Fyctia

Mon sang ne fit qu’un tour. Axion posa sa main sur mon épaule, sentant mon corps se réchauffer. La chaleur irradiait mon être. Je voulais le déchiqueter. De multiples pensées affluaient dans ma tête. Je mordis ma lèvre et me redressai. Un sourire se dessina sur mon visage. Le changement déstabilisa mon oncle et le reste du cortège.

— Bien le bonsoir, Altaïr, héritier du clan San Emie.

Un ultime rayon de soleil s’écrasa contre le mur, marquant la cassure entre nos deux clans. Altaïr sortit une fiole rougeâtre de la poche de sa chemise. Il l’apporta à sa bouche et en but une gorgée, mettant sa bague armure dorée en avant. La pointe fine et aiguisée me remémorait mes serres.

Du coin de l’œil, j’aperçus mon clan se bander tel un arc. Il s’agissait du sang de Silas. Avant que mon oncle ne puisse agir, je traversai le rayon de soleil et réduisant la distance entre nous, Altaïr me dévisageait avec un sourire de glace.

Ses cheveux longs et argentés, plaqués parfaitement en arrière, cascadaient sur ses épaules carrées. Ses iris d’un bleu si profond qu’ils semblaient ténébreux renvoyaient une image sculptée dans le marbre. Il haussa d’un sourcil alors qu’une goutte de sang ruissela de ses lèvres charnues.

D’un mouvement lent, j’essuyai de mon pouce le sang de mon ainé et murmurai :

— Pourrais-je récupérer le corps de mon frère ?

Ma main descendit sur sa gorge puis son torse. D’un mouvement sec, il écarta ma main. La haine était visible dans ses pupilles, et à mes yeux, il s’apparentait à une proie.

J’en étais heureuse, mes stigmates arpentaient toujours son corps. La douleur devait être atroce. Et bien plus qu’à l’accoutumé, vu notre proximité actuelle.

— Il ne nous sert plus, vous pourrez procéder à son enterrement. Par respect, nous avons usé de magie pour conserver son enveloppe corporelle intacte.

Je fis une révérence et contournai cet homme avec un visage joyeux. Axion me rattrapa par l’épaule avec un sifflement.

— J’aurais parié sur une bataille imminente.

— Je sais poser mes cartes, mon cher oncle.

***

Une énième présentation avec une courbette et je relevai le visage face à la Reine-Mère, Anaxarete. Rien que sa prestance faisait décroître les têtes, sa couronne d’acier et d’argenté renforçait son apparence. Et pourtant, son doux visage et ses iris roses contrastaient avec son allure, presque divine.

Lorsque son sourire m'illumina, je sentis mon cœur se gonfler de fierté. Je n’aurais jamais cru avoir autant envie de servir quelqu’un. Elle se dressa de son trône et descendit les quelques marches avec une démarche féline. Son élégance captivait les foules.

— Comment vas-tu ma chère Caelia, dernier phénix femelle et héritière du Clan Alpha Nemi ?

Ses doigts se postèrent sous mon menton. Et mon oncle prit la parole avant moi.

— C’est un plaisir de vous voir aussi, ma chère Reine... Ironisa-t-il.

— Mon vieux Axion, je te vois presque tous les jours (elle secoua la tête avec un rire et reprit avec un ton sérieux.) Je suis peinée pour Silas... Il était un bon jeune homme. Si cela ne tenait qu’à moi, je punirais les malfaiteurs-

— Meurtriers, Reine-Mère.

Mon oncle me décocha une petite claque derrière la tête, ce qui arracha un sourire à la Reine.

— Meurtriers. Tu as bien raison, Caelia. Mais mes mains liées, si j’intervenais, cela ferait de moi un tyran.

— Les tyrans ont plus de classe... marmonnai-je.

— À quel prix, mon enfant ?

Sa question resta en suspension, tel un papillon. Elle laissa, de nouveau, courir ses doigts sous mon menton et me congédia doucement :

— Je dois m’entretenir avec le chef de ton Clan, j’ai hâte de te voir au bal. Axion m’a révélé avec excitation la tenue sur mesure.

***

Comme à chaque visite, le personnel m’avait attribué une magnifique chambre. Et bien sûr, éloignée de celle d’un membre des San Emie. Le bal débutait lorsque la lune serait haute dans l'éther et resplendirait de mille feux dans ce ciel étoilé. J’avais donc le temps de voguer à mes désirs.

J’ouvris la fenêtre, admirai la vue imprenable et me laissai chuter dans le vide. Les flammes tournoyèrent autour de mon corps et celui-ci s’enflamma. En un battement, je fus aussi haute que la terminaison des tours du palais.

Des oiseaux se joignirent à cette danse sous le levé de l’astre blanc. L’adrénaline pulsait dans mes veines et je poussai un cri de joie. Je plaignais les êtres terrestres qui ne pourraient jamais sentir le vent caresser leur corps, l’atmosphère se charger d’électricité quand un orage arrivait, l’odeur de la mer apporter par des alizés.

Mes sens s’éveillèrent et j’esquivai une flèche ombreuse qui se logea dans un oiseau. Son regard implorant glissa vers l’obscurité de la terre. Je plongeai vers lui.

Plus vite, plus vite.

Mes serres le capturèrent à l’ultime seconde et je décollai de nouveau. Il ne fallait pas rester statique. D’où venait cette flèche ?

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J'espère que le chapitre vous a plu <3