Fyctia
Gaye kounye a (2)
Kyo tique, avant de m’abandonner sur le lit pour se faire plus autoritaire face à moi.
— Personne n’a dit que ce serait facile Rockey. Les questions sont, qu’est-ce que tu veux ? Et, est-ce que tu le veux vraiment ?
— Je voulais juste des réponses, pour pouvoir tourner la page.
Le regard plus étrécit qu’à l’accoutumée, elle secoue la tête, à la fois réprobatrice et désolée.
— Tu n’es pas venu chercher un père aussi ?
Plutôt mourir que de l’avouer.
— Pas du tout ! m’offusqué-je, avec dans le corps la sensation d’être balafrée par une lame jusqu’à l’os. Quinze années se sont écoulées, je n’en ai plus besoin, il y a longtemps maintenant.
— Alors c’est soit tu te mens à toi-même, sois tu ne sais pas t’écouter. Mais je vais juste te dire une chose ma sœur, ton bonheur comme ton malheur, tu es la seule qui le fabrique, l’entretien ou l’efface. Doués de raison et habités par la passion, nous sommes maîtres de notre destin.
Elle m’énerve à jouer les psys. Et quel psy ! Elle m’accable au moment où, soutien et compréhension sont mes seuls besoins.
— Comment tu peux me dire ça maintenant Kyo ? m’énervé-je en me mettant dans la même posture qu’elle. Je ne méritais pas qu’il m’abandonne pas de cette façon. J’avais besoin de lui ! J’avais besoin qu’il m’aime. Je n’ai rien fait pour mériter ça !
— C’est exactement ce que je dis Rockey, ne se démonte pas mon amie pas très amicale pour l’heure. Tu devrais commencer par le comprendre toi-même. Arrête de te punir, cesse de te faire du mal en pensant que tu es responsable de son départ. Tu n’y es pour rien, et tu peux être heureuse.
— Comment ?
— Pardonne, assène cette dernière, comme si c’était la chose la plus normale du monde, l’œil grand, fixe et imposant.
Je ne ressens rien y aille dans ce sens-là. Elle n’y est pas. Elle n’y sera jamais, elle ne sait pas ce que c’est que d’être moi.
— Tu ne comprends rien.
— Peut-être bien, mais il est de plus en plus évident que tu refuses de voir autre chose que ta tristesse. Regarde un peu autour de toi. Tu as une sœur, sa mère est un amour avec toi et sa tante pourrait être une amie, si seulement tu lui en laissais l’opportunité. Les réponses ne sont peut-être pas celles que tu espérais, mais tu as cette fois l’opportunité de dire à ton père ce que tu as sur le cœur, et tourner définitivement la page. Tu n’as peut-être pas trouvé l’amour de ta vie, cependant ton fils pourra avoir un père à présent.
Si seulement je pouvais la jeter par-dessus le balcon. Elle me fait saigner de partout avec ses conseils dont les seuls effets sont une légion d’écorchures atrocement brûlantes. On dirait des coups de fouets, ou même de coups superficiels de lames aiguisées. C’est vif, surprenant, déplaisant.
Et parce que saumâtre, je ne peux en gober davantage.
— Stop Kyo ! Arrête, car on voit bien que tu n’as jamais été à ma place. Et puis, je te l’ai dit, je ne veux pas parler de Dwayne.
— Addis.
— Peu importe, m’enfoncé dans ma colère, nerveuse, les doigts tendus dans le vide. Il y a peu il n’était qu’un rêve, un fantasme, une passade, et tu voudrais que je le ramène comme ça à ma mère, à mon fils ? Il a une vie ici. Une vie remplie, je n’y ai pas de place, parce qu’il a déjà une femme, des enfants et enfin, il y a ce père d’adoption, mon père, que je ne veux plus jamais revoir de ma vie. En plus s’il m’a menti sur son identité, lors de notre rencontre, c’était pour une raison évidente.
