on juge les femme sur leur apparence, une femme sexy est donc vulgaire et commune ? Le problème n'est-il pas plutôt la réaction des hommes et leur attitude plutôt que la tenue ? J'ai fondamentalement un problème avec ce genre de prise de position. Et si les pères réagissent comme ça c'est parce qu'ils sexualisent le corps des femmes, elle peut aussi vouloir s'habiller comme ça pour elle, pour se sentir belle et plaire, c'est son droit et le laïus sur les tartes aux fraises ou les glaces à l'eau c'est un peu maladroit, ça sonne un peu comme un jugement et beaucoup d'agressions se justifient sur cette base là "t'as vu comment elle était habillée ?" Désolée, comprends bien que je te fais ce retour parce que c'est un terrain miné sur lequel tu t'aventures et qu'aujourd'hui on essaye de déconstruire ces idées préconçues.

KBrusop

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Il y a 3 ans

Coucou, bon et bien là aussi désolée mais l’intention n’était pas une prise de position sexiste. Je te rejoins sur le fait qu’une femme ou une fille (ou un homme d’ailleurs 😉) doit avant tout se plaire à soi même avant de plaire aux autres. Et justement la métaphore portait plutôt sur le fait qu’il n’est pas nécessaire d’user d’artifice et d’être superficielle pour plaire et qu’on étant naturel et simple donc soi même on était tout autant attirant si ce n’est plus 😋… désolée pour la méprise et pour le manque de clarté.

Guyanelle

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Il y a 3 ans

Très joli moment avec la jeune niece paumée. On retrouve toute la finesse de Joe. 💕

Jess Swann

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Il y a 3 ans

Ah très malin la technique de Joe, elle est vraiment douée avec les jeunes. Ce petit moment de complicité est bien amené et j'ai hâte de voir ce qu'elle va trouver. Son statut d'outsider lui permet aussi de se rapprocher facilement de la jeune Ashley

KBrusop

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Il y a 3 ans

Oui et elle est d’un âge et d’une culture différente, ça aide 😉
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