Fyctia

Wendy me regarde, surprise.

— Quoi moi ? on n’a plus le droit de se lever du mauvais pied ? nous lance agacée l’intéressée en se calant de nouveau au dossier de sa chaise.

— Voyons, voyons… moi j’ai le droit c’est disons...culturel, Jane et bien… c’est Jane…aïe ! fais-je en réponse à la tape que m’assène mon amie, un sourire franc aux lèvres.

— …mais toi non ! ça fait quoi sept ans qu’on se connait et quatre qu’on se voit ou se parle toutes les semaines…je ne t’ai jamais vu cet air renfrogné, et toi Jane ?

— Moi non plus, à si deux fois en y réfléchissant bien !

— A oui c’est vrai deux fois, dis-je en réponse à Jane avec un sourire complice. Le ténébreux Stephen…

— Je ne veux plus en entendre parler…

— Bingo, s’exclame Jane en levant la main en l’air pour que je frappe dedans. Mais tu nous avais dit qu’il s’était lassé de ton indifférence l’autre soir et qu’il s’était à peine excusé…

— C’est le moins qu’on puisse dire…en office d’excuse il m’a dit qu’il n’avait pas vraiment fait attention à moi, parce qu’il avait tellement de succès que lorsqu’il était avec ses amis il évitait de rendre leurs regards aux filles qui le mataient…grand seigneur il ne veut pas que ses potes soient jaloux !

— Tu plaisantes ?! dit Jane en éclatant de rire.

— Même pas, répond Wendy qui maîtrise que difficilement le fou rire qui la gagne. Il est insupportable de confiance en lui. Quand il a vu que je ne faisais pas de cas de lui l’autre soir, il m’a salué en me disant que je ne savais pas ce que je manquais !

C’est à mon tour de ne pouvoir retenir mon rire. Jane se tient les côtes et Wendy s’essuie une larme qui perle au coin de l’oeil d’avoir trop ri. Nous pouvons nous targuer d’avoir attiré les regards curieux et amusés des autres clients du café en ce samedi matin.

— Qu’est ce qui t’agace autant dans ce cas. Il ne doit pas s’encombrer d’une conquête potentielle qui l’ignore totalement, tu ne devrais pas le revoir de si tôt…

— Détrompe-toi, me dit-elle d’un air effaré.

— Il est passé deux fois cette semaine et chaque fois avec une fille différente, type mannequin…il me les a présenté, comme si j’en avais quelque chose à faire ! Il a passé son temps à m’appeler pour que je leur serve quelque chose. Le deuxième soir Bob a fini par me remplacer et lui a même fait quelques allusions douteuses pour le déstabiliser mais il est imperturbable…c’est dingue ! Même Bob ne l’impressionne pas…et pourtant il y met de la bonne volonté !

— Sérieux, mais il cherche quoi ?

— J’en sais rien, je ne comprends pas, je l’envoie balader, je l’ignore, je lui parle mal, mais rien n’y fait, il m’a même laissé son numéro de portable devant l’une des filles en me disant qu’entre nous il pourrait se passer quelque chose d’exceptionnel !

— Quel gougeât… !

— Mmmh, acquiesce Wendy les yeux froncés et le regard dans le vide.

— Mais il te plaît, annonce Jane la tête en appui sur sa main, le coude posé sur la table.

— Il m’agace il est tellement…sexy, ça devrait être interdit ! Mais ce qui est pire que tout c’est de le voir si arrogant. Il est tellement sûr de lui que je vais craquer que ça me rend folle. Je ne peux en aucun cas lui donner raison, c’est une question de principe… mais il va falloir qu’il arrête de venir me narguer, ça me ronge.

— Il faudrait qu’il soit moins sûr de lui ! dis-je après réflexion.

— Ah oui et tu fais ça comment… ?

— Il faut qu’il se sente en compétition et qu’il pense que tu es indisponible !

— Super idée mais je ne vois pas comment ! Il faudrait un homme qui tienne la comparaison et sincèrement je ne vois pas !

Nous sommes toutes les trois plongées dans nos pensées à la recherche du candidat idéal quand la solution me vient en tête. J’observe mes deux amies et hésite un instant.

— Je crois que j’ai trouvé…dis-je d’une voix incertaine.

Mes amies m’observent méfiante, je sais que l’idée est audacieuse et quelle ne va probablement pas leur plaire mais je me lance.

— Ted !

— Non ! disent-elles à l’unisson.

— Bon je sais que ce n’est pas l’idée du siècle compte tenue de la tension qu’il y a entre vous en ce moment, dis-je en décryptant la réaction de Jane, mais justement ça pourrait faire une distraction bienvenue pour détendre l’atmosphère…et sincèrement il tient largement la comparaison, dis-je en me tournant vers Wendy. Il est beau, charismatique, et il impose le respect.

— Oui c’est sûr, avance doucement Wendy en observant Jane qui est perdue dans sa réflexion, mais je ne crois pas que…

— Non elle a raison, coupe Jane, c’est tout à fait ce qu’il nous faut…à toutes les deux. C’est l’homme de la situation. Stephen n’osera pas se mesurer à lui et tu en seras débarrassée. Et moi j’ai besoin de prendre du recul, ça ne pourra qu’être bénéfique !

Je regarde tour à tour mes deux amies et je suis rassurée de voir les traits de leurs visages se détendre.

— Bon d’accord, on va attendre de voir si Stephen persiste et si c’est le cas on demandera à Ted s’il veut bien se prêter au jeu. En attendant, qu’est ce que vous diriez si on allait faire les boutiques pour trouver un cadeau de rêve à la petite Lily ?

Wendy et Jane acquiescent avec un franc sourire et nous quittons le café pour nous rendre chez Hamleys pour trouver notre bonheur.