— Tu as un enfant au milieu.
— Oui, et qui ne manque de rien avec sa mère et ses mamies ! On va en rester là Kyo, me vidé-je bruyamment les poumons, dans l’espoir d’apaiser mes tremblements. Je vais te demander de respecter mes choix. C’est ma vie. Je comprends tes inquiétudes, et te remercie pour ton amitié, mais je le dis et le répète, tu ne sais pas ce que c’est de sentir qu’on a pas été désiré. Et s’il ne l’aime pas ? Sa fiancée, il l’aime. Vas savoir toutes embrouilles que je vais leur causer en révélant l’existence du petit. C’est mon bébé qui en pâtira, comme je le fais aujourd'hui. Ça c’est hors de question. J’ai commis une erreur, je vais en assumer les conséquences, comme toujours. On s’en sort bien en plus. Ocean ne manque de rien et quand j’aurais mon diplôme, ce sera définitif.
Elle tente une approche sédative vers moi, cependant il est trop tard. Les paumes levées, je ne suis plus réceptive à rien. Au sens propre comme figuré du terme, je ne veux plus rien voir. Ses paroles de verre sont déjà logées dans mon ventre, où d’ailleurs, elles s’attèlent à me cisailler les entrailles, alors ce n’est plus la peine de me boucher les oreilles, pour mieux la mettre à la porte.
— Ok, je m’en vais. Toutefois, j’insiste, pense à ce qu’on s’est dit.
— Tout est réfléchi, je t’appellerai de la gare demain. Tu pourras venir me dire au revoir si tu veux.
J’ai beau me refuser la vue, je reste en mesure de ressentir, et devine donc aisément toutes les suppliques sourdes que reflète son visage, ou la désolation soudée à son corps affaissé. Je peux parier, (et gros) sans entrainer mon palpitant sur les sentiers de l’angoisse, qu’elle a la nuque légèrement tirée vers l’arrière, au-dessus d’un cou raide qu’on croirait avoir disparu, si on n’a uniquement accès à son dos. Inconsciemment aussi, elle fronce le menton, ce qui lui donne une moue navrée et un air désespéré affreusement attendrissant.
C’est pour toutes ces raisons, et plus, qu’il faut rester hors d’atteinte. Elle veut peut-être mon bien, ceci n’exclut pas le fait qu’elle puisse se tromper. Ça peut arriver. Par ailleurs, c’est le quotidien de tout parent responsable, de tout amie digne de ce nom et celui de tout être aimant et inquiet, d’où mes retenues.
La porte refermée, je fais tôt de tomber sur mon portable. Maintenant que je rentre, il n’y a plus de raison d’éviter ma mère. Et puis, il me reste une dernière chose de très importante à mener à bout. Ma revanche, je l’aurais, coute que vaille. Puisque Billy veut jouer à « qui blesse plus profondément que l’autre » alors je vais lui montrer de quoi je suis capable.
Bien avant cette fête de bienvenue, placée sur le sceau des apparences et de l’hypocrisie, j’avais déjà commencé à effectuer certaines recherches sur les journaux locaux. Des plus suivis, aux plus scandaleux et en ai constitué une petite liste comprenant, noms et numéros. Pressée par le temps, je compose la première suite de chiffres, une fois mon calepin ouvert, et attend, le corps étrangement calme, le temps de deux sonneries. Je suis accueillie par une jeune femme. Elle présente le journal avant même que je n’expose l’objet de mon appel. Puis, quand je me penche enfin sur ledit sujet, son ton professionnel, joyeux mais désinvolte, devient soudain grave et intéressé.
— Vous dites avoir des informations à nous fournir sur Billy Davis et sa fille, c’est ça ? Puis-je avoir votre nom s’il vous plaît ?
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Royal air
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Il y a 4 ans
hbdo1
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Il y a 4 ans
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Fanfan Dekdes
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