Fyctia
Chapitre 31 - Altaïr (1/2)
Je rouvris brusquement les paupières. Le pendentif en argent, que je portais, vibrait. Je le gardais tout le temps avec moi, sauf quand je me baignais. J’étais certain que Caelia avait tenté de l’ouvrir avant de m’attaquer dans mon bain. Dommage, pour elle, il était scellé. Seul mon sang pouvait le déverrouiller. Je posai mon index sur le bord du pendentif et une piqûre m’arracha une goutte de sang. Dans une lueur rougeâtre, le collier s’ouvrit et dévoila son secret. Une fumée se libéra et forma un serpent dans les mêmes teintes que la lueur. Mes stigmates réagirent instinctivement à l’apparition et des douleurs fusèrent de part et autre de mon corps.
— Où est mon père ? Demandai-je, alors que le serpent s’échappa de sa prison pour ramper autour de mon cou.
Le reptile siffla dans mes oreilles. Sa langue fourchue érafla mon lobe.
— As-tu oublié ta mission ? Parce que c’est l’impression que j’ai.
Je me tus. Je m’étais détourné, mais mon esprit s’était, de nouveau concentré.
— Je pense avoir percé la défense du phénix. Rétorquai-je.
— Donc ton père avait raison, ton apparence a captivé l’oiseau de feu. Siffla-t-il en resserrant sa prise sur ma gorge. As-tu trouvé un moyen de la mettre à terre ?
— Les... émotions, toussai-je.
Le serpent glissa sur mon bras et s’enroula, sa tête se penchant. Dans ses yeux noirs, je compris son questionnement.
— Nous avons, avec Izak, récupéré le corps de Silas, mais son pouvoir ne pouvait être usé. Nous l’avons donc rendu à Alpha Nemi. Cependant, nous ne savons pas qui l’a tué.
Le serpent se déboîta la mâchoire et recracha une boucle d’oreille pendante.
— Mets-lui. De force, si possible. (Je fronçai des sourcils.) Cela va établir un lien de familier avec le phénix. Avec sa partie animale. Caelia sera obligée de t’obéir. Donc nul besoin d’user de manipulation mentale.
— Comment ?
— Ton père a usé du même stratagème avec moi. C’est l’une des faiblesses des faés sauvages, leur partie animale peut trouver un maitre.
— Pourquoi me demander d’utiliser la même stratégie ? Surtout quand je sais que tu détestes mon père. Questionnai-je incertain.
— Pour qu’elle te haïsse. Pour qu’elle cherche vraiment la violence et qu’elle tue Vlad, me libérant de ce pacte.
Avant que je ne puisse répliquer, le serpent disparu et le pendentif se referma avec un murmure : “n’oublie pas ta mission.” De rage, je jetai la boucle d’oreille au sol. La respiration haletante, je m’assis. Les chants des enfants résonnèrent de nouveau, noyant mon désespoir. Mes yeux suivirent des feux follets dansants. Je savais que ma mission était en contradiction avec mes nouveaux sentiments. San Emie avait besoin de la puissance de Caelia, ou celle de Luell. Mais oui, je pouvais demander à Luell... Non. La situation s’aggraverait.
Mon père, Vlad, désirait le pouvoir du phénix pour notre territoire, enfin, c’étaient ses dires. Je doutais grandement de son âme altruiste. Il fallait voir la manière dont il réfutait les propos de Leodias, son bras droit. L’elfe qui calmait ses débordements de violence. Durant la réunion avec la Reine Anaxarete, il était celui qui avait apaisé les tensions dans la salle. Il était aussi celui qui m’épargnait les punitions répugnantes de mon paternel. Leodias me sauvait constamment, quand ma mère, Arista, ne le pouvait.
Vlad avait entendu une rumeur et s’était obstiné à la recherche d’informations. Ce fut à ce moment qu’il découvrit que chaque territoire possédait un gardien. D’après les archives et antiquités qu’il avait amassées, les gardiens furent réveillés pour chasser les ombres durant l’épisode de la Lune Noire. La Reine devait, d’ailleurs, être au courant, mais elle niait les dires de mon père. Je me souvenais encore de ses paroles.
Faites attention, tout trésor n’est pas bon à déterrer. Certains doivent rester dans l’oubli.
Son regard rose avait transpercé le mien, apportant le gel dans ma colonne vertébrale. Je fus pris d’un bourdonnement de questions. J’avais harcelé mon père, tambourinant à sa porte aux aurores. Au bout d’un temps, il craqua et me révéla la clef, la pièce manquante du puzzle. Pour réveiller les gardiens, il fallait les nourrir d’une puissance qui transcendait le temps et l’espace : la vie d’un phénix de feu.
La vie de Caelia.
Je poussai un râle de frustration, à m’en arracher les cheveux. Si seulement, la Reine cessait de jouer aux cachotitères et rapportait à toutes les informations qu’elle possédait. Je pris en main la boucle d’oreille et la regardai. Je devais réfléchir. Ecouter mon père et son serpent allait me jeter directement dans le feu de Caelia. La confiance, qui avait commencé à s’installer, volerait en éclats. D’autant plus, que réveiller le gardien était une obsession d’une dizaine d’années. Les ombres n’avaient attaqué que récemment. Alors, pourquoi éveiller des créatures si le danger était inexistant ?
J’enfouis la boucle d’oreille dans ma poche et me dirigeai vers l’infirmerie. Le cœur battant, je remis en place mon apparence et entrai dans la pièce. Je fus soulagé de voir que les deux phénix étaient debout, mais mon soulagement s’effrita. Caelia murmurait des mots inaudibles, son regard fixant des feux follets, quant à Luell, il semblait rendre ses tripes dans un sceau. Une main m’arrêta lorsque je m’approchai. Tarahban, le vieillard et le médecin secouèrent la tête négativement.
— Ils sont dans un état second. Les brusquer pourrait les forcer à se transformer. Et gérer deux phénix adultes ne serait pas drôle. Expliqua le médecin.
Un feu follet bleu se posa dans la main de Caelia et s’enflamma. Il grossit, crépitant avec joie. Elle l’observait et le couva de son autre main. Brusquement, Luell posa sa main sur l’épaule de Caelia et lui souffla des paroles. Caelia acquiesça et sa voix résonna, dans un chant doux. Les feux follets s’approchèrent et augmentaient d’intensité. Des ondes de lumières s’échappèrent de leur corps, et des lettres flottèrent, former par la magie de l’interaction. Je protégeai mes yeux de la lumière aveuglante.
— Mais ! Il faut la faire taire ! Elle est en train de questionner les feux follets ! Couina le médecin.
Tarahban fit un pas et la lumière disparue, les feux follets fuirent par les fissures des murs et du plafond rafistolé. Caelia se tourna vers nous et alla droit au bout.
1 commentaire
Akame
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Il y a un an