Carrie N Résistance L'Octavio

L'Octavio

Je n’ai pas eu de réponse au SMS envoyé à Cassy. Une humiliation de plus. Je n’aime pas me faire balader.

Elle a été absente le reste de la semaine qui a suivi le rendez-vous avec le big boss. Je ne l'ai donc pas recroisée. Je l'ai su suffisamment tôt pour éviter de me prendre la tête sur une éventuelle rencontre.


J’ai besoin de regards remplis de désirs pour moi, comme celui d’Alexia l'autre fois, aujourd'hui plus que jamais. D’ailleurs elle est là ce soir, à me tourner autour. J’imagine que le brin de folie qu’elle couve en elle plaît suffisamment à Jules pour qu’il ait encore envie de se la faire. Pas moi. J’ai envie de passer à autre chose. Me prouver que je peux plaire à d'autres, encore.


Gustave et Franck nous ont rejoints. C’est avec eux que je vais m’asseoir à une table du Petrivo, Jules restant accoudé au bar à discuter avec certaines de ses connaissances. Alexia semble partagée entre rester près de lui et nous suivre. Elle finit par venir s’installer à côté de moi et me regarder. Qie dis-je, me dévorer. Une chaleur m'envahit et je lui souris. Elle prend ça comme une ouverture et entreprend de me malaxer la cuisse. Merde.

— Alexia, tu perds ton temps là.

Son regard s’assombrit et son sourire s’efface pour laisser place à une moue, subitement. C’en est presque effrayant !

— Tu ne disais pas ça hier soir.

Et ça y est c’est parti. Je n’ai pas envie qu’elle déballe ses griefs devant mes collègues de boulot.

— Qu’est-ce que tu veux ?

— Toi.

Elle repart à la charge de ma cuisse. Je souffle et, pour une raison que j’ignore, mon regard croise celui de Franck au même moment. Il a la bouche ouverte, les yeux écarquillés et baverait presque. Gus’ suit mon regard, y plonge le sien avant que nous n'éclations de rire en cœur.

Alexia sursaute, ne comprenant pas ce qui est aussi drôle.

— Tu as une victime toute trouvée en face de toi.

Je lui montre Franck qui sort de sa torpeur. Il déglutit. Alexia pose ses yeux sur lui puis revient aux miens, une lueur de colère traversant son iris. Je crains subitement qu’elle ne soit désobligeante vis-à-vis de Franck et m’apprête à parer le coup. Mais il ne part pas. Elle se lève, serre les poings en me fixant encore quelques secondes, puis rejoint Jules d'un pas résolu. Ouf !

— Putain, le canon !

Franck déglutit, semblant avoir retrouvé son air béat en la regardant se déhancher sur ses talons.

— Et tu te l’es tapé hier soir ?

Ah, c’est à moi qu’il s’adresse maintenant.

— Ouais.

— Putain ! Et tu refuses ce soir ?

— Ouais.

— Mais pourquoi ?

— Remets toi gros ! Jamais deux fois avec la même meuf, c’est une règle d’or.

J’entends Gustave rire. Je blêmis, réalisant ce que cette déclaration implique. Je tente de minimiser l’impact de mes paroles.

— Enfin, la plupart du temps.

Il rit une nouvelle fois. Non mais quel con ! C’est Gustave. Il n’est pas dupe. Je baisse les yeux dans mon verre et change de conversation. Nous discutons à bâton rompu de nos créations, nos orientations artistiques, et ça me fait un bien fou, me donnant envie de m’y remettre en rentrant. Je n’ai pas repris mes crayons depuis la visite de Cassy.

— Putain faut que j’aille aux chiottes. J’ai la bière qui redescend déjà !

En plein milieu d’une phrase, Franck nous balance son besoin naturel en pleine tête. Un silence s’abat sur nous tandis qu’il se dirige vers les toilettes. Nous éclatons de rire avec Gustave à nous en faire mal au ventre. Sacré Francky !

