Fyctia

Je fermai les paupières avec la ferme intention de me remémorer. Je passai en revue ma mémoire. Mon enfance se déroula dans ma tête. Ma famille, mes pleurs, mes joies, mes aventures, cet enfant que j’avais sauvé dans la forêt... J’avais secouru un enfant ? Je clignai des cils, déroutée. Comment avais-je pu oublier ? Je pressai de mon index ma glabelle. J’y réfléchirai après. Je devais continuer de chercher l’objet. Ma rencontre avec la Reine, la naissance de Luell, les sorties avec Silas. Non, non, non... Il fallait que je me concentre. Le château de la Reine apparut, je passai avec rapidité les divers couloirs. Jusqu’à que ma mémoire me rappelle un instant.

Je jouais à cache-cache avec Silas, pendant que nos parents conversaient avec la Reine et les autres chefs. Cette partie de jeu m’avait mené à une chambre haute. J’étais allée dans l’aile ouest du palais, une aile qui arborait des peintures et en touchant celle du fond, elle s’était décrochée pour dévoiler une porte. En gravissant les escaliers, j’avais débouché sur une petite pièce pleine d’objets. J’avais pensé qu’il s’agissait d’une salle de stockage. Il y avait des pierres précieuses, des épées magiques, des parchemins et autres étrangetés. Ce fut à ce moment qu’un anneau en or possédant des gravures capta mon attention. Il était protégé d’un verre. J’avais ressenti un lien si fort que j’avais tendu la main. Le reste était flou.

Lorsque je rouvris les paupières, les branches de l’arbre s’écartèrent de mon visage. J’avais presque oublié que le Saule Pleureur était celui qui avait initié tout ceci.

— Il faut que je trouve cette bague ?

Le tronc bourdonna dans mon dos. Il semblait d’accord.

— Et pour la vérité ? Tu sais... Hmmm... L’épisode de la Lune Noire... Et ces créatures... ?

Pour simple réponse, le Saule Pleureur me chassa. Il forma une barrière de feuille après ma sortie et je soupirai. Qu’est-ce qu’il était têtu ! Je me mis en route et je fus surprise que le sommeil ne vienne pas. Durant des jours entiers, j’avais dormi, luttant sans cesse pour rester éveillée et me voilà pleine d’énergie. Tout ceci était incompréhensible. Un raclement de gorge me retint. Il s’agissait de Mylha.

— Je pense que nous sommes parties sur de mauvaises bases. Je ne savais pas qu’Altaïr et toi étiez en-

— Il ne se passe rien avec cette sangsue. (Elle arqua un sourcil et secoua la tête.) Que veux-tu ?

— Je vois que nous brulons les étapes et que nous nous tutoyons maintenant, chantonna Mylha avec un sourire. Je veux juste apprendre à te connaitre.

Je fronçai des sourcils.

— Sache que je ne t’apprécie pas. Révélai-je calmement alors qu’elle explosa de rire.

— Ne vois-tu pas que tu es jalouse ? C’en est presque mignon... Je peux comprendre pourquoi le San Emie est attiré.

Je voyais que cette peste prenait plaisir titiller mes nerfs en pianotant dessus.

— Qui es-tu par rapport au chef Tarahban ?

— Changement de sujet, hum hum. Je suis sa fille. Mais je pense que tu l’avais déjà compris. Tu as l’air d’être perspicace. Bref. Je peux t’aider à faire parler le Saule Pleureur. Ne me regarde pas avec cet air dubitatif. (Elle marqua une pause avec un autre sourire énigmatique, ce qui m’horripila.) Il te teste, il veut te sonder et connaitre la profondeur de tes convictions, de tes sentiments et de ton cœur.

— Pourquoi m’aides-tu ? Questionnai-je quelque peu décontenancée.

— Tu n’as pas besoin de le savoir, murmura-t-elle en me pinçant les joues. Si tu veux savoir, viens à moi ce soir et ramène avec toi le beau San Emie et ton adorable petit frère.