Fyctia

J’avoue que je ne peux moi-même faire autrement que de regarder les joueurs envahirent le terrain.

Finalement j’aime beaucoup ce sport et même si tous ses co-équipiers n’ont pas la même silhouette que Matthew, le spectacle est plutôt agréable.

Nous nous installons pour les regarder.

La petite Lily vient se mettre sur mes genoux et j’ai une sœur Stanton de chaque côté, Ness et Anna en l’occurrence, qui, en attendant que le match commence, me bombardent de questions.

Je suis soulagée de voir l’arbitre siffler le début du match et l’attention se porter sur autre chose que ma personne.

Il y a un peu de monde dans les gradins et l’ambiance entre les supporters des deux équipes est cordiale.

Le match est prenant et je me laisse vite prendre dans l’excitation générale.

A la mi-temps, le score est serré même si l’équipe de Matthew mène de quatre points.

Le temps est radieux, la température est relativement chaude pour la saison et nous profitons de l’arrêt de jeux pour aller chercher quelques boissons avec Rose qui prend à son tour son lot d’informations à mon sujet. Je me laisse cuisiner de bon cœur, reconnaissant le côté protecteur à l’égard du seul garçon de la fratrie.

La petite Lily part jouer avec son cousin, laissant place à des questions plus personnelles auxquelles je n’ai pas le temps de répondre car le match reprend.

Malgré de nombreuses tentatives musclées, aucune des deux équipes ne marque de points pendant un long moment.

A la vingtième minute de la deuxième période l’équipe adverse marque un essai transformé, changeant la donne du match.

La tension grimpe sur nos rangs à l’approche du coup de sifflet final lorsque l’un des joueurs adverses creuse l’écart en marquant un drop.

Il ne reste que trois minutes de jeu lorsque l’un des co-équipiers de Matthew réussit à écraser le ballon derrière l’en-but adverse. Pour transformer l’essai l’angle de tire n’est pas favorable, autour de moi la tension est à son comble.

A mon grand étonnement c’est Matthew qui s’avance et se positionne. Avant de s’élancer, il tourne son visage vers les gradins, nos regards s’accrochent, il semble déterminé, un léger sourire se dessine sur ses lèvres. Il se retourne, se concentre sur son action et s’élance. Le ballon passe entre les poteaux, et d’un seul mouvement la foule se met debout pour applaudir la performance. Les dernières minutes passent en un éclair et l’arbitre siffle la victoire de notre équipe accueillie par les cris de joie autour de moi.

Sur le terrain l’équipe est en liesse portant leur botteur en triomphe. Le calme revient doucement tant sur le terrain que dans les tribunes.

Les joueurs congratulent l’équipe adverse en se serrant la main ou à coup de tape sur l’épaule.

Matthew, fier de lui, s’approche des gradins juste en dessous de nous, suivi par les autres joueurs de son équipe.

— Gente damoiselle, votre preux chevalier souffrirait-il l’honneur d’un baiser pour sa valeureuse victoire, dit-il en s’inclinant devant moi en contrebas.

— Preux chevalier, je lui réponds sous l’oeil amusé de nos spectateurs – public et joueurs réunis, il ne me semble pas qu’il s’agisse d’une victoire personnelle, cela serait injuste pour vos non moins valeureux co-équipiers.

Mon air espiègle fait mouche.

— Qu’à cela ne tienne, ils le méritent tout autant, me répond-il en guise de défit.

Je le regarde avec de gros yeux comprenant ce qu’il insinue.

Je n’ai pas le temps de réagir que les enfants commencent à scander « un bisou, un bisou », bientôt suivis par quelques adultes autour de moi, dont Ness, toute excitée.

— D’accord, dis-je moi aussi avec un air de défit, accueilli par les applaudissements.

Les joueurs ravis se mettent alors en file indienne et après s’être épongés d’une serviette s’approchent les uns après les autres pour que, penchée au dessus de la balustrade, je leur fasse une bise sur la joue.

Matthew, s’est adossé à un pilier, amusé, les bras croisés pour observer la scène et attendre son tour qui arrive enfin.

Alors qu’il s’approche je me relève et m’écarte légèrement.

— Je ne pense pas que ce soit raisonnable.

— Et pourquoi ça, me dit-il en penchant la tête de côté, sous l’oeil intrigué des gens autour de nous.

— La dernière fois il vous a fallu une douche froide, preux chevalier.

A peine ai-je prononcé ces mots que je les regrette déjà. Ils sont accueillis par l’hilarité générale et des regards curieux mais amusés de ses sœurs.

Je deviens rouge écarlate comprenant ce que laissent sous-entendre mes paroles.

— Je prends le risque, me dit-il en grimpant sur le muret et se maintenant à la balustrade pour être à ma hauteur.

Je m’approche lentement, ses yeux rivés aux miens, prends son visage dans mes mains, monte sur la pointe des pieds et lui dépose finalement un baiser sur le front.

Il redescend prestement et imite le signe d’un poignard dans le cœur comme s’il s’attendait à un autre type de baiser.

Je souris en secouant la tête devant la scène qu’il me joue.

Ses co-équipiers lui font quelques tapes dans le dos en se moquant de lui avant de se diriger ensemble vers les vestiaires pour prendre leur douche. Ness frappe dans ses mains, a priori très amusée de la situation contrairement à Colleen qui me lance un regard glacial. La première m’agrippe le bras d’un air enjoué pour redescendre les gradins tandis que le reste de la troupe réunit affaires et enfants pour quitter les lieux.