Fyctia

Il semblerait que j’ai réussi un tour de passe-passe en récupérant tout ce qu’il y a de beau chez mes parents. J’ai la stature de mon père avec mon mètre quatre-vingt dix, sa bouche gourmande et sa musculature parfaitement dessinée.

Ma mère m’a laissé sa finesse et sa grâce, ses grands yeux bleus clairs en amande à tomber, qui ont pour seul défaut d'être un peu trop expressifs, ce qui fait que ceux qui me connaissent bien savent lire en moi comme dans un livre ouvert.

J'ai hérité aussi du soyeux de ses cheveux mais pas de leur couleur. Les miens sont châtain foncé, quand les siens sont noir de jais. Ils tombent jusqu'à mes épaules actuellement alors qu’ils descendaient jusqu’au bas de mon dos avant que je ne me présente à l’entretien d’embauche de l’agence de communication Maruka. J’avais pas mal de piercing. J’ai gardé mes boucles d’oreille et le barbel situé sur ma langue. Il s'agit d'une décision personnelle à vrai dire. Les recruteurs ne m’ont rien demandé mais pour mon premier taf en entreprise, je voulais mettre toutes les chances de mon côté. Je savais que ma belle gueule pouvait tout aussi bien me servir que me pénaliser lors d’un entretien d’embauche, encore plus si j’étais « décoré » comme se plaît à le dire ma mère.

Finalement, je me suis retrouvé face à deux types avertis qui n’ont absolument pas pris en considération ma gueule mais bien mes compétences, ce qui a été perturbant pour quelqu’un qui, comme moi, a toujours fonctionné au physique. C’est ma passion pour le graphisme et ma créativité qui les a fait pencher en ma faveur.

D'aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours dessiné, lu des mangas, des bandes dessinées, rarement de la littérature, parfois du fantastique qui m'inspire. Je leur ai présenté quelques esquisses réalisées récemment et mon travail en tant que graphiste produit lors de stages et à titre personnel. Certes, j’ai très peu d’expérience en entreprise mais mes créations et ma motivation leur ont plu.

Avant d’arriver au graphisme, ma mère m'avait destiné aux métiers de la mode. Les agences de modèles m’ont démarché assez tôt et j’en ai bien profité. A l’époque, j’étais un gamin et ma mère m’accompagnait. Je revois encore son visage à la fois fier et ému lors de mon premier défilé pour un grand couturier. J’avais huit ans.

Ce qui m’a intéressé par la suite avec ce job, ce sont les jolies filles, et le monde de la mode en regorge à foison. Je me suis fait ma petite expérience et au beau gosse se sont ajoutés tout un tas de surnoms comme « le bel étalon », « le tombeur », voir même « l’arnacoeur » …

Ça pourrait être flatteur sauf que je me suis toujours entendu dire que j’étais beau. J’imagine que je n’apprécie pas tous ces compliments à leur juste valeur, mais ils me permettent de savoir quelles sont mes ouvertures avec les filles presque tous les soirs. Je continue à faire quelques photos mais ça me gonfle. J’ai décidé de privilégier aujourd’hui mes vraies passions : le graphisme et le sexe.

J’ai eu ma première expérience sexuelle à douze ans, avec un mannequin qui en avait dix-sept. Elle me trouvait trop craquant et je faisais plus vieux que mon âge. Depuis, je n’ai jamais arrêté et je me suis parfait dans mes techniques de séduction pour faire tomber sous mon charme les plus récalcitrantes. Il y en a des femmes qui essaient de me résister, soi-disant parce que je me crois arrivé. Mais j’ai une réputation à tenir et j’adore jouer et relever les défis, si bien qu’aucune d’entre elles n'a jamais lutté longtemps.

Dans l’immédiat, il y a une couille dans le potage. Aujourd’hui est mon premier jour officiel, mais je n’arrive pas à me concentrer. Il y a encore deux jours, j’avais hâte de commencer, de me débattre avec ma souris et de montrer de quoi je suis capable. Mais ma semaine d’intégration m’a conduit au sein du service marketing où j’ai passé une matinée afin de découvrir comment l'équipe travaille et comment interagir avec elle.

C’est la responsable, Cassy, qui m’a pris en charge. Depuis que mon regard est tombé dans le sien, j’ai la tête à l’envers et j’ai du mal à comprendre ce qu’il m’arrive.