Fyctia

— Non, non, non. Ce n’est pas possible, agonisai-je. Tu ne peux pas mourir, Altaïr.

Je m’agenouillai face à son corps et posai mon oreille à son cœur. Il ralentissait tandis que son teint de porcelaine devenait blanc. Je paniquai plus que je ne le devrais. Il ne devrait pas mourir de cette manière. Je devais être celle qui lui ôterait la vie. Je mordis ma lèvre inférieure et me décidai à agir.

A l’aide de mon index, je sectionnai mon poignet et un ruisseau de sang dégoulina. Je le portai aux lèvres du San Emie et à mon plus grand désarroi, le liquide de vie poursuivit sa route sur les courbes de son visage. Mon claquement de langue résonna plus fort que prévu. Et je collai mon poignet à mes lèvres, j’aspirai et fixai son visage blême et ses lèvres bleutées et rougies par mon sang.

Avec une préparation mentale, je fondis sur les lèvres d’Altaïr et le forçai à desceller sa bouche de ma langue. Le sang s’écoula sur la sienne et en quelques secondes, je le sentis bouger.

L’une de ses mains s’ancra dans le creux de mes reins et l’autre à ma nuque. Sa langue lascive invita la mienne dans un ballet ardent alors qu’il se relevait légèrement.

Je me débattis à tel point que mes ongles s’enfoncèrent dans ses épaules. Je commençais à perdre pied alors que des sensations inhabituelles se répandaient en moi. Un gémissement s’échappa de ma gorge et il rompit le baiser. Ses yeux normalement bleu nuit, avaient viré à un violet mauve. Ils étincelaient de désir.

— Tu es vraiment… vilaine. Caelia, es-tu en train de me séduire pour mieux me détruire ?

Mon estomac se retourna. Des vibrations chatouillaient mon être alors que sa main glissa de mes hanches à ma cuisse. Il me força à m’asseoir sur lui. Altaïr huma mon parfum et avec un sourire mutin, il pénétra le galbe de mon sein, de ses crocs. Mon dos s'arqua alors qu’il buvait à grosses gouttes, les paupières mi-closes, des sons lubriques résonnèrent de mon corps. Je le sentais sourire sur ma fine peau en réponse à mon corps frémissant. Altaïr adorait l’effet qu’il avait sur moi et peu importe lequel.

La légende était donc vraie, la morsure d’un San Emie consommant du sang apportait à sa victime un plaisir interdit.

Je tentai un regard dans sa direction, et mon visage s’empourpra lorsque je croisai ses pupilles. Il buvait tout en admirant mon expression comblée et implorante.

Altaïr s’écarta légèrement et souffla sur la morsure me faisant vibrer. Sa langue rattrapa les perles rouges qui s’évadaient sur mon sternum.

— Caelia, susurra-t-il, tu es divine. En vérité, je comprends que tu peux aimer ta liberté. Mais de temps en temps, être en captivité t’émoustille, n’est-ce pas ?

Le San Emie resserra sa prise sur mon corps, mon cœur tambourinait. Une logorrhée me prit de court et cela raffermit son sourire alors qu’Altaïr posa sa joue sur ma poitrine.

— J’affectionne le fait que tu mettes des vêtements aussi dévoilant. C’est plus pratique pour mordre.

— Tu-tu… Lâche moi.

— Le désires-tu honnêtement ?

— Où est le reste du groupe ? Déviai-je le sujet.

— Tu t'es évanouie, une flèche t'a touché. Elle était empoissonnée, contre toute attente, tu as repris ta forme de phénix et une ombre t'a emprisonné dans une cage. (Altaïr posa son index sur mes lèvres rougies par mon sang et le baiser.) Izak a défendu ton frère, car ces créatures le voulaient aussi, j'ai pris la décision de te suivre et j'ai ordonné aux autres de quitter cette forêt de malheur.

— Je n'ai pas cherché à me défendre ?

— Oh si... Une vraie furie dans la cage, mais elle était comme le piège qui t'a capturé. Je devrais peut-être leur demander le matériau...

Je grimaçai et l’héritier des San Emie rit de bon cœur.

— Finalement, je n'en ai pas besoin puisque mes bras seront la meilleure prison.

Altaïr m'enveloppa dans une étreinte, cette sale sangsue profitait de mon état pour faire ce qu'il lui plaisait. J’étais étonnée qu’il n’use pas de cet instant pour me tuer ou dérober une de mes plumes.

— Merci pour le sang. Susurra Altaïr en zippant la fermeture de mon col. Je comprends mieux pourquoi ils vous veulent. La vie et la mort sont écrites dans votre être. Quelques gouttes et mes blessures ont disparu, ma vie m'a été conférée de nouveau.

— ... J'ai froid.

Avec facilité, Altaïr se releva avec moi dans ses bras.

— Bon... J'ai peut-être bu plus que quelques gouttes... Tu es la coupable, ton sang ne devra pas être aussi succulent.

— Sale gros porc.

— Dans les vapes, et toujours autant de fougue. Admirable.

— Tu es détestable...

D'une main, Altaïr retira sa cape et me la passa sur les épaules. Mon visage se blottit contre le creux de son cou. Je n'avais pas la force d'une nouvelle joute verbale. Le reste fut très flou, des apparitions d'Opal, une voix pleine d'avertissement, des exclamations et enfin le calme.

Je marchais dans la brume, une voix chantonnait et une petite fille apparut. C'était moi. Elle me prit la main et m'enfonça dans le brouillard. Elle parlait et je ne captais aucun son. L'épaisse brume se dissipa et un décor en ruine s'illustra. J'avais l'impression d'avancer dans un champ de bataille millénaire. La végétation dévorait des blocs de pierre et je ne savais pas s'ils étaient à l'origine des tombes ou d’un temple.

Le Tombeau des Flammes.

— Je ne comprends pas !

La petite Caelia pointa du doigt un écriteau et répéta "Le Tombeau des Flammes."