Lorsque nous nous apaisons enfin, Gustave m’interpelle.

— Alors, tu as contacté Cassy ?

Mon sourire disparaît.

— Oui. Je lui ai fait parvenir un SMS de remerciements.

— Et ?

Il me regarde par en dessous, dans l'expectative.

— Elle ne m’a pas répondu.

— Ah.

Il se redresse, se triture les doigts sur la table. Quelle réaction étrange.

— Et tu ne l’as pas relancée ?

— Non. Pour quoi faire ? Elle a fait son job ou plutôt a réparé les conséquences de ses mauvaises fréquentations pour que ça ne porte pas préjudice à un employé et basta. Ça n’enlève en rien l’humiliation qu’elle m’a infligée.

Le mot est posé. L’énoncer ainsi me fait réaliser à quel point je me suis senti mal. Gustave s’esclaffe.

— L’humiliation ? Je pensais qu’il t’en fallait plus que ça !

Il m’agace et je le lui fais savoir en lui lançant un regard lourd de reproches.

— Quoi ! Où est passé le tombeur de ses dames Baptiste ! Alors c’est tout ? C’est fini, comme ça ? T’abandonnes ?

Une nouvelle fois ses bras qui s'écartent. Oh putain, j’ai envie de lui casser sa jolie gueule. Je ferme les poings et lui répond en serrant les dents.

— Va te faire foutre Gustave.

— Sans façon, merci.

Pardon ? Il me balance un regard en coin, rictus aux lèvres.

— Putain, Gus’

— Mais je n’en démordrai pas.

— Je t’emmerde.

— Ca non plus, sans façon.

— Oh, tu fais chier tiens !

— Désolé. T’as prévu une couche au moins ?

Je l’attrape par le col de son t-shirt pour le secouer gentiment, lorsque Francky déboule en trombe. Il me tire en arrière. Surpris, aussi par sa force, il me propulse. Je me retrouve le cul au bord du fauteuil d'où je glisse sans pouvoir me retenir. La chute est douloureuse !

Gustave éclate de rire en se levant, une main devant sa bouche. Franck va de l’un à l’autre, sur le qui vive.

— Bapt’ ça va ?

Gus’ me tend la main pour me relever.

— Ça fait mal au cul !

— Putain vous foutez quoi les gars ?

Francky n’y comprend plus rien. Gustave le rassure. Francky s’excuse et nous reprenons nos places respectives. Gustave reprend.

— Tu connais l’Octavio ?

— C’est un bar ça non ?

— Ouais. Pas très loin d’ici. Ça vous dirait d'y aller ?

Je fais une moue douteuse.

— T’es pas bien ici ?

— Si, mais ça pourrait être sympa de changer.

— Une autre fois peut-être.

— Aller Bapt’, s’te plaît.

Je suis perplexe. Mais parce que Gustave demande rarement quelque chose, je valide. Je m’en vais saluer Jules avant de suivre mes deux collègues.


Nous marchons quelques minutes avant d’atteindre la porte de ce bar où je n’ai jamais eu envie d’entrer. J’en ai vaguement entendu parler. Je traine la patte.


Nous y entrons, visons une table où nous allons nous asseoir, passons commandes. La musique qui se diffuse grince à mes oreilles. La variété française n’est définitivement pas mon truc.


Gustave scrute la foule, bien dense. Il semble chercher quelqu’un.

— T’as un rencart ?

— Non, non.

Il reprend malgré tout le passage des clients au laser, avant de se redresser, un sourire au lèvre.

— Tiens, regarde qui voilà !

Il me montre deux filles qui nous matent.

— Tu les connais ?

— Qui ça ?

— Ben, les meufs que tu nous montres ?

Elles se déplacent dans notre direction, avec une attitude très explicite sur leurs intentions, dégageant la vue derrière elles. Je comprends alors qui Gustave a voulu me montrer.

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