Fyctia
Chap 7: Un autre visage...
Vive la présomption d’innocence ! songeait Jeremiah en quittant Timothée après l’avoir salué. Ils étaient tous tellement convaincus de la culpabilité de Samantha que c’en était presque terrifiant. Heureusement qu’en France, la peine de mort était abolie depuis longtemps car c’était ainsi que l’on se retrouvait dans le couloir de la mort sans l’avoir cherché.
Jeremiah ne croyait peut-être pas Samantha réellement innocente du meurtre de son petit ami mais il était au moins résolu à fouiller et approfondir cette affaire. Ce n’était peut-être pas son rôle à proprement parler, mais c’était ce qui faisait de lui un si bon avocat. Il allait revoir le volumineux dossier de Samantha page par page, et il allait raisonner comme un bon procureur de la République le ferait. Son but ? Démolir tous les futurs arguments de Timothée quand il se présentera à la barre lors du procès et qu’il tentera de démontrer par le menu que Samantha a commis ce meurtre sans l’ombre d’un doute.
Samantha clamait haut et fort son innocence.
Qu’elle dise la vérité ou non, son rôle à lui était de persuader le jury qu’ils n’avaient pas la preuve irréfutable de sa culpabilité, qu’ils ne pouvaient donc pas simplement sur des conjectures briser la vie d’une femme au passé déjà si éprouvant.
Sur sa petite liste, il avait ajouté la mention “susciter la compassion” sous celle de "surveiller son langage". Dans quelques mois, cette petite liste serait cruciale et contiendrait tous les points clés qui feront la différence lors du procès.
Pour l’instant, la stratégie de Jeremiah pour tenter de convaincre le jury de l’innocence de Samantha, c’était de dresser une liste de suspects potentiels qui auraient pu commettre un meurtre. Peu lui importait qu’ils l’aient fait ou non, ce qu’il voulait montrer c’est qu’ils étaient nombreux ceux qui auraient pu entrer chez lui et pour X ou Y raisons le tuer à bout portant.
Jeremiah avait établi un calendrier de rencontre précis et régulier avec sa cliente. Les prochaines visites seraient plus confortables pour eux car il avait pu obtenir un permis de communiquer au directeur de l’établissement pénitentiaire pour accéder aux parloirs spéciaux réservés aux avocats, afin qu’ils puissent échanger en toute confidentialité avec leur client.
La régularité de ses visites et de leur dialogues futurs inciteraient peut-être Samantha à avouer son crime, si tant est qu’elle l’ait réellement commis. Dans tous les cas, cela ne changerait pas la décision de Jeremiah de se battre bec et ongle pour elle. Il avait accepté de la défendre et qu’elle soit l’auteur ou non du crime commis, ce n’était pas son rôle à lui de la juger. Il serait là pour elle , peu importe qu’il la sache coupable ou qu’il la croie innocente.
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Les semaines passaient et les entretiens se succédaient entre l’avocat et Samantha. Celle-ci supportait de moins en moins sa détention provisoire et implorait à chaque nouvelle entrevue avec Jeremiah qu’il fasse tout son possible pour la libérer au plus vite.
- Ce n'est pas aussi facile, lui expliqua-t-elle. On n'est pas aux États-Unis ici, ni dans n'importe quel autre pays anglo-saxon. En France, il n'y a pas de liberté sous caution avant le procès. Encore moins, avant un procès pour meurtre.
- Mais... Je vous ai engagé pour ça. Parce que je sais que ce n'est pas une affaire facile, que tout est contre moi et qu'ils veuillent m'enfermer jusqu'à la fin de mes jours pour un meurtre que je n'ai pas commis. C'est à vous de vous battre pour moi. Et ça commence maintenant ! Ne me laisser pas moisir en détention provisoire jusqu'à ce qu'il ouvre le procès. On sait tous les deux que ça peut prendre des années. Je ne survivrai pas à ça ! Vous n'imaginez pas comme c'est dur, ici !
Oh si, il l' imaginait très bien. Elle semblait tellement fragile, face à lui.
Les cernes sous ses yeux s'étaient encore davantage accentués et elle avait bien plus mauvaise mine qu'à sa dernière visite. Son teint était gris et même si ses cheveux étaient un poil plus coiffés que lors de leur première rencontre, sa détresse et son désespoir était pleinement visibles.
- Il faut absolument que vous me sortiez d'ici, reprit elle d'une voix claire et directive. Peu importe comment, je suis prête à tout pour sortir d'ici. S'il faut simuler un malaise, une AVC ou des convulsions, je peux le faire. Croyez-moi, j'en suis capable ! Je veux juste sortir d'ici le plus rapidement possible. Sortez moi de là, s'il vous plaît.
- Mais...
- Il n'y a pas de mais qui tiennent. Promettez-moi que vous allez tout faire pour me sortir de là !
Contrairement à ce que l'on pourrait croire, elle n'acheva pas sa phrase d'une voie stridente et désespérée. Non, elle était calme et posée, et elle venait tout simplement de donner à Jeremiah un ordre. Ni plus, ni moins.
En se repassant la phrase dans sa tête, Jeremiah tenta de se convaincre qu'en réalité, elle lui demandait seulement d'y réfléchir et d'essayer de trouver une idée.
Mais ça ne collait pas. Ca ne connaît plus avec l'image qu'il avait d'elle désormais. Cette facette qu'elle venait de lui montrer était nouvelle et pas déplaisante pour l'avocat qu'il était. Parce qu'exit l'image de la petite fille émotive et fragile. Celle qui avait prononcé ces mots était une femme froide qui avait savamment calculé ce qu'il fallait dire pour qu'il puisse agir. Et que cette capacité à contrôler ses émotion allait forcement servir leur intérêt devant la cour. Cette faculté inouïe de présenter différents visages en fonction des circonstances était une bonne nouvelle pour l'avocat, oui.. Mais pas pour l'homme qui commençait à s'attacher à la poupée fragile qu'il rencontrait chaque semaine.
Être avocat, être un bon avocat s'entends, c'est être capable de jauger la personnalité de celui ou celle que l'on défend. Pour la première fois de sa carrière, Jeremiah semblait s'être trompée sur la personnalité de sa cliente. il avait été prévenue pourtant mais il n'avait pas vu, ou voulu voir, cette facette chez Samantha.
En quelques petites secondes et en quelques petits mots, elle venait de détruire l'image que Jeremiah avait d'elle. S'il n'était jusqu'alors pas certain qu'elle ait pu commettre un meurtre de sang-froid, il savait maintenant avec certitude qu'elle était capable de tellement plus de choses que ce qu'elle avait jusqu'à présent bien voulu lui montrer.
Une reine de la manipulation, avait dit Timothée.
Et s'il avait raison ? Et si l'aveugle, c'était lui dans cet histoire ?
3 commentaires
Cindy.C_Auteure
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Il y a 2 ans
Scarlett Owens
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Il y a 2 ans