Carrie N Résistance Avancée

Avancée

Je reste sans voix. Cassy baisse les yeux et se met à tortiller nerveusement le porte clé « tête de mort » qui agrémente la fermeture éclair de son sac à main. La noirceur de cette babiole contraste tellement avec la fragilité que dégage Cassy en cet instant.

— Je pensais bien te trouver ici.

Malgré ses joues rosies, elle essaie d’avoir une contenance en me souriant.

— Tu as bonne mémoire.

Elle regarde la petite blonde restée à mes côtés, que j’avais complètement oubliée, puis Jules, avant de me regarder à nouveau.

— Serait-il possible de te parler en privé ? Ce ne sera pas long.

— Oh, bien sûr (aussi longtemps que tu le voudras).

Je quitte mon tabouret, que dis-je, je saute de mon tabouret, pour la suivre vers une table non loin de là. Je ne marche pas droit et mon cul est content de trouver un fauteuil rembourré. Les doubles commencent à faire leur effet. Nous nous asseyons, côte à côte. Je sens cette fameuse chape énergétique que Cassy dégage, m’envelopper comme le premier jour. Je veux fermer les yeux, la serrer dans mes bras et…

— Je suis vraiment désolée de te déranger après le boulot, mais étant donné ce qu’il s’est passé, je voulais te parler. J’ai essayé de te joindre sur ton mobile, mais comme tu ne répondais pas, j’ai tenté ma chance ici.

J’ai un mouvement de recul et cherche mon mobile dans la poche arrière de mon pantalon, avant de me rappeler que je l’ai jeté sur le siège passager de ma caisse en montant dedans, après l’altercation.

— Oh, je n’ai pas mon téléphone sur moi.

— Ce n’est pas grave, le principal est que je t’ai trouvé.

Je la regarde, droit dans les yeux et je m’y perds, comme elle apparemment, durant quelques secondes.

— Que voulais-tu me dire ?

— Oh… Pardon.

Elle baisse les yeux, triture ses ongles en demi-longueur et rougit. Elle est belle, Cassy. Si belle. Je dessine chaque courbe de son visage avec mes yeux. Je dois m’appesantir sur la grâce de ses fines oreilles quand je réalise qu’elle me fixe. Je lui souris, elle me répond.

— Je voulais te remercier pour ton intervention.

— Oh…

— Je n’ai pas particulièrement envie de m’étaler sur le sujet, la situation étant assez gênante comme cela, mais je suis contente que tu sois venu à ma rescousse.

— Je t’en prie.

Que puis-je dire de plus ? Il y a tellement de questions que j’aimerais lui poser sur sa relation avec ce type ? Mais elle n’y répondra pas. Je passe une main dans mes cheveux et me mords la langue. L’alcool me monte à la tête et si nous ne terminons pas cette conversation rapidement, je risque de déborder, et pas seulement dans mes questions.

— Et je te remercie également pour les planches. Très intéressantes.

Je me tends subitement sur le fauteuil. Cassy a retrouvé son air habituel qui me fait chavirer, sourire radieux et regard mutin.

— Oh… Content que tu les trouves intéressantes.

— Nous pourrons en échanger à l’occasion. J’aimerais éclaircir l’une d’entre elle.

Yes, j'ai une ouverture ! Mon cœur tressaute et je jubile.

— Ah… Laquelle ?

— Celle où la femme chevauche le tigre.

Je rapproche mon visage, plante mon regard dans le sien, et lui sourit à pleines dents.

— Je me ferai un plaisir de te donner ma version de ce dessin. La phrase que je t’ai envoyée en exprimait l’essence.

— Oh. Je vois.

— Tu vois ?

Je lève un sourcil et appuie mon menton sur mon poignet, coude appuyé sur la table, mon visage à quelques centimètres du sien. Si elle ne bouge pas, je vais lui rouler une pelle, c’est sûr.

— Je crois oui.

Elle ne bouge toujours pas. Je me penche un peu plus et ... Merde ! Elle tourne la tête et reprend un air sérieux.

— Je dois y aller Baptiste. J’ai défendu ta cause auprès de Bertile, enfin, de Monsieur Darlan. J’espère que Foster ne fera pas plus pression sur lui afin qu’il ne change pas d’avis quand à ton avenir dans l’entreprise.

— OK. Merci.

— Bonne soirée Baptiste.

Elle se lève et disparaît à la vitesse de la lumière. Et je reste comme un con assis à la table. Non, ça ne peut pas se passer comme ça.

Je me lève à mon tour et me lance à sa poursuite. J’ai la tête qui tourne subitement et j'ai du mal à avancer. Je me prends les pieds dans une chaise, me retiens à un mur, mais il est hors de question que je la laisse filer. Elle veut parler des dessins ? On va en parler !


Lorsque je réussis à rejoindre le trottoir, elle s’apprête à monter dans sa voiture. Je l’interpelle et elle se retourne. Je prierais presque pour qu’elle attende avant d'y monter et mon vœu est exaucé.


Je pose la main sur le loquet de la portière côté passager.

— Tu peux me ramener chez moi ? J’ai trop bu et je ne peux pas conduire.

— Pardon ?

J’ouvre la porte et m’installe. Cassy ne bouge pas l’espace d’un instant, puis finit par passer la tête dans l'habitacle et par me regarder.

— Tu plaisantes Baptiste.

— Non. Et puis tu m’en dois une.

Je lui fais un clin d’œil. Elle baisse les yeux, hésite puis s’installe sur son siège en claquant la porte. Quelques secondes passent où elle reste figée, puis elle met le contact, pose ses mains sur le volant et me regarde, l’air amusé. Je souffle presque de soulagement. Elle n'est pas en colère. Je lui fais un immense sourire auquel elle répond. Elle démarre et nous quittons la place de stationnement.

— Où dois-je te conduire ?

— C’est à cinq minutes, droit devant.

Je la guide et nous arrivons à bon port rapidement, trop à mon goût. Elle se gare juste devant la porte d’entrée de l’immeuble où se trouve mon appartement.

— Tu montes boire un verre ?

— Non Baptiste, je dois y aller.

— Pourquoi es-tu si pressée ? Tu es attendue ?

Si elle me dit oui, je la séquestre quand même.

— Non Baptiste, je ne suis pas attendue mais…

— Tu voulais parler des dessins, c’est l’occasion ?

Elle me fixe et se tait. Elle semble chercher une réponse convenable.

— Je t’en montrerai d’autres si tu aimes.

Son visage s’illumine et elle abdique.


Putain je suis trop imbibé. J’espère être capable de garder la tête froide, un minimum.

Nous sortons de sa Golf, franchissons la porte de l'immeuble et de l’appartement, où je réussis à insérer la clé dans la serrure comme un grand, et laisse Cassy me précéder. Elle commence à faire le tour du propriétaire (enfin j'aimerais bien).

— Tu vis seul ?

Sa question me surprend.

— Oui, pourquoi ?

— Voilà un appartement qui ne ressemble pas à celui d’un célibataire. Je m’attendais à y trouver un joyeux bordel.

— C’est cliché ça. Je n’aime pas le bordel. C’est comme dans mon travail ou mes dessins, créatif mais structuré.


Cassy fait une moue approbatrice absolument craquante avec sa bouche, en retournant sa lèvre inférieure, qui me donne envie de fondre sur elle et de dévorer ce bout de chair charnu. Je la fixe, cette bouche, et je lèche ma lèvre inférieure comme j'aimerais lécher la sienne, la goûter, la suçoter, la…

Ah, la moue vient d’être remplacer par un immense sourire. Pris en flag, une nouvelle fois. Je hausse les épaules.

— Jolie moue.

— Baptiste.

— Oui Cassy.